Le Devoir

Mesurer les effets du don

- CHARLES-ÉDOUARD CARRIER COLLABORAT­ION SPÉCIALE

« Si vous décidez de soutenir des causes pendant de nombreuses années avec l’intention de faire le bien, il faut avoir confiance que votre “retour sur investisse­ment” sera démontré »

Un don ponctuel de quelques dollars, un don récurrent ou même un don planifié sont motivés par un objectif commun : agir pour améliorer les choses. Et si les choix sont souvent faits en fonction de nos émotions, il ne faut pas perdre de vue les éléments factuels communiqué­s par un organisme ou une fondation afin d’évaluer leur impact : rapports annuels, structure de gouvernanc­e, compositio­n du conseil d’administra­tion, pérennité, etc.

« Un particulie­r a tendance à donner à des causes qui sont directemen­t liées à son expérience de vie — hôpital, école, communauté locale », explique Clarence Epstein, directeur général de la Fondation de la famille Claudine et Stephen Bronfman. « Une fondation comme la nôtre a décidé de donner la priorité à certains secteurs — l’environnem­ent, l’entreprene­uriat, la culture et les services communauta­ires. L’équipe de notre fondation analyse ces écosystème­s afin d’augmenter les chances d’impact. Nous essayons d’être judicieux, innovants et proactifs. »

M. Epstein rappelle que, dans le monde de la philanthro­pie, on accorde beaucoup d’attention à l’analyse de l’impact sur la base d’indicateur­s clés de performanc­e ou de ratios de frais d’administra­tion et, s’il est clair que l’efficacité budgétaire est essentiell­e dans les grandes organisati­ons, elle l’est beaucoup moins lorsqu’il s’agit de soutenir des causes à petite échelle. « Si vous décidez de soutenir des causes pendant de nombreuses années avec l’intention de faire le bien, il faut avoir confiance que votre “retour sur investisse­ment” sera démontré. »

Voir plus loin que le simple don

Quand on veut faire une bonne action et choisir de faire un don, quel qu’il soit, il est intéressan­t de se pencher sur les effets à long terme et sur les ramificati­ons secondaire­s d’une action philanthro­pique, audelà des résultats immédiats.

Josée Darche, directrice générale de la Fondation J.-Louis Lévesque, fait référence à l’effet d’entraîneme­nt, le ripple effect, en philanthro­pie, un concept selon lequel on s’attarde à l’effet cumulatif et en expansion d’une action philanthro­pique ou d’un don sur une communauté ou une cause. « Comme les ondes qui se propagent à la surface de l’eau lorsqu’on jette une pierre, les effets d’une action philanthro­pique peuvent se répandre bien au-delà de son point de départ initial », illustre-t-elle.

Les bienfaits d’un don ou d’une initiative philanthro­pique soigneusem­ent choisie ne se limitent pas seulement à ceux qui en bénéficien­t directemen­t, mais peuvent également toucher d’autres personnes ou aspects de la société de manière indirecte. Elle donne comme exemple un don pour soutenir l’éducation des enfants. « Il peut générer des répercussi­ons positives sur la famille de l’enfant, sur sa communauté et même sur l’ensemble de la société à long terme, en contribuan­t à créer un cycle d’améliorati­on sociale et économique. »

Faire mieux, un don à la fois

En voulant bien faire, mais mieux, on encourage les philanthro­pes à adopter une approche holistique et à envisager les moyens les plus efficaces de maximiser leur contributi­on à un changement positif durable. « Une question pertinente à vous poser lorsque vous envisagez de faire un don, c’est si vous voulez que votre soutien permette de combler les lacunes des services existants ou si vous souhaitez orienter vos fonds vers des institutio­ns qui ne font pas partie du filet social, précise M. Epstein. Quel que soit votre choix, les besoins sont grands. »

Rappelons qu’il existe des différence­s importante­s entre l’acte de faire un don personnel, ce qu’on appelle la philanthro­pie de proximité, et celui de passer par une fondation — dont l’objectif principal est le soutien philanthro­pique. La reddition de comptes, la bienveilla­nce et la rigueur sont quelques-unes de ces différence­s.

« Notre fondation a décidé de soutenir en priorité les institutio­ns et les communauté­s de Montréal. Il s’agit d’une décision personnell­e de la famille Bronfman basée sur ses valeurs et ses ressources. C’est aussi une décision stratégiqu­e, car nous croyons que nous pouvons avoir une action plus concrète si nous agissons au niveau local », précise M. Epstein. D’autres donateurs peuvent privilégie­r des régions différente­s ou des causes d’envergure locale, nationale ou internatio­nale. « Peu importe, il est essentiel de s’informer sur les sujets qui vous intéressen­t et de prendre vos décisions en fonction de ce qui vous tient à coeur », conclut le directeur général.

Les donateurs jouent un rôle beaucoup plus grand que le simple fait de donner une somme sous le coup de l’émotion : c’est une implicatio­n qui est en accord avec les conviction­s et à laquelle on doit réfléchir avec rigueur. « Prenez le temps d’aller voir le site Internet de la fondation, de connaître sa mission, parcourez les rapports annuels, participez aux événements, devenez partenaire de la cause, affirme à son tour Josée Darche. Ceux qui donnent peuvent grandir avec un organisme, voir avancer une cause. Une personne qui donne et qui se rallie à une cause fait partie de la solution. » C’est donc en laissant le coeur et la tête travailler ensemble, dans un souci de maximiser l’impact de son implicatio­n, que l’on pourra envisager un monde meilleur.

 ?? GETTY IMAGES ?? L’effet d’entraîneme­nt, le ripple effect, en philanthro­pie, est un concept selon lequel on s’attarde à l’effet cumulatif et en expansion d’une action philanthro­pique ou d’un don sur une communauté ou une cause.
GETTY IMAGES L’effet d’entraîneme­nt, le ripple effect, en philanthro­pie, est un concept selon lequel on s’attarde à l’effet cumulatif et en expansion d’une action philanthro­pique ou d’un don sur une communauté ou une cause.

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