La production audiovisuelle en net recul
Le volume de réalisation d’émissions et de films a fléchi d’environ 20 % au Québec, selon des chiffres préliminaires
Après des années fastes durant la pandémie, les investissements dans les émissions de télé et les films québécois ont considérablement ralenti dans la dernière année. On estime qu’en un an, le volume de production dans l’audiovisuel a baissé entre 18 et 20 %.
C’est ce qu’indiquent des données préliminaires compilées par l’Association québécoise de la production médiatique (AQPM), qui tenait cette semaine son congrès annuel à SaintHyacinthe. Ces chiffres, qui excluent les tournages étrangers, concernent la période allant d’avril 2023 à mars 2024. Il s’agit d’un revirement par rapport à la tendance observée au cours de la pandémie.
« Les budgets avaient augmenté durant la pandémie. Durant cette période, Québecor a lancé la plateforme Vrai et Bell a lancé sa chaîne généraliste Noovo. La demande pour du contenu original était forte. Ça a beaucoup ralenti aujourd’hui. On sent qu’il y a une consolidation », a expliqué Hélène Messier, présidente-directrice générale de l’AQPM.
Durant les années pandémiques, le volume de la production de films québécois avait légèrement diminué. Mais en télévision, il avait plutôt connu une croissance exceptionnelle en dépit de chute des revenus publicitaires qui affectait les diffuseurs. En 2019-2020, les producteurs indépendants se partageaient 664 millions de dollars pour tourner des contenus télévisuels ; deux ans plus tard, cette somme s’élevait à 848 millions.
À l’époque, le nombre important de tournages québécois posait même des problèmes de pénurie de main-d’oeuvre sur les plateaux ; c’est beaucoup moins vrai aujourd’hui. Les producteurs indépendants, qui sont derrière la plupart des émissions en ondes au Québec, ont été rattrapés par la crise qui frappe l’industrie.
« C’est certain que quand les diffuseurs suppriment des postes, il y a aussi une rationalisation dans la production. Si chaque diffuseur investit deux ou trois millions en moins dans la production, ça se traduit par moins de commandes d’émissions pour nous », note Hélène Messier, en faisant allusion aux récentes compressions à TVA, à Radio-Canada et chez Bell.
Optimisme
La conjoncture demeure difficile dans le milieu de la télévision, mais l’AQPM s’attend tout de même à une stabilisation du volume de production cette année. Une baisse semblable à celle enregistrée lors de l’année 2023-2024 n’est pas anticipée.
D’abord parce que le crédit d’impôt offert aux producteurs a été bonifié dans le dernier budget du gouvernement Legault. Mais aussi parce que le Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes, le CRTC, doit présenter dans les prochains mois un nouveau cadre réglementaire qui pourrait forcer les grandes plateformes en ligne à réinvestir une partie de leurs profits dans l’écosystème télévisuel canadien.
La ministre du Patrimoine, Pascale St-Onge, a également réitéré cette semaine sa volonté de porter de 33 % à 40 % la part du financement fédéral destiné à l’audiovisuel aux productions francophones. « Les derniers mois ont été difficiles pour notre industrie. Mais il y avait beaucoup d’optimisme lors de notre congrès. Plus que je l’aurais cru », a constaté Hélène Messier.
Les derniers mois ont été difficiles pour notre industrie. Mais il y avait beaucoup d’optimisme lors de notre congrès. Plus que je l’aurais cru.
HÉLÈNE MESSIER »