Un quartier « presque sans voitures »
Laval
Une fois l’entrevue acceptée pour parler de la place de l’auto dans le développement de la troisième ville du Québec, le maire de Laval, Stéphane Boyer, a donné rendez-vous au Devoir dans une petite rue résidentielle de Fabreville. Les maisons unifamiliales rapprochées densifient le secteur. La majorité des voitures se stationnent à l’arrière des résidences. Il n’y a pas de trottoir, mais la circulation pacifiée est quasi absente. Ce genre de développement qui date pourtant du XXe siècle est cité en exemple à suivre dans le livre du maire Des quartiers sans voitures. De l’audace à la réalité (Somme toute, 2022), où il est écrit que « l’idée de quartier sans voitures est plutôt un retour aux sources que l’inverse en ce qui concerne l’esprit de communauté et d’équilibre vers lequel nous souhaitons tendre ».
Stéphane Boyer représente une banlieue très, très majoritairement organisée autour d’autoroutes et de centres commerciaux, un modèle dont il connaît les avantages comme les inconvénients.
« Je ne critique pas la voiture, dit-il. Pour moi, la voiture, c’est une liberté. Elle est vécue comme ça en banlieue, c’est-à-dire comme la liberté de se déplacer comme on veut, quand on veut. En même temps, avoir développé des villes où tout est éloigné fait qu’on se retrouve tous isolés dans une voiture pour nos déplacements. Ce modèle engendre des villes plus stériles, où les gens ne se parlent pas, ne se rencontrent pas, où tout devient plus utilitaire. »
L’élu propose donc de construire des quartiers densifiés où les déplacements se feraient essentiellement à pied et à vélo avec une seule rue carrossable pour les besoins fonctionnels dont la livraison ou les services d’urgence. Des stationnements en périphérie offriraient des voitures en libre-service. Le transport en commun relierait ces quartiers entre eux. L’essai du maire cite des exemples concrets, dont Vauban, en Allemagne, et Pontevedra, en Espagne.
Un premier quartier résidentiel d’environ 4000 logements « presque sans voitures et carboneutre », le carré Laval, est envisagé dans une ancienne carrière longeant l’autoroute 15. « Ce serait trop complexe de refaire un quartier au complet, mais on doit apprendre à faire de nouvelles choses différemment. Il faut bien sûr que les gens embarquent dans ce changement. […] Quand on a une vision, on doit guider la société vers ce qu’on pense être la meilleure chose à faire, mais on doit aussi impliquer les gens dans cette discussion. Sinon, dans un extrême, tu deviens un dictateur et dans l’autre extrême, un populiste. »