Une injonction demandée par McGill pour démanteler le campement pro-Palestine
Dans sa procédure, l’Université avertit qu’elle ne peut tolérer « l’occupation non autorisée », alors que des étudiants se trouvent sur le campus depuis le 27 avril
L’Université McGill en a eu assez : elle a déposé vendredi une demande d’injonction urgente pour faire démanteler le campement pro-Palestine installé sur son campus depuis la fin d’avril, a appris Le Devoir.
L’établissement d’enseignement universitaire va demander à la Cour supérieure d’ordonner que soient retirées toutes les tentes, barrières, clôtures et autres structures érigées sur son campus du centre-ville de Montréal, près de la rue Sherbrooke.
Elle veut aussi que la Cour empêche toute forme de camping ou d’occupation du site, ainsi que toute manifestation qui serait en contravention des règles et politiques de l’Université. Le Service de police de la Ville de Montréal (SPVM) doit être autorisé à mettre en oeuvre le jugement qui sera rendu, requiert-elle aussi de la Cour, notant que jusqu’à maintenant, la police a refusé d’intervenir.
Dans sa procédure, dont une copie a été obtenue par Le Devoir, l’Université indique qu’elle respecte la liberté d’expression et d’assemblée pacifique sur sa propriété, même quand des manifestations mettent en avant « des discours inconfortables ou controversés. »
Par contre, avertit McGill, elle ne peut tolérer « l’occupation non autorisée » de sa propriété privée, surtout lorsque celle-ci perturbe la jouissance paisible des lieux par les étudiants et le personnel, et lorsque cela pose un risque pour la sécurité et la santé publique.
Ce campement, qui est une activité non autorisée, affirme-t-elle, diffère de façon significative des manifestations qui ont habituellement lieu sur les terrains de McGill. Il s’agit maintenant d’un « espace fortifié et enraciné » où des gens demeurent jour et nuit. Selon ses dernières observations, il y a désormais 115 tentes et 150 personnes sur les lieux.
En demandant cette injonction, l’Université dit qu’elle veut éviter des préjudices qui pourraient être causés par une escalade des tensions et la détérioration des conditions sur le campus. Elle veut empêcher que son terrain historique ne devienne un « aimant » pour les manifestations et contremanifestations. De plus, McGill veut récupérer l’usage de cette portion de terrain gazonné pour y tenir, comme chaque année, les cérémonies de collation des grades.
De façon générale, les occupants du campement dénoncent les bombardements meurtriers qui ont lieu à Gaza depuis le 7 octobre, et le traitement qu’ils jugent inhumains des Palestiniens coincés dans l’enclave. Ils demandent aussi à McGill de mettre fin à ses investissements touchant les entreprises ayant des intérêts financiers en Israël ou qui fournissent de l’armement militaire à l’État hébreu. Ils soutiennent que leur manifestation est pacifique.
La semaine dernière, deux étudiants avaient aussi déposé une demande d’injonction afin de limiter l’espace où les manifestations pro-Palestine pouvaient se dérouler sur le campus : ils avaient échoué.
Vendredi, l’un des groupes faisant partie du campement, Solidarity for Palestinian Human Rights (SPHRMcGill), a déploré le dépôt de l’injonction : « Cette démarche juridique a été entreprise malgré les efforts continus du campement pour engager des négociations pacifiques avec l’Université », indique le groupe dans une déclaration, en rappelant que le campement s’inscrit dans un mouvement international de solidarité envers les habitants de Gaza. Des campements semblables ont poussé dans de nombreux campus au Canada et aux États-Unis.
« Nous condamnons les actions honteuses de l’Université McGill qui démontrent qu’elle mobilisera la violence policière contre ses propres étudiants et sa communauté pour prioriser le profit et le financement des donateurs. »
De son côté, le recteur de l’Université McGill, Deep Saini, promet que même si une ordonnance est prononcée, les discussions vont se poursuivre « de bonne foi avec les membres de la communauté mcgilloise qui occupent le campement ».
La demande d’injonction doit être présentée lundi au palais de justice de Montréal.