La bonne cause des sirènes barbues
Que l’on se le dise: Carl English n’a rien à voir avec Carl Lewis. La dernière recrue des Edge, présenté à la presse le 15 novembre dernier tient bien plus de Barack Obama que du décuple recordman mondial du 100 m: même flegme, même stature, même sourire
« C'est clair que nous allons aller dans les écoles, dans les hôpitaux, etc. Nous allons participer à beaucoup d'événements. Cette équipe doit devenir celle de tout Terre-Neuve et du Labrador », dit Carl English. Car l'ex-joueur de l'AEK Athens, né à St. John's le 2 février 1981 a aussi pleinement conscience « de revenir jouer à la maison. C'est un grand honneur. L'Europe, c'était complètement différent : tous les soirs, on jouait devant 15.000 supporters. Ici, je vais jouer devant mes enfants, les amis de mes enfants. »
Le défi que se fixe cet orphelin de père et mère à l'âge de 5 ans est donc double : « imprimer [sa] marque à cette équipe » et « montrer aux jeunes qu'être basketteur pro, oui c'est possible », même si « les gens n'ont pas forcément conscience de ce que c'est aujourd'hui d'être joueur pro : il y a 5 ans je pouvais faire ce que je voulais. Mais l'an passé, j'avais une proposition pour aller jouer en France. Mon agent me disait que c'était bien payé, moi je lui disais que j'avais besoin de temps pour réfléchir. Il m'a dit : « t'as une heure ». J'ai raccroché, parlé à ma femme, je continuais à cogiter, et puis là il me rappelle. Je lui dis, « encore 5 mn s'il te plaît ». Deux minutes après je reçois un texto : « too late, job's gone. C'est comme vous mettre un pistolet sur la tempe. »
Et cet habitué des terrains d'Espagne, des États-Unis, de Croatie, de Grèce mais aussi des sélections nationales pour le Canada depuis l'an 2000 le sait bien: sur le terrain aussi ce sera sans pitié. Il est attendu. « Je suis nerveux bien sûr, je suis un vétéran; j'ai 36 ans. D'un autre côté je crois qu'il y a encore de l'intelligence dans mon jeu, je suis en pleine forme, je shoote encore très bien. J'ai confiance. »
Un tour de force
Cet enfant de la baie de Plaisance, où il a grandi et lancé ses premiers ballons. n'en oublie pas pour autant le coup de force d'avoir mis sur pied une équipe de basket-ball à Terre-Neuve : « l'équipe a été construite en deux semaines. Il faut tirer un coup de chapeau au coach (Jeff Dunlap, NDLR). Cela va prendre du temps d'être compétitif : l'équipe que vous vous verrez en février sera bien différente que celle qui a débuté le 18 novembre. »
Après 15 ans de carrière dont six en Espagne, « le plus haut niveau à l'extérieur de la NBA », enfant de la baie de Carl English est donc de retour sur sa terre natale, payé à pratiquer le sport qu'il aime. Il savoure ce moment : « J'ai raté tellement de Noël, d'anniversaires, de naissances… Le temps est venu pour moi de me rapprocher de ma famille. »
Une sérénité qui surprend parfois ses coéquipiers : « Il m'arrive d'écouter de la musique terre-neuvienne dans le vestiaire, et les mecs me disent : « what the
hell is that ? » [p***! qu'est ce que c'est que ce truc! ] Sans doute un signe de son bien-être qui se reflète d'ores et déjà sur le terrain : au 23 novembre, Carl English était le meilleur marqueur avec une moyenne par match de 24 points marqués.
Après avoir remporté trois de leurs cinq premiers matchs à l'extérieur, les Edge disputent une série de quatre matchs à Mile One du 1er au 6 décembre avant de rejouer trois matchs à l'extérieur du 13 au 17 décembre 2017.