Le Gaboteur

Port Union, les vestiges d’une histoire syndicale: Suum Cuique – À chacun son dû

- Mouvements sociaux et syndicalis­me terre-neuvien Le journal syndical du FPU Port Union: une ville d’archives Amélie Barsalou Création du Fishermen’s Protective Union (FPU) POUR EN SAVOIR PLUS…

Nichée sur la péninsule de Bonavista, près des macareux, des icebergs et des caves à légumes, il est possible de trouver une petite ville avec une grande histoire. Port Union, fondée en 1916, est la seule ville du Canada à avoir été construite par un syndicat de pêcheurs, le Fishermen’s Protective Union (FPU), dont elle deviendra le siège social par la suite. Elle représente un véritable succès historique sur les plans sociaux, politiques et économique­s en ce qui a trait aux pêcheries à Terre-Neuve. |

Si l'histoire de Port Union remonte au début du 20e siècle, les droits des travailleu­rs étaient déjà une question de longue date à Terre-Neuve-et-Labrador. Les salaires bas et les conditions de travail misérables forçaient en effet ces derniers à se questionne­r sur ce qu'ils vivaient au quotidien. Plusieurs groupes de travailleu­rs formels et informels ont vu le jour dès 1830, où des protestati­ons de pêcheurs et de phoquiers eurent lieu pour dénoncer leurs pitoyables conditions de travail.

Bien que Terre-Neuve fît de la pêche son moteur économique principal, cela

Le but principal du FPU était de court-circuiter le monopole de vente des marchands et de casser le système de crédit lié à ce privilège marchand.

Un objectif de taille, qui nécessitai­t le recours à une masse critique. Le journalism­e a donc joué un rôle majeur pour le syndicat.

Avec la création du journal The Fisherman's Advocate en 1910, ce médium est devenu le moyen de communicat­ion principal du syndicat pour informer le public des activités et des développem­ents de l'union. Le journal, vendu initialeme­nt de façon hebdomadai­re, fut dès juin 1913 publié quotidienn­ement. Il fut l'un des journaux les plus importants de Terre-Neuve au 20e siècle.

À travers ce journal, William Coaker cherchait notamment à éduquer les pêcheurs sur leurs droits. Il voyait le syndicat comme une plateforme de discussion­s et de débats sur le métier qui pourraient ensuite mener à une mobilisati­on collective. ne voulait pas dire pour autant que ceux qui exerçaient ce métier étaient traités avec respect et dignité. Rapidement, les conditions de travail des pêcheurs sont devenues inacceptab­les et, comme un peu partout au sein de l'Empire britanniqu­e au 19e siècle, les syndicats ont fait leur apparition afin d'améliorer ces conditions.

Une des particular­ités du métier de pêcheur? Le travail se faisait généraleme­nt à son compte sur son propre bateau. Ainsi, les travailleu­rs se trouvaient à la merci des marchands, qui avaient le monopole économique des échanges de denrées alimentair­es à l'époque. Il était donc beaucoup plus difficile pour eux de s'organiser collective­ment, en comparaiso­n, par exemple,

Cette plateforme a ensuite conduit à la formation d'un parti politique en 1911, faisant du FPU le premier parti politique du territoire dont les principes étaient fondés sur le syndicalis­me. Coaker n'avait pas l'ambition d'être au pouvoir, mais plutôt d'avoir un poids à la Chambre d'assemblée et donc, de l'influence sur le gouverneme­nt.

À son apogée, le FPU comptait plus de 21 000 membres, ce qui représenta­it alors plus de la moitié des pêcheurs de l'île de Terre-Neuve.

La ville de Port Union fut donc construite dans le but d'être le siège social du FPU et de leur journal. Le choix stratégiqu­e de l'emplacemen­t a été déterminé en fonction de la réciprocit­é géographiq­ue avec les communauté­s qui supportaie­nt le plus le FPU.

En moins de cinq ans, Port Union devint une ville syndicale avec un large port moderne, des constructi­ons navales et une gare. La ville était animée par avec les travailleu­rs des industries des grandes villes qui étaient moins isolés et regroupés sur un même lieu de travail. Ceuxci pouvaient donc se réunir plus facilement pour faire la grève. Dans le domaine des pêcheries à Terre-Neuve, d'autres manières de revendique­r de meilleures conditions de travail ont été choisies.

Au début du 20e siècle, la situation des pêcheurs était devenue d'autant plus difficile en raison, ironiqueme­nt, de saisons de pêche trop fructueuse­s. Plus de prises, donc un surplus de poissons dans les marchés: leur prix chuta considérab­lement, au grand désavantag­e des des activités de ventes et d'exportatio­n, mais aussi par de nombreux travailleu­rs désirant non seulement améliorer leurs conditions de travail, mais aussi répandre le syndicalis­me à travers la colonie. Port Union constitue donc un rare exemple d'une ville intentionn­ellement créée par et pour un syndicat.

Aujourd'hui, le Fisherman's Advocate n'imprime plus, mais la ville dans laquelle il était publié expose ses dernières archives.

Lorsque l'on se promène à Port Union, il est aussitôt possible de remarquer certains très bien distinctif­s de la ville. Des bâtiments en bois rouge bordent encore le port historique: les habitation­s des promeneurs font face au bâtiment du Fisherman's Advocate, également connu sous le nom de The Factory, et la maison verte de William travailleu­rs. Face à cette situation, William Coaker voulut aider les travailleu­rs à avoir de meilleures relations avec les marchands.

Né en 1871 à St. John's, venant lui-même d'une famille d'ouvriers et de pêcheurs, Coaker a d'abord été agriculteu­r, télégraphi­ste, maître de poste et douanier avant de former la FPU.

Voyant les injustices auxquelles faisaient face ses compatriot­es pêcheurs terre-neuviens, Coaker a décidé de travailler avec eux pour protéger leurs droits et leur redonner un pouvoir commercial. Ainsi, Sir William Coaker fonde la FPU en 1908.

Coaker surplombe. - The Bungalow - qui

La valeur patrimonia­le de la ville lui a valu d'être reconnue comme un site historique canadien en 1999. Une visite à pied de la ville est également possible grâce à des panneaux d'interpréta­tion en anglais et en français! - racontant les événements qui ont ponctué l'histoire de Port Union.

Il est aussi possible de visiter l'intérieur du bâtiment de The Factory. On y apprend notamment quel équipement était utilisé pour l'imprimerie grâce aux efforts de restaurati­on de l'usine qui lui ont redonné son cachet d'antan.

Une ville pleine d'histoire(s) qui vaut définitive­ment le détour cet été!

L'écriture de cet article se base notamment sur les informatio­ns historique­s disponible­s sur les sites Internet de la Historic Port Union, de Heritage Newfoundla­nd and Labrador et de Parcs Canada (Annuaire des désignatio­ns patrimonia­les fédérales). les

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Photo: Courtoisie de Kyle Dyke Le centre historique de Port Union.
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Photo: Courtoisie de Kyle Dyke Le siège du sous le nom de The Factory. est également connu

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