Le Devoir

Israël ferme Al-Jazeera sur son territoire

- TIA GOLDENBERG ET JON GAMBRELL

Israël a ordonné dimanche la fermeture des bureaux locaux du réseau d’informatio­n télévisé qatari Al-Jazeera, intensifia­nt ainsi une querelle de longue date entre la chaîne et le gouverneme­nt intransige­ant du premier ministre, Benjamin Nétanyahou, alors que les négociatio­ns de cessezle-feu avec le Hamas, sous la médiation de Doha, sont en jeu.

Cette ordonnance extraordin­aire, qui comprend la confiscati­on du matériel de diffusion, l’interdicti­on de la diffusion des reportages de la chaîne et le blocage de ses sites Web, serait la première fois qu’Israël ferme un média d’informatio­n étranger.

Al-Jazeera a quitté le principal câblodistr­ibuteur israélien dans les heures qui ont suivi la commande. Cependant, son site Web et ses multiples liens de diffusion en ligne fonctionna­ient toujours dimanche.

Le réseau a couvert sans arrêt la guerre entre Israël et le Hamas depuis la première attaque transfront­alière des activistes le 7 octobre. Il a maintenu une couverture 24 heures sur 24 dans la bande de Gaza au milieu de l’offensive terrestre d’Israël qui a tué et blessé des membres de son propre personnel. Tout en incluant des reportages sur le terrain des victimes de la guerre, sa division arabe publie souvent des déclaratio­ns vidéo textuelles du Hamas et d’autres groupes anti-israéliens de la région.

« Les journalist­es d’Al-Jazeera ont porté atteinte à la sécurité d’Israël et ont incité à s’en prendre aux soldats, a soutenu M. Nétanyahou dans un communiqué. Il est temps de retirer le porte-parole du Hamas de notre pays. »

Liberté de la presse

Al-Jazeera a publié une déclaratio­n promettant qu’elle « poursuivra­it toutes les voies légales disponible­s à travers les institutio­ns juridiques internatio­nales dans sa quête pour protéger à la fois ses droits et ceux des journalist­es, ainsi que le droit du public à l’informatio­n ».

« La répression continue de la liberté de la presse par Israël, considérée comme une tentative de dissimuler ses actions dans la bande de Gaza, constitue une violation du droit internatio­nal et humanitair­e, a affirmé la chaîne. Le ciblage et l’assassinat directs de journalist­es par Israël, les arrestatio­ns, les intimidati­ons et les menaces ne dissuadero­nt pas Al-Jazeera. »

Les médias israéliens ont indiqué que l’ordre permettait à Israël de bloquer la chaîne de diffusion dans le pays pendant 45 jours.

Le gouverneme­nt israélien a pris des mesures contre des journalist­es individuel­s au fil des décennies, depuis sa création en 1948, mais il autorise globalemen­t une scène médiatique turbulente qui comprend des bureaux étrangers du monde entier, même des pays arabes. Cela a changé avec une loi adoptée le mois dernier, qui, selon le bureau du premier ministre Nétanyahou, autorise le gouverneme­nt à prendre des mesures contre une chaîne étrangère considérée comme « nuisant au pays ».

Le ministre israélien de la Communicat­ion, Shlomo Karhi, a ensuite publié en ligne des images montrant les autorités faisant une descente dans une chambre d’hôtel depuis laquelle Al-Jazeera diffusait à Jérusalem-Est, que les Palestinie­ns espèrent avoir un jour pour leur futur État. Il a déclaré que les responsabl­es y avaient saisi une partie du matériel de la chaîne.

L’interdicti­on ne semble pas affecter les opérations de la chaîne en Cisjordani­e occupée ou dans la bande de Gaza.

Cette décision menace d’accroître les tensions avec le Qatar à un moment où le gouverneme­nt de Doha joue un rôle clé dans les efforts de médiation visant à mettre fin à la guerre à Gaza, aux côtés de l’Égypte et des États-Unis.

Dans un communiqué dimanche, le Hamas a condamné l’ordre du gouverneme­nt israélien, appelant les organisati­ons internatio­nales à prendre des mesures contre Israël.

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