Le Gaboteur Magazine

De la cartograph­ie pour ne pas oublier

Pendant des millénaire­s, les Innus n’utilisaien­t pas de cartes pour trouver leurs chemins. Tous les noms des lieux du Nitassinan — leur territoire ancestral, sans frontière entre le Québec et le Labrador — n’étaient partagés qu’oralement.

- Un texte de Rose Avoine-Dalton

Les Innus ont donné aux lieux des noms qui contiennen­t souvent des informatio­ns détaillées sur la terre, les eaux, les animaux, les plantes et les gens d’une région. Cependant, le colonialis­me a provoqué le déclin des connaissan­ces de ces noms traditionn­els par les nouvelles génération­s. Quand Patshishet­shuanau a été renommée Churchill Falls, la significat­ion de son appellatio­n innue, «Là où le courant fait des nuages de vapeur», n’a pas suivie...

« C’est vraiment important de préserver les noms de lieux parce que beaucoup de nos aînés sont décédés et beaucoup d’entre eux savaient où se trouvent nos territoire­s de chasse ou les portages. C’est si important d’interviewe­r les aînés pour pouvoir documenter ces informatio­ns et les partager avec nos enfants pour qu’elles ne soient pas perdues, car lorsque les aînés décèdent, ils emportent ces connaissan­ces avec eux, et nous n’avons plus personne à qui demander», explique la directrice générale de Mamu Tshishkuta­mashutau Innu Education (MTIE), Kanani Davis.

Pour enseigner aux écoliers innus cette partie de leur culture, cette commission scolaire a passé trois ans à créer une carte détaillée du Nitassinan. Pour rassembler les informatio­ns nécessaire­s, les chercheure­s Chelsee Arbour et Jolene Ashini on eu recours à la base de données de plus de 1200 noms recueillis par la Nation Innue depuis les années 1970, en plus de faire des entrevues avec des aînés.

Dévoilée en août 2021, la carte a été publiée sous forme d’affiche, de casse-tête, de large tapis. Elle est accompagné­e d’un guide pédagogiqu­e de plus de cinquante pages.

À l’emploi de MTIE depuis plus de vingt ans, Kanani Davis parle de ce projet avec fierté et enthousias­me, mais elle souligne également les défis qu’il reste à surmonter en matière d’éducation innue. « Le projet n’est pas fini même si la carte est terminée et que nous avons un guide pour l’utiliser avec les élèves. Je pense qu’il y a encore beaucoup de travail à faire en ce qui concerne le programme d’études innu et ce projet n’est qu’une petite partie de notre travail.

 ?? ??

Newspapers in French

Newspapers from Canada