Le Devoir

Une deuxième journée pour le campement à McGill

- FLORENCE MORIN-MARTEL Avec François Carabin et l’Agence France-Presse

Après avoir dormi dans une vingtaine de tentes dressées samedi sur le terrain de l’Université McGill, au centre-ville de Montréal, des étudiants propalesti­niens ont affirmé dimanche être motivés à y rester « tant qu’il le faudra ».

« Nous ne bougerons pas jusqu’à ce que nos demandes soient écoutées. Même s’ils doivent nous expulser par la force », a lancé Maria, membre de l’organisme Solidarity for Palestinia­n Human Rights (SPHR) de McGill. Les campeurs réclament notamment que l’Université McGill « se désengage des entreprise­s qui sont complices de la violence qui se déroule » à Gaza, a-telle expliqué. Des étudiants de l’Université Concordia ont aussi participé à l’organisati­on de l’événement.

Au passage du Devoir sur les lieux, dimanche midi, des manifestan­ts sortaient tout juste de leurs abris de fortune, la mine fatiguée. D’autres s’activaient déjà depuis un moment en transporta­nt de la nourriture et en faisant sécher des matelas, après une nuit pluvieuse.

Au fil de l’après-midi, la foule a lentement pris de l’ampleur avec l’arrivée de gens de tous âges. Plusieurs personnes discutaien­t paisibleme­nt assises en tailleur, pendant que des enfants s’amusaient autour d’eux. Un homme agitait un drapeau palestinie­n au rythme des tambours.

« C’est génial de voir tous ces gens venus nous encourager », a souligné Maria. Les autres campeurs et elle-même ont été influencés par ceux qui, ces derniers jours, ont décidé d’établir des abris sur des terrains d’université­s américaine­s pour protester contre la guerre que mène Israël à Gaza.

La jeune femme a d’ailleurs déploré l’interpella­tion samedi de près de 200 manifestan­ts sur trois campus américains, lors de l’évacuation de leurs campements par les forces de l’ordre. « Nous observons beaucoup de violence policière et de répression aux ÉtatsUnis, mais la façon dont les étudiants tiennent bon est admirable. C’est sans précédent et c’est très inspirant. »

Contactée par Le Devoir au sujet des tentes sur son terrain, l’Université McGill a affirmé que le doyen à la vie étudiante et un représenta­nt du Service de sécurité de l’établissem­ent avaient demandé en vain aux protestata­ires de démonter leurs abris.

« Les membres de la communauté mcgilloise sont autorisés à manifester sur les campus de manière pacifique, pourvu que ces manifestat­ions se tiennent dans le respect de la loi et des politiques et des procédures édictées par l’Université McGill », a-t-elle détaillé.

« Présent sur le site, le Service de sécurité de l’Université McGill est en contact avec le Service de police de la Ville de Montréal », a précisé l’établissem­ent. Au moment où ces lignes étaient écrites, les policiers montréalai­s avaient affirmé au Devoir qu’ils n’avaient pas été appelés à intervenir depuis le début de l’événement.

Des professeur­s aussi de la partie

En plus des citoyens venus livrer des provisions aux campeurs, certains professeur­s étaient présents dimanche pour appuyer leurs étudiants qui manifestai­ent.

Michelle Hartman, qui enseigne la littératur­e arabe à l’Université McGill, a dit se réjouir de voir les jeunes mettre en pratique ce qu’ils apprennent en classe. « Nos cours portent sur les mouvements sociaux, la résistance et ce qui se passe partout sur la planète. Un mouvement comme celui-ci témoigne donc du fait que les étudiants comprennen­t qu’ils font partie du monde. »

Parmi les campeurs montréalai­s, Mohamad, 20 ans, se promenait entre les tentes, café à la main. « Je suis toujours motivé à rester sur les lieux. Je suis Sud-Libanais et je sais ce que les Palestinie­ns vivent», a affirmé l’étudiant qui fréquente l’Université Concordia.

Il a toutefois admis qu’il devrait plutôt être chez lui en ce moment, afin de réviser en prévision d’un examen important mardi. « Mais je peux étudier dans mon abri. Ce n’est pas un problème », a-t-il assuré.

Questionné­e dimanche au sujet du campement sur le campus de McGill, la ministre caquiste de l’Enseigneme­nt supérieur, Pascale Déry, a dit vouloir éviter que la situation « dérape ». « On est en période d’examens. Les étudiants doivent finir leur session au cours des prochains jours », a-t-elle souligné, en marge du dépôt du plan du Groupe d’action pour l’avenir de la langue française.

« Je suis en discussion avec l’établissem­ent de McGill, qui était très proactif hier. Concordia aussi. On a une collaborat­ion très étroite et on va continuer de travailler avec eux », a-telle ajouté, depuis Montréal.

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PHOTOS VALÉRIAN MAZATAUD LE DEVOIR Au passage du Devoir sur les lieux, dimanche midi, des manifestan­ts sortaient tout juste de leurs abris de fortune, la mine fatiguée.

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