Le Gaboteur

Pensionnat­s autochtone­s: comment s’éduquer davantage?

- Inès Lombardo Pour en savoir plus sur l’histoire des pensionnat­s autochtone­s: Livres jeunesse Films Appels à l’action 71 à 76: Enfants disparus et renseignem­ents sur l’inhumation Ressources par des chercheurs autochtone­s: Livres Un travail de documentat­io

Dans la foulée de la terrible découverte des restes de 215 enfants dans un ancien pensionnat autochtone de Kamloops, en Colombie-Britanniqu­e, la semaine dernière, les discours et les hommages se sont multipliés. Le travail d’éducation en vue d’une réconcilia­tion, même s’il a été entrepris dans plusieurs secteurs, s’annonce pour être long et laborieux.

Lors d'un débat exploratoi­re aux Communes le 1er juin, le premier ministre Justin Trudeau a réitéré l'importance de devoir passer à l'action. «Présenter des excuses pour les tragédies du passé ne suffit pas. Cela ne suffit pas pour les enfants qui sont morts, ni pour leur famille, ni pour les survivants et les communauté­s. Ce n'est qu'avec nos actions que nous pouvons choisir une voie meilleure pour l'avenir et ce sera toujours l'objectif du gouverneme­nt.»

Depuis une semaine, hommages, danses, chants et appels à l'action immédiate sont parvenus de tous les coins du pays envers les premiers concernés par l'histoire des pensionnat­s : les membres des Premières Nations, des Métis et des Inuits, notamment de la communauté Tk'emlúps te Secwépemc.

Cette dernière est la communauté d'origine du pensionnat indien de Kamloops, qui a été la plus grande école du système des pensionnat­s du ministère des Affaires indiennes. Les pensionnat­s autochtone­s ont existé pendant 165 ans, le premier ayant ouvert en 1831, en Ontario, et le dernier ayant fermé ses portes en 1996, en Saskatchew­an.

• Article sur les pensionnat­s indiens de l'Encyclopéd­ie canadienne • Guide terminolog­ique des peuples autochtone­s

• Je ne suis pas un numéro, de Jenny Kay Dupuis et Kathy Kacer (Éditions Scholastic).

• Quand on était seuls, de David Alexander Robertson (Éditions des Plaines).

• Quand j'avais huit ans, de Christy Jordan-Fenton et Margaret Pokiak-Fenton (Éditions Scholastic).

• Wapikoni mobile, un projet qui donne la possibilit­é aux jeunes Autochtone­s de créer des films documentai­res. Ce sont, entre autres, des studios ambulants dotés d'équipement­s qui «roulent vers» des communauté­s autochtone­s.

Les partis d'opposition exhortent le gouverneme­nt d'appliquer les appels à l'action 71 à 76, relatifs aux enfants disparus et à l'inhumation, de la Commission de vérité et de réconcilia­tion du Canada (CVR) depuis la découverte des dépouilles. Des appels à multiplier les fouilles comme celles de Kamloops dans les anciens pensionnat­s du pays ont été lancés.

En Ontario, un projet de loi est en cours de développem­ent pour examiner les sites d'anciens pensionnat­s autochtone­s en Ontario à la recherche de sépultures d'enfants autochtone­s.

Selon Catherine Duquette, professeur­e en didactique de l'histoire au Départemen­t des sciences de l'éducation à

l'Université du Québec à Chicoutimi (UQAC), la recherche de sépultures est l'un des moyens de passer à l'action vers la réconcilia­tion. Elle convient que les discours «sont un premier pas, mais il faut se rappeler que les pensionnat­s autochtone­s ont été mis sur pied par les politicien­s canadiens. Les actions doivent donc prendre le pas maintenant».

Les appels à l'action 71 à 76 de la Commission de vérité et de réconcilia­tion demandent entre autres de rendre publics les documents concernant les corps des enfants décédés lorsqu'ils étaient dans les

• Marie Battiste, Decolonizi­ng Education ; nourishing the learning spirit (en anglais)

• James Daschuk, La destructio­n des Indiens des Plaines. Maladies, famines organisées, disparitio­n du mode de vie autochtone. (Traduit de l'anglais)

Articles universita­ires

Six universita­ires autochtone­s partagent leurs réflexions entourant le 150e anniversai­re de la confédérat­ion canadienne', article publié dans Affaires universita­ires

pensionnat­s, de tenir un registre en ligne des cimetières de ces pensionnat­s, informer les familles des lieux de sépultures, protéger les cimetières ou lieux où les enfants ont été inhumés et procéder à la réinhumati­on sur demande des familles dans leur communauté d'origine.

«Pour mes collègues innus, avoir retrouvé les corps est essentiel pour conscienti­ser», illustre Catherine Duquette.

L'une des actions de réconcilia­tion serait de combler un vide béant : rassembler les informatio­ns sur les enfants qui étaient dans les pensionnat­s.

Pour Catherine Duquette, des projets éducatifs de ce type existent au primaire et au secondaire et se déclinent au niveau local. La professeur­e affirme qu'ils sont «relativeme­nt peu connus, mais ils ne sont pas uniques. Il y a de ces projets locaux dans toutes les provinces».

Un partage de culture serait donc une piste de plus pour faire comprendre aux allochtone­s cette partie majeure de l'histoire du Canada, dès le plus jeune âge, selon Catherine Duquette.

«On oublie aussi beaucoup les publicatio­ns de chercheurs autochtone­s, déplore Catherine Duquette. Et les université­s donnent de plus en plus de cours sur le concept de sécurisati­on

Au site de Kamloops, aucune documentat­ion n'a été retrouvée pour connaître l'identité de ces 215 enfants, leur lieu d'origine, qui étaient les membres de leurs familles, la cause de leur décès, etc. Il s'agit d'ailleurs de l'une des ressources clés manquantes, selon l'historien Maurice Guibord, en entrevue à l'émission «Boulevard du pacifique» de Radio-Canada, en Colombie-Britanniqu­e.

«On signale que les dossiers du pensionnat ne mentionnai­ent souvent qu'un nom pour un enfant ou parfois aucun et encore moins le sexe de l'enfant. Plusieurs d'entre eux n'avaient qu'un seul nom que les religieux reconnaiss­aient, soit le nom imposé au moment du baptême précipité», explique-t-il.

culturelle ou sur l'histoire autochtone. Ce qui est sûr, c'est que la documentat­ion et l'éducation historique sont des passages obligés.»

Deux éléments qui pourraient participer au processus de décolonisa­tion.

«Si ce processus n'est pas mené, on considérer­ait comme réel un passé que les Premières Nations réfutent. Eux attendent que l'on rappelle une autre histoire, la leur, et les personnage­s importants qui la constituen­t et qui ne sont pas les mêmes. Il faut toujours remettre en question et déterminer dans quelles mesures les auteurs ont écrit les faits, quels intérêts ils avaient.»

 ??  ?? Crédit: Encyclopéd­ie canadienne
NB: Cette carte, issue du site de L'Encyclopéd­ie canadienne, a été créée à partir de données fournies par le Centre national pour la vérité et la réconcilia­tion et n’inclut donc que les écoles mentionnée­s dans la Convention de règlement relative aux pensionnat­s indiens.
Crédit: Encyclopéd­ie canadienne NB: Cette carte, issue du site de L'Encyclopéd­ie canadienne, a été créée à partir de données fournies par le Centre national pour la vérité et la réconcilia­tion et n’inclut donc que les écoles mentionnée­s dans la Convention de règlement relative aux pensionnat­s indiens.

Newspapers in French

Newspapers from Canada