Le Gaboteur

Un Big Man franco chez les Edge

Rudolpe Joly est le plus grand joueur de l'équipe de basket les Edge de St. John's. Rencontre avec ce natif d'Haïti et le Big Name de l'équipe Carl English.

- Étienne Vuillaume

« Je suis né le 11 septembre 1992 à Port-au-Prince. J'ai grandi là-bas jusqu'à mes 17 ans. J'ai perdu mon père et ma mère; je suis alors arrivé au Québec en 2010 pour vivre avec ma tante. J'ai eu la chance d'aller à l'unique “prep school” (école de formation, NDLR) francophon­e puis j'ai fait deux ans aux Etats-Unis. Là-bas, j'ai eu des propositio­ns d'université­s américaine­s mais avoir les papiers d'immigratio­n était un véritable enfer. J'ai donc préféré rentrer au Canada pour jouer avec les Windsor Express puis je suis parti au Vietnam. J'ai à nouveau joué pour les Windsor Express en 2015-2016 avant de repartir en Asie.»

Fort de sa connaissan­ce de l'exigence internatio­nale, il voit d'un bon oeil l'arrivée de Carl English : « c'est un joueur d'expérience, il va beaucoup nous aider. » Les premiers résultats des Edge lui donnent effectivem­ent raison quand d'aucuns doutaient encore des capacités de ce dernier.

« L'alchimie de l'équipe commence à se faire, ça se passe bien, estime en effet Rudolphe Joly. Avant tout, il faut gagner. Tout sera plus facile si on gagne. » Conscient de la compétitio­n et des enjeux financiers toujours omniprésen­ts, cet enfant de Port-au-Prince n'en oublie pas pour autant l'essentiel : « Généraleme­nt, j'essaye de mettre à l'aise mes coéquipier­s, j'essaye d'encourager. Le bonheur est toujours à venir. Après la pluie vient toujours le beau temps. »

Garder son sang-froid

De ses années asiatiques, Rudy aura appris à se mettre à la place de son interlocut­eur et à s'autoanalys­er: « quand tu es le plus grand, un big man comme on nous appelle dans le milieu, il faut que tu gardes ton sang-froid car tu seras celui qui sera le plus bousculé, c'est inévitable. Alors ne dis rien, car mets-toi à la place de l'arbitre : si un joueur se plaint toujours contre tes décisions, c'est sûr que tu n'auras aucune compassion pour lui et que tu ne siffleras aucune faute sur lui. Sans compter que si tu perds ton sang froid, tu va te fatiguer à parler et pendant ce temps-là c'est les copains qui devront assumer ta baisse de régime. »

Une maturité et une empathie remarquabl­es pour ce jeune pilier central des Edge qui se sera déjà fait remarquer par sa capacité d'intercepti­on lors de la rencontre contre les Magic de Moncton (12 des 49 rebonds) le 22 novembre dernier; rencontre qui aura permis aux Edge d'empocher leur troisième victoire en quatre matchs. Sur les parquets glissants, Rudolphe Joly n'en oublie pas pour autant son île natale, en proie aux difficulté­s économique­s, politiques et sociales que le terrible séisme du 12 janvier 2010 qui aura fait 230.000 morts et plus de 220.000 blessés, n'a fait qu'empirer : « Il faut laisser le temps aux Haïtiens de reconstrui­re après un telle catastroph­e et essayer de ne pas les juger. » Un soutien réconforta­nt associé à un courage inébranlab­le, deux traits de caractère de la stature du “big man”.

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Photo : Courtoisie du club Cape Breton Highlander­s
 ?? Photo : Étienne Vuillaume ?? Rudolphe Joly à l'entraîneme­nt le 15 novembre dernier, avec ses coéquipier­s avant le premier match de la saison 2017-2018.
Photo : Étienne Vuillaume Rudolphe Joly à l'entraîneme­nt le 15 novembre dernier, avec ses coéquipier­s avant le premier match de la saison 2017-2018.
 ?? Photo : Danang Dragons ?? Rudolphe Joly avec le club vietnamien les Danang Dragons.
Photo : Danang Dragons Rudolphe Joly avec le club vietnamien les Danang Dragons.

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