Un an après #Moiaussi
À moins d'une bien improbable opposition, deux mesures intéressantes seront introduites dans la législation de Terre-Neuveet-Labrador avant la fin de l'actuelle session parlementaire à la Chambre d'assemblée. Comme cela n'est pas toujours coutume, il est important d'en faire plus que mention dans une brève.
Protection des femmes
La première introduit un changement dans les normes du travail qui permettra aux victimes de violence conjugale de prendre un congé de 10 jours, trois à la charge de l'employeur et sept autres sans solde. Ce répit vise à permettre aux victimes de trouver de l'aide médicale et psychologique, un refuge et éventuellement un nouveau logement.
La seconde mesure ouvre la porte à des poursuites civiles contre les auteurs de diffusion d'images à connotation sexuelle sans le consentement des personnes qui apparaissent sur ces images. Ce type de méfait est connu en anglais comme de la « revenge porn », que nous traduirons librement comme de la vengeance pornographique.
Nous saluons ces mesures qui, sans que ce soit précisé lors de leur annonce, assurent d'abord et avant tout de la protection aux femmes et aux jeunes filles. Car études après études, statistiques après statistiques, ces dernières sont en forte majorité, les victimes de ces actes odieux.
Cette triste réalité était à nouveau confirmée dans une étude rendue publique par Statistique Canada le 8 novembre dernier portant sur les impacts du mouvement #Metoo (#Moiaussi) sur le nombre d'agressions sexuelles signalées à la police et jugées fondées. On y apprend que 95 % des plaignants sont des plaignantes et que 55 % des signalements sont formulés par des jeunes femmes et jeunes filles de moins de 25 ans.
Cette étude récente de Statistique Canada révèle par ailleurs une tendance troublante : le nombre de jeunes hommes de 12 à 17 ans qui sont parmi les auteurs présumés de ces agressions est un hausse. Les chercheurs ont par ailleurs découvert que le nombre d'agressions sexuelles signalées à la police et jugées fondées avait connu une hausse de 24 % au pays dans les trois mois qui ont suivi le lancement du mouvement #Moiaussi, soit entre octobre et décembre 2017, en comparaison de la même période l'année précédente.
Hausse des signalements ici
Terre-Neuve-et-Labrador se retrouve au second rang de ce triste palmarès de la hausse des signalements. Ils sont été de 36 % supérieurs au cours des trois derniers mois de 2017 sur la même période en 2016. Est-ce à dire que le nombre d'agressions a augmenté d'autant? Prudence, disent les auteurs de l'étude. Cette hausse peut simplement signifier que les victimes ont osé parler dans la foulée du mouvement, et également grâce à l'invitation plus médiatisée des autorités policières à accueillir ces plaintes.
Il faut donc lire cette donnée récente sur le taux de signalements plus élevé dans la province comme une bonne nouvelle. Oser dénoncer et aller chercher de l'aide fait partie de la guérison. C'est également le cas pour la violence conjugale et pour la vengeance pornographique.
Dénoncer en français?
Aucune étude ne documente, à notre connaissance, la langue des signalements d'agressions ou des victimes de violence conjugale, ni la possibilité de recevoir des services d'aide en français à Terre-Neuve-et-Labrador.
Cependant, après avoir personnellement composé le 911 pour faire part de mon inquiétude sur l'état d'un ami francophone, le personnel de ce service d'urgence a dans les secondes qui ont suivi mes explications, transféré mon appel à un policier s'exprimant parfaitement en français.
Leçon : il ne faut pas hésiter à chercher de l'aide et à le faire en français.