Le Devoir

Sur les ailes de la romantasy

Survol d’un phénomène signé Rebecca Yarros, propulsé entre autres par TikTok

- SONIA SARFATI

La romantasy est en quelque sorte l’enfant (il)légitime de la dark romance et de la fantasy. Son rejeton le plus en vue ces derniers mois, Fourth Wing, de Rebecca Yarros, vient de nous arriver en français, publié chez Hugo Roman. Sa suite, Iron Flame, devrait prendre son envol dans la francophon­ie au début de l’été. Dans la liesse, fort probableme­nt : sortie en novembre, la version originale de ce deuxième tome de The Empyrean Saga (qui devait en compter trois, mais qui pourrait maintenant s’étaler sur cinq) a en effet fait l’objet de lancements thématique­s « à la Harry Potter » chez nos voisins du Sud, avec ouverture des boîtes de livres à minuit et fans surexcités.

N’y manquaient que les dragons. Ils sont au coeur de cette série qui se situe au confluent de Game of Thrones (sans la complexité politique), des Harry Potter (parce que les Moldus de Yarros sont à l’école des sorc… oups, des dragonnier­s), de Twilight (pour la relation toxique entre une jeune femme vulnérable et le ténébreux mâle qu’elle parviendra bien sûr à changer), de Hunger Games (la mort guette les « élus » à chaque tournant) et de Fifty Shades of Grey (pour la relation toxique bis, le soft porn et parce que, officielle­ment, le roman est destiné au lectorat adulte).

On ajoute à la recette une traduction française qui s’exclame en « putain ! » et en « bordel ! ». On pimente le tout de réflexions du genre : «[…] je sais qu’en cet instant, il a le pouvoir de me briser. Et je le laisserais faire », « Est-il jaloux ? C’est… étrangemen­t réconforta­nt ». Cela pour raconter comment Violet Sorrengail — physiqueme­nt hypothéqué­e par une maladie causant la friabilité de ses os — se retrouve à l’académie formant les dragonnier­s, guerriers de pointe d’un royaume éternellem­ent en guerre. Là, elle revoit son meilleur ami et rencontre son pire ennemi… dont les rôles changeront très vite, on s’en doute dès leur apparition. Elle découvrira aussi en elle des forces insoupçonn­ées de tous (sauf du lecteur qui a un tant soit peu fréquenté le genre). Le tout se terminant sur une finale qui mettra en appétit ceux qui ne sont pas encore rassasiés.

À l’arrivée, un mégasuccès. Si le décollage s’avère plus lent au Québec (cette semaine, respective­ment 12e et 15e positions aux palmarès RenaudBray et Les Libraires), sa version originale, lancée en mai 2023, squatte le palmarès du New York Times depuis 49 semaines (dont 13 au sommet). Sur le site Goodreads, elle fait l’objet de plus de 200 000 critiques et de plus de 1,5 million d’avis — pour une note globale de 4,6 sur 5. Mais c’est sur TikTok, particuliè­rement sur sa puissante sous-section BookTok, que se joue la guerre (désormais gagnée) des chiffres. Les « booktokers » ont été les premiers à s’intéresser au roman. Depuis, #FourthWing et #RebeccaYar­ros cumulent plus d’un milliard de vues. Et ça grossit à la vitesse grand V avec la parution d’Iron Flame.

On ne se demande pas pourquoi Prime Video, en partenaria­t avec la société de production de Michael B. Jordan, Outlier Society, en a acheté les droits d’adaptation. Qui sait, peut-être en tireront-ils quelque chose de meilleur, comme Netflix avec la série Bridgerton de Julia Quinn, mieux ficelée (sur un lit ?) à l’écran que sur la page.

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KATIE MARIE SENIORS Fourth Wing, de Rebecca Yarros, vient de nous arriver en français, publié chez Hugo Roman.
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Fourth Wing Rebecca Yarros, traduit par Karine Forestier, Hugo Roman, Paris, 2024, 616 pages

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