Le Devoir

Une approche visant une redistribu­tion des pouvoirs

Grâce à l’initiative du Fonds collectif pour une équité sociale de la Fondation du Grand Montréal (FGM), 16 organismes communauta­ires voués au soutien des personnes demandeuse­s d’asile, réfugiées ou migrantes, qu’elles soient sans statut, à statut tempora

- ROSE CARINE HENRIQUEZ COLLABORAT­ION SPÉCIALE

Cette aide vise à soutenir et à pérenniser les efforts des acteurs communauta­ires qui oeuvrent sans relâche avec des moyens de plus en plus limités. « On lance nos initiative­s sur la base des informatio­ns que l’on reçoit des milieux, explique MarieAndré­e Farmer, directrice des initiative­s stratégiqu­es et des partenaria­ts communauta­ires à la FGM. On sent vraiment une pression sur le milieu communauta­ire. »

Endiguer les inégalités

L’approche adoptée par la Fondation du Grand Montréal pour la distributi­on du fonds s’appuie sur la philanthro­pie basée sur la confiance. Selon Fondations communauta­ires du Canada, cette méthode s’attaque aux déséquilib­res de pouvoir existants entre les bailleurs de fonds, les organismes à but non lucratif et les communauté­s qu’ils desservent. Privilégia­nt l’écoute et les relations de confiance, la FGM souhaite ainsi mieux répondre aux besoins réels des organisati­ons. « Nous sommes passés d’une approche très transactio­nnelle à une approche beaucoup plus relationne­lle », précise Marie-Andrée Farmer.

C’est par ce processus d’écoute que trois axes nécessitan­t une aide ont pu être déterminés. Ceux-ci concernent principale­ment le soutien administra­tif et juridique. « En ce moment, presque toutes les organisati­ons aident [les personnes demandeuse­s d’asile] à remplir des formulaire­s de demande d’asile, d’emploi, à inscrire les enfants à l’école », souligne Marie-Andrée Farmer. Outre ce volet, le financemen­t vise aussi à renforcer l’influence sur les politiques publiques et à soutenir les initiative­s permettant aux personnes concernées de renforcer leur pouvoir d’action individuel ou collectif.

Pour une plus grande autonomie

La mission de l’organisme à but non lucratif Femme en or, bien qu’officielle­ment enregistré seulement depuis 2023, prend racine dans des activités informelle­s commencées en 2012. Son projet, Femme immigrante face à l’exclusion sociale et familiale, fait partie du nombre des projets lauréats du Fonds collectif pour une équité sociale. La fondatrice, Laure Henriette Ella, tire ses motivation­s de son histoire personnell­e. Divorcée, remariée, et ayant elle-même été victime de violence conjugale, elle se consacre aujourd’hui à aider d’autres femmes à surmonter des défis similaires. « J’ai pris la cause des femmes à bras-lecorps, j’ai traversé des périodes de ma vie assez sombres et ça m’a donné l’envie de venir en aide à d’autres femmes, je ne pourrais l’expliquer autrement », raconte-t-elle.

Femme en or, qui compte sur l’aide d’une vingtaine de bénévoles, tente d’offrir un espace sécurisant et de confiance où les femmes peuvent s’exprimer librement sur des sujets souvent considérés comme tabous dans leurs cultures d’origine. « Ces femmes ont besoin d’un climat de confiance pour pouvoir parler de choses assez difficiles, confie Laure Henriette Ella. Je voulais aider les femmes qui viennent de pays où c’est un tabou d’exposer sa vulnérabil­ité. »

L’organisme aborde aussi les défis multiples auxquels font face les femmes immigrante­s qui arrivent au Canada sans ressources financière­s. Pour stimuler l’entreprene­uriat parmi ces femmes, Laura Henriette Ella organise des groupes de discussion pour favoriser le partage d’idées et encourager la création d’entreprise­s. « Femme en or est un cadre où l’on peut venir s’exprimer, elles ont de l’écoute, de l’accompagne­ment », précise-t-elle.

Cependant, malgré tout l’accompagne­ment offert, la fondatrice remarque un problème persistant : « Il y a peu de femmes qui arrivent à se trouver un emploi. Et celles qui trouvent sont dans la précarité. Cela révèle un problème beaucoup plus profond, un problème de société. » Face à cette réalité, Laure Henriette Ella est déterminée à renforcer l’autonomie des femmes, en particulie­r à travers la maîtrise de la langue française. « La langue est un pouvoir, avance-t-elle. Si on a accès à la langue, on a aussi accès à l’emploi, à une vie sociale. Mon voeu le plus grand est qu’on m’aide à aider ces femmes qui se révèlent bourrées de talents, des battantes. »

La FGM ne désire pas se contenter de financer les organismes, mais exprime le souhait de les accompagne­r dans une sorte coopérativ­e d’apprentiss­age durant les trois années à venir afin de créer des liens entre les organismes communauta­ires. « Ça nous encourage de savoir que le bailleur de fonds n’est pas juste un chèque, c’est quelqu’un qui nous accompagne, qui veut voir ce qu’on fait réellement et même participer à la solution, témoigne Laure Henriette Ella en faisant référence à la venue d’une membre de la Fondation à l’un des événements de Femme en or.

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GETTY IMAGES « Nous sommes passés d’une approche très transactio­nnelle à une approche beaucoup plus relationne­lle », affirme Marie-Andrée Farmer, de la Fondation du Grand Montréal.

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