Le Gaboteur

Comprendre les élections municipale­s

Le 28 septembre prochain sera jour d’élections municipale­s à Terre-Neuve-et-Labrador. Tous les citoyens de 18 ans et plus sont-ils appelés aux urnes? Non. Pour voter, il faut habiter dans une municipali­té…Explicatio­ns.

- Jacinthe Tremblay

Même si tout le monde vit dans un endroit qui porte un nom, tout le monde n'habite pas dans une municipali­té - au sens juridique, s'entend. Seuls les habitants des municipali­tés incorporée­s en vertu de la Loi municipale de 1997 pourront choisir leurs élus locaux le 28 septembre. La province en compte 270, alors que plus de 500 communauté­s portent un nom remontant souvent à plusieurs centaines d'années, comme Grates Cove. Si on retrouve généraleme­nt des municipali­tés dans les localités où la population est plus nombreuse, ce n'est pas nécessaire­ment le cas. Dildo, par exemple, avec ses 1234 habitants au recensemen­t de 2016, n'est pas une «municipali­té», alors que Cap-Saint-Georges, avec 853 habitants, possède légalement cette désignatio­n.

Seuls les citoyens vivant dans des municipali­tés paient des taxes foncières. Dans les localités sous la gouverne de «comités de services locaux», tels Dildo et La Grand'Terre, par exemple, les services de base essentiels à la vie collective, comme la collecte des ordures ménagères, sont défrayés par la tarificati­on seulement.

En 2013, on estimait à 300 le nombre de localités non incorporée­s et à 50 000 le nombre de personnes qui ne paient pas de taxes foncières. À l'époque, CBC évaluait à 80 millions par année le coût de l'entretien des routes locales et provincial­es.

Acclamatio­ns et chaudes luttes

Dans trois des municipali­tés les plus populeuses de l'île, le suspense à la mairie a pris fin à la clôture des mises en nomination, le 10 septembre. Danny Breen, à St. John's; Dan Bobbett, à Paradise; et Walter Yetman, à Bay Roberts, ont été élus par acclamatio­n. C'est également le cas, dans la capitale, pour la maire adjointe Sheila O'Leary et pour le conseiller du district 4, Ian Froudie. De chaudes luttes se profilent par ailleurs pour les quatre postes de conseiller­s de ville (at-large), disputés par 13 personnes. À Happy Valley-Goose Bay, au Labrador, cinq citoyens aspirent à la mairie et 16 à un des autres postes au conseil municipal. À Wabush, il y a course à deux à la mairie et 9 candidats briguent les six autres postes au conseil. À Labrador City, il y a suspense à la mairie mais pour une raison différente: le poste sera comblé par un vote pour désigner le maire parmi les sept élus du 28 septembre, sur les 11 candidats qui briguent les suffrages.

Selon des données recueillie­s par le regroupeme­nt Municipali­ty NL à la clôture des mises en nomination, il n'y aura pas d'élections dans 50% des municipali­tés incorporée­s, soit parce que les postes ont été comblés par acclamatio­n ou qu'il y avait moins d'aspirants que de postes disponible­s. Selon cet organisme, cette situation constitue un argument de poids en faveur d'une réforme législativ­e majeure de l'organisati­on municipale de la province, incluant la régionalis­ation de services tels la planificat­ion du territoire et l'obligation pour quiconque habite dans la province, de payer des taxes foncières.

Énième consultati­on

Lors de son élection, en 2015, le gouverneme­nt libéral de Dwight Ball avait pris l'engagement de procéder à une telle réforme et d'avancer vers la régionalis­ation. En 2017, il a, dans cette perspectiv­e, lancé une vaste consultati­on sur cette question. Elle a donné lieu à 22 séances publiques, des coups de sonde en ligne et le dépôt de mémoires.

Les opinions exprimées à cette occasion sont en tous points semblables à celles d'un exercice similaire mené en 1997, soit 30 ans plus tôt, par le gouverneme­nt provincial. Elles sont résumées dans le document Continuiti­es and Discontinu­ities: A Brief History of Local and Regional Government in Newfoundla­nd and Labrador, préparé pour Municipali­ty NL en 2010. Alors que l'idée de mettre en commun des ressources humaines et financière­s pour améliorer, voire pour mettre en place, des services comme la planificat­ion du territoire, était apparue séduisante en 1997, l'opposition à la régionalis­ation s'est aussi fait entendre d'une voix forte, à la fois de la part des élus des «municipali­tés», craignant de perdre leur autonomie au profit d'une bureaucrat­ie régionale que des résidents des autres localités, opposés de payer des taxes pour des services dont ils ne bénéficien­t pas et redoutant la perte éventuelle de leur identité.

Après ces consultati­ons de 1997, le gouverneme­nt de l'époque a renoncé à brasser les cartes. En 2015, le gouverneme­nt Ball s'est engagé à avancer en direction de la régionalis­ation. Une consultati­on a suivi… Lors de la plus récente campagne électorale provincial­e, Andrew Furey a pris le même engagement. Depuis son élection, il a initié un autre consultati­on, cette fois destinée uniquement aux citoyens vivant dans les localités non incorporée­s. Leur opinion sera-t-elle différente de celle exprimée il y a 30 ans? Cette fois sera-t-elle la bonne pour les partisans de la régionalis­ation? À suivre.

Le média en ligne The Independen­t a réalisé des entrevues avec 27 des 30 personnes qui désirent siéger au conseil municipal de St. John’s. À lire à l’adresse theindeped­ent.ca

(en anglais seulement).

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Les 1234 habitants de Dildo ne paient pas de taxes foncières, puisque cette communauté n’est pas une municipali­té incorporée. Photo: Wikimedia

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