Pour un grand Montréal inclusif et sans pauvreté
Selon le président et directeur général de la fondation Centraide, Claude Pinard, le futur écoquartier Namur-Hippodrome est la preuve de l’efficience de la philanthropie pour rassembler, mobiliser et faire passer la société civile à l’action afin de parti
Le 19 avril dernier, la Ville de Montréal a dévoilé son plan directeur pour un quartier carboneutre dans le quartier Namur-Hippodrome. Les études pour développer ce secteur ont été menées par le Groupe d’accélération pour l’optimisation du projet de l’Hippodrome (GALOPH), composé de représentants de la société civile rassemblés au départ grâce au travail et à la persévérance de la fondation Centraide. En plus d’un réseau de transport collectif, de nouveaux espaces publics et d’équipements divers, la Ville a annoncé la création de 20 000 nouveaux logements, dont la moitié à l’abri de la spéculation. Parmi eux, 4800 logements sociaux ou communautaires sont prévus, dont 60 % seront dotés de trois ou quatre chambres.
Une philanthropie « par, pour et avec »
En arrivant à Centraide du Grand Montréal et après avoir pris conscience de la crise du logement, Claude Pinard a décidé qu’il allait faire de l’accès au logement abordable son cheval de bataille.
Après avoir participé à l’étude ayant mené au rapport Signes vitaux du Grand Montréal en 2023 avec la Fondation du Grand Montréal (FGM), sur la situation du logement dans l’agglomération de Montréal, il a compris que pour agir, « il fallait changer le modèle » et entamer une « collaboration radicale ». Selon lui, il était nécessaire d’adopter une nouvelle approche de la philanthropie « par, pour et avec », plus axée sur le communautaire. « Centraide est le deuxième investisseur sociocommunautaire, après le gouvernement, sur l’île de Montréal, affirme-t-il. Cela nous donnait une certaine crédibilité au niveau du monde des affaires et du communautaire. »
C’est ainsi qu’il a participé à la création de GALOPH, un groupe de travail composé d’une quinzaine de partenaires experts dans leur domaine, issus du milieu des affaires, de l’immobilier résidentiel, du financement privé et institutionnel et du milieu communautaire, entre autres. Parmi eux, on retrouve notamment l’urbaniste Clément Demers, qui a participé au développement du Quartier des spectacles ou encore Laurence Vincent, présidente de Prével et du comité Affaires métropolitaines et urbaines de la Chambre de commerce du Montréal métropolitain. Il explique qu’au cours du processus, les intérêts des entreprises ou des groupes que représentaient les participants ne devaient pas entrer en jeu. « Les seuls intérêts qui comptent, ce sont les personnes qu’on essaie de loger, soutient-il. Ce qui fait en sorte que lorsque tu rentres en réunion, tu laisses le chapeau de ce que tu représentes de côté pour te mettre au service de la société. »
Le GALOPH est coprésidé par le président et chef de la direction de Claridge, Pierre Boivin. « Claude Pinard est venu me voir et on a formé un comité représentant toutes les sphères de la société civile et publique », indique-t-il. Ensemble, ils ont créé six sous-groupes qui ont notamment travaillé en lien avec le communautaire, sur les dossiers de la mobilité, de l’environnement, des infrastructures et de la construction.
« On ne voulait pas arriver avec un plan pour ensuite aller chercher l’acceptabilité sociale, explique M. Boivin. Il fallait travailler absolument main dans la main avec les groupes communautaires. »
Il précise que plus de cent bénévoles ont participé au projet et que plusieurs entreprises ont même réduit leurs taux habituels de 50 % pour effectuer leurs travaux. Cela a permis de trouver des solutions concrètes en quelques mois bien que leur budget s’élevait seulement à 500 000 $.
« [Les groupes communautaires] nous ont dit qu’ensemble, ils ont progressé vers plus de solutions concrètes en huit mois qu’ils ne l’avaient fait dans les dix dernières années », confie-t-il.
Pour que le processus aboutisse, affirme le coprésident du GALOPH, il était nécessaire que tout le monde soit « passionné par les possibilités du projet et s’engage ».
« En philanthropie, c’est une chose de faire un chèque, c’en est une autre de s’engager et de donner du temps précieux, constate M. Boivin. Le don de soi est aussi important que le don financier. »
Un modèle prometteur
Montréal, Ottawa et Québec ont chacun annoncé le 19 avril un investissement de 2 millions de dollars dans ce projet. Une somme qui permettra notamment de construire les infrastructures municipales qui n’existent pas encore sur le site et qui pourraient coûter 1,4 milliard de dollars.
« En philanthropie, c’est une chose de faire un chèque, c’en est une autre de s’engager et de donner du temps précieux. Le don de soi est aussi important que le don financier. »
« Ce budget va nous permettre de faire les études détaillées pour optimiser les coûts, se réjouit Pierre Boivin. C’est quand même un projet d’une très grande envergure. »
Il affirme que ce nouveau modèle est très intéressant pour les différents ordres de gouvernement, qui sont tous concernés par la crise du logement : « [Ce genre de collaboration] est unique au Canada. »
Le président de Claridge espère que cela inspirera d’autres projets à Montréal, comme dans le secteur du bassin Peel, où des projets de logements sociaux et abordables ont été annoncés le mois dernier.
« On a montré que notre superpouvoir, c’est vraiment de rassembler et d’agir pour un grand Montréal inclusif et sans pauvreté », se réjouit Claude Pinard.