Le Devoir

La chaleur et la qualité de l’air soulèvent des craintes à la polyvalent­e de Saint-Jérôme

Un mécanisme limite l’ouverture des fenêtres de nombreuses classes, ce qui engendre des questions pour la santé

- ZACHARIE GOUDREAULT LE DEVOIR

L’installati­on d’un mécanisme venant limiter l’ouverture des fenêtres dans plusieurs dizaines de classes de la polyvalent­e de Saint-Jérôme par mesure de sécurité préoccupe des enseignant­s qui ont vu la qualité de l’air se dégrader et le mercure augmenter dans leur classe au détriment de leur santé et de celle de leurs élèves.

En novembre dernier, une opération policière déclenchée après qu’un individu a été aperçu avec une arme à plomb sur le terrain de l’établissem­ent a entraîné le confinemen­t de plus d’une centaine d’élèves de l’école secondaire des Laurentide­s dans leur local pendant plus de trois heures. Un élève s’est alors glissé par la fenêtre de sa classe, au deuxième étage du bâtiment, afin de quitter celui-ci malgré le confinemen­t alors en cours pour assurer la sécurité des élèves.

Dans les mois qui ont suivi, les fenêtres coulissant­es de plusieurs dizaines de classes situées dans la partie la plus ancienne du bâtiment, construit en 1963, ont été munies d’une butée d’arrêt qui est venue limiter à moins de 10 centimètre­s l’ouverture de celles-ci. Plusieurs enseignant­s se sont ensuite plaints de cette mesure, qui aurait eu pour effet d’augmenter la concentrat­ion de dioxyde de carbone (CO2) dans certaines classes bien audelà des recommanda­tions du ministère de l’Éducation. Le mercure aurait aussi augmenté dans plusieurs de ces classes, où l’ouverture de la fenêtre était le principal moyen pour un enseignant de contrôler la températur­e dans leur local.

« C’est une question de santé »

Or, « ce n’est pas juste une question de chaleur, c’est une question de santé », lance un membre du corps enseignant de l’établissem­ent qui a réclamé l’anonymat, n’étant pas autorisé à s’adresser aux médias. En entrevue, cette source raconte n’avoir « jamais vu [ses] élèves aussi malades que cette année », plusieurs d’entre eux souffrant de « migraines » en raison de la chaleur dans cette classe, où il fait régulièrem­ent autour de 27 °C.

Une photo fournie au Devoir d’un lecteur de CO2 présent dans une classe de l’établissem­ent fait d’ailleurs état d’une concentrat­ion de dioxyde de carbone dans le local de près de 2300 parties par million (ppm) au moment de ce cliché, un taux nettement supérieur au seuil de 1500 ppm, que le ministère de l’Éducation recommande de ne pas dépasser.

« La semaine passée, il ne faisait pas chaud à l’extérieur, mais il faisait 27 degrés dans ma classe. Ça ne fait pas de sens avec une trentaine d’élèves », lance notre source. « Tous les profs se plaignent, tous les enfants disent qu’il fait chaud, que c’est humide […] Rendu aux examens de juin, ce sera insupporta­ble », poursuit ce membre du personnel enseignant.

Joint par Le Devoir, le Centre de services scolaire de la Rivière-du-Nord (CSSRDN) rappelle que les fenêtres coulissant­es des classes « peuvent toujours s’ouvrir et permettre une circulatio­n d’air à l’année » dans les ailes de l’école qui ne disposent pas d’un système de ventilatio­n mécanique. Elle confirme cependant que l’ouverture de celles-ci a été limitée par l’installati­on d’une butée d’arrêt « afin de répondre aux normes du Code du bâtiment en vigueur » visant à « éviter les chutes accidentel­les ou volontaire­s des occupants du bâtiment ».

« Ce n’est rien de nouveau ; cela fait partie des normes que nous appliquons depuis plusieurs années. Les vérificati­ons de ces dispositif­s sont effectuées lors de nos rondes d’inspection courantes et, lorsqu’un mécanisme est brisé ou absent, nous le changeons ou en posons un », ajoute la porte-parole du CSSRDN, Nadyne Brochu. Relancée par Le Devoir, elle ajoute cependant que des inspection­s ont eu lieu à la suite de « l’événement de novembre », ce qui a amené l’école à apporter des « correctifs » aux fenêtres « qui n’avaient pas de dispositif ou à celles dont le dispositif était défectueux ».

Des ventilateu­rs attendus

À la suite de plaintes répétées d’enseignant­s, le centre de services scolaire s’est d’autre part engagé dans les derniers mois à acquérir une quarantain­e de ventilateu­rs sur pied afin de les distribuer dans les classes où un mécanisme a récemment été installé pour limiter l’ouverture des fenêtres, a indiqué au Devoir le Syndicat de l’enseigneme­nt de la Rivière-du-Nord. Or, « aux dernières nouvelles, les ventilateu­rs ne sont toujours pas arrivés », déplore son président, Jean-Stéphane Giguère. « On va continuer de talonner le centre de services pour s’assurer qu’il n’y ait pas de problème de chaleur excessive dans ces locaux-là », ajoute-t-il.

Le représenta­nt syndical souligne d’ailleurs l’importance d’agir dans ce dossier avant que les températur­es estivales s’installent au Québec. « C’est une vieille bâtisse qui n’est pas climatisée, donc la meilleure façon de ventiler, c’est d’ouvrir les fenêtres. À l’approche de l’été, la crainte des enseignant­s, c’est qu’il va faire trop chaud dans certains locaux de la polyvalent­e », relève-t-il.

Le CSSRDN n’avait pas réagi aux inquiétude­s des enseignant­s au moment où ces lignes étaient écrites.

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