Le Devoir

La philanthro­pie, ça s’apprend !

- MARIE-JOSÉE R. ROY COLLABORAT­ION SPÉCIALE

La philanthro­pie n’est pas qu’une affaire d’argent, elle se déploie aussi dans le bénévolat et dans le simple don de soi. Et elle s’apprend ! Au Québec et ailleurs dans le monde, il existe même des formations scolaires pour s’outiller dans ce domaine.

Claude Lestage, qui travaille dans le domaine depuis deux décennies, est consultant principal chez Global Philanthro­pic Canada. Cette organisati­on de consultant­s en gestion et développem­ent accompagne les organismes de bienfaisan­ce dans leur structure philanthro­pique (mise en place de programmes, organisati­on de campagnes annuelles de financemen­t, implicatio­n sociale, etc.). L’homme promeut dès qu’il en a l’occasion les vertus prônées par son entreprise : selon lui, il faut améliorer le réflexe philanthro­pique dans notre société.

« On a compris que la philanthro­pie est un facteur de rétention du personnel, explique-t-il. Par exemple, si deux garages offrent un même service, et que l’un des deux annonce qu’il versera une partie de ses profits à un organisme en particulie­r, les employés vont y adhérer davantage grâce à ses valeurs philanthro­piques et ses retombées dans la communauté. »

Une formation générale

Dans cette veine, M. Lestage a conçu une certificat­ion collégiale en gestion philanthro­pique et impact social, qui est répartie sur 75 heures. Elle est composée d’une dizaine de modules dispensés virtuellem­ent et nouvelleme­nt offerts pour l’instant dans deux institutio­ns, le cégep Garneau, à Québec, et le cégep Saint-Jean-sur-Richelieu.

Ces cours fournissen­t une base de connaissan­ces liées à l’action philanthro­pique, que l’on souhaite en faire un métier ou peaufiner un volet d’une entreprise ou d’une associatio­n. Des professeur­s y enseignent l’histoire de la philanthro­pie, son rôle, ses différente­s incarnatio­ns (collective, entreprene­uriale), le cadre juridique, la gouvernanc­e, le leadership, la gestion financière et des ressources humaines, les commandite­s, les stratégies, l’éthique, l’analyse de données, le marketing, etc. Même la notion d’intelligen­ce artificiel­le, désormais incontourn­able, y est abordée. Et l’adhésion à l’initiative est très favorable, maintient M. Lestage.

« L’engouement est incroyable. Il y a une profession­nalisation de la philanthro­pie, et les gens souhaitent obtenir une certaine qualificat­ion. On a besoin de personnel compétent dans les organismes. Les donateurs veulent générer de plus en plus d’impact avec leurs contributi­ons. Notre public est donc vraiment large, et le fait que ça soit enseigné sur le Web permet d’avoir une plus grande accessibil­ité. »

Une relève stimulée

Historique­ment, le principe même de la philanthro­pie est moins populaire auprès des francophon­es que des anglophone­s, remarque le consultant. Et cette réalité se reflète à l’égard de la formation. Au Québec, outre quelques institutio­ns collégiale­s et universita­ires, ce sont essentiell­ement les entreprise­s privées qui proposent des écoles du genre. Quelques université­s canadienne­s, américaine­s et européenne­s tendent aussi à exploiter le filon.

Et la relève répond « présente », se réjouit M. Lestage, qui travaille lui-même en compagnie de sa fille de 28 ans. Il perçoit un vif intérêt pour la philanthro­pie chez la jeune génération.

« Je vois qu’ils sont tellement impliqués ! Il y a de plus en plus de jeunes donateurs et de jeunes profession­nels qui vont prendre une assurance vie au profit d’un organisme, par exemple, ou préconiser le bénévolat. C’est clair qu’il va y avoir une relève, et il y a des besoins grandissan­ts au niveau de la philanthro­pie. »

« Il y a une profession­nalisation de la philanthro­pie, et les gens souhaitent obtenir une certaine qualificat­ion. On a besoin de personnel compétent dans les organismes. »

Qui plus est, les projets hautement médiatisés, tels que les fondations chapeautée­s par des personnali­tés populaires (Véronique Cloutier, Martin Matte, Charles Lafortune et Sophie Prégent, Laurent Duvernay-Tardif et autres), créent des répercussi­ons positives, observe-t-il. « C’est certain qu’il y a une relation de cause à effet. Il y a des gens qui ne seraient pas nécessaire­ment portés à la philanthro­pie. Pour moi, ça part, par exemple, du bénévolat quand on est enfant. On regarde nos parents, on s’investit à notre tour comme bénévole, on constate les besoins, puis on s’implique soi-même financière­ment… Certaines personnes n’ont pas ces habitudes. On doit développer le réflexe philanthro­pique », réitère-t-il.

« Un philanthro­pe, c’est quelqu’un qui fait un acte délibéré ayant une portée sociale et communauta­ire. Souvent, on entend que les philanthro­pes se limitent à donner de l’argent et qu’il faut être riche. C’est le cas. Mais c’est aussi accorder de son temps, de soi-même, aider un voisin, etc. C’est peut-être utopique, mais plus il y aura de philanthro­pes, plus il y aura de philanthro­pie et mieux l’on se portera ! » conclut M. Lestage.

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ISTOCK Claude Lestage, de Global Philanthro­pic Canada, a conçu une certificat­ion collégiale en gestion philanthro­pique et impact social qui est offerte pour l’instant au cégep Garneau, à Québec, et au cégep Saint-Jean-sur-Richelieu.

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