Le Devoir

Hommage à un grand petit roi

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Quand on est allé « un peu plus haut, un peu plus loin » autant que lui, on peut dire — sans craindre l’enflure verbale — qu’il était un géant. Jean-Pierre Ferland, c’est l’autobus du show-business à lui tout seul. Avec des duos mémorables, une quantité phénoménal­e de chansons immortelle­s et un amour infini des femmes, certes, mais un amour au moins tout aussi grand de la musique et des mots. Pour notre plus grand bonheur, celui qui avait complèteme­nt raté sa retraite était si terribleme­nt vivant qu’on le croyait pratiqueme­nt éternel. D’où notre incrédulit­é et notre immense peine collective.

La signature Jean-Pierre Ferland, c’est un alliage parfait de chanson française et québécoise, un pont entre des génération­s de chanteurs chansonnie­rs et de chanteurs populaires, et une immense giclée de jaune ensoleillé sur des pans entiers de notre culture. Ce marginal qu’on disait doué pour la paresse et qui chantait « Qu’est-ce que ça peut ben faire que j’vive ma vie toute à l’envers » aura réussi à déposer des souvenirs heureux dans le coeur d’à peu près toutes les génération­s.

Jean-Pierre Ferland, c’est l’art de la chanson bien faite et ciselée, un poète qui savait saisir l’air du temps et qui aura réussi son « transfuge musical » à une période charnière où le Québec rêvait à un grand Oui. Le célèbre (et désormais céleste !) chat du café des artistes aura aimé follement la langue québécoise et aura réussi toute sa vie à dire finement des choses profondes avec un large sourire. Un sourire infini qui ne s’éteindra jamais… Robert Campeau

Le 28 avril 2024

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