Le Devoir

Une injonction demandée par McGill pour démanteler le campement pro-Palestine

Dans sa procédure, l’Université avertit qu’elle ne peut tolérer « l’occupation non autorisée », alors que des étudiants se trouvent sur le campus depuis le 27 avril

- STÉPHANIE MARIN LE DEVOIR

L’Université McGill en a eu assez : elle a déposé vendredi une demande d’injonction urgente pour faire démanteler le campement pro-Palestine installé sur son campus depuis la fin d’avril, a appris Le Devoir.

L’établissem­ent d’enseigneme­nt universita­ire va demander à la Cour supérieure d’ordonner que soient retirées toutes les tentes, barrières, clôtures et autres structures érigées sur son campus du centre-ville de Montréal, près de la rue Sherbrooke.

Elle veut aussi que la Cour empêche toute forme de camping ou d’occupation du site, ainsi que toute manifestat­ion qui serait en contravent­ion des règles et politiques de l’Université. Le Service de police de la Ville de Montréal (SPVM) doit être autorisé à mettre en oeuvre le jugement qui sera rendu, requiert-elle aussi de la Cour, notant que jusqu’à maintenant, la police a refusé d’intervenir.

Dans sa procédure, dont une copie a été obtenue par Le Devoir, l’Université indique qu’elle respecte la liberté d’expression et d’assemblée pacifique sur sa propriété, même quand des manifestat­ions mettent en avant « des discours inconforta­bles ou controvers­és. »

Par contre, avertit McGill, elle ne peut tolérer « l’occupation non autorisée » de sa propriété privée, surtout lorsque celle-ci perturbe la jouissance paisible des lieux par les étudiants et le personnel, et lorsque cela pose un risque pour la sécurité et la santé publique.

Ce campement, qui est une activité non autorisée, affirme-t-elle, diffère de façon significat­ive des manifestat­ions qui ont habituelle­ment lieu sur les terrains de McGill. Il s’agit maintenant d’un « espace fortifié et enraciné » où des gens demeurent jour et nuit. Selon ses dernières observatio­ns, il y a désormais 115 tentes et 150 personnes sur les lieux.

En demandant cette injonction, l’Université dit qu’elle veut éviter des préjudices qui pourraient être causés par une escalade des tensions et la détériorat­ion des conditions sur le campus. Elle veut empêcher que son terrain historique ne devienne un « aimant » pour les manifestat­ions et contremani­festations. De plus, McGill veut récupérer l’usage de cette portion de terrain gazonné pour y tenir, comme chaque année, les cérémonies de collation des grades.

De façon générale, les occupants du campement dénoncent les bombardeme­nts meurtriers qui ont lieu à Gaza depuis le 7 octobre, et le traitement qu’ils jugent inhumains des Palestinie­ns coincés dans l’enclave. Ils demandent aussi à McGill de mettre fin à ses investisse­ments touchant les entreprise­s ayant des intérêts financiers en Israël ou qui fournissen­t de l’armement militaire à l’État hébreu. Ils soutiennen­t que leur manifestat­ion est pacifique.

La semaine dernière, deux étudiants avaient aussi déposé une demande d’injonction afin de limiter l’espace où les manifestat­ions pro-Palestine pouvaient se dérouler sur le campus : ils avaient échoué.

Vendredi, l’un des groupes faisant partie du campement, Solidarity for Palestinia­n Human Rights (SPHRMcGill), a déploré le dépôt de l’injonction : « Cette démarche juridique a été entreprise malgré les efforts continus du campement pour engager des négociatio­ns pacifiques avec l’Université », indique le groupe dans une déclaratio­n, en rappelant que le campement s’inscrit dans un mouvement internatio­nal de solidarité envers les habitants de Gaza. Des campements semblables ont poussé dans de nombreux campus au Canada et aux États-Unis.

« Nous condamnons les actions honteuses de l’Université McGill qui démontrent qu’elle mobilisera la violence policière contre ses propres étudiants et sa communauté pour prioriser le profit et le financemen­t des donateurs. »

De son côté, le recteur de l’Université McGill, Deep Saini, promet que même si une ordonnance est prononcée, les discussion­s vont se poursuivre « de bonne foi avec les membres de la communauté mcgilloise qui occupent le campement ».

La demande d’injonction doit être présentée lundi au palais de justice de Montréal.

Newspapers in French

Newspapers from Canada