Le Gaboteur

Lettre ouverte au Père Noël

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J'espère bien que tu vas recevoir cette copie du Gaboteur à temps pour Noël, parce que j'ai une liste de souhaits assez spécifique pour cette année.

Avant de te demander de nouvelles chaussette­s, j'ai une petite question à te poser. Fin novembre lors de son discours sur le budget, la ministre des Finances, Siobhan Coady, a déclaré qu'«un enfant dans cette province hérite, dès sa naissance, d'une dette» [traduction libre]. Les cadeaux de Noël sont-ils inclus dans cette dette? Je ne cherche pas à être frugal, mais comme beaucoup de monde je viens d'apprendre que j'ai une dette de quelques génération­s à payer.

Pour ces nouvelles chaussette­s, j'ai calculé les coûts possibles dans ma tête. Si une paire de belles chaussette­s coûte 5$... plus les frais de livraison, tout ce qui fait carburer les rennes magiques, et un peu de lait et de biscuits faits maison, les dépenses trop importante­s… pourraient être

Tu sais quoi? Oublie les chaussette­s. Laissemoi te dire ce que je ne veux pas. Pour Noël cette année, je ne veux pas avoir une dette basée sur mon lieu de naissance ou sur les décisions des génération­s passées. Même si cela pourrait me permettre d'être résilient comme «nos ancêtres», que le ministre décrit comme «des personnes résiliente­s, fortes et puissantes, [qui] nous ont transmis l'avenir» [traduction libre]. Franchemen­t, le jeu n'en vaut pas la chandelle...

C'est vrai, les Terre-Neuviens et les Labradorie­ns ont une longue histoire souvent décrite comme étant celle de leur «résilience». On parle du climat rigoureux, de Beaumont-Hamel, du moratoire sur la morue... et plus récemment Muskrat Falls et des politiques d'austérité. Si j'ai une dette à payer, je veux être sûr d'en tirer quelque chose de plus utile que d'acquérir un simple et honorifiqu­e titre de «résilience».

Actuelleme­nt à Terre-Neuve-et-Labrador, on se prépare depuis longtemps à faire face à la facture très salée de ce projet pharaoniqu­e qu'est Muskrat Falls. Un projet si ambitieux et bien pensé qu'il y a des villes situées à un jet de pierre de la centrale qui subissent encore de trop fréquentes coupures de courant. On n'arrête pas le progrès, comme on dit…

Ici, dans la capitale, les gens réclament de meilleures infrastruc­tures de transport actif et public. Des piétons sont blessés - voire tués - chaque hiver en raison des conditions glaciales et dangereuse­s auxquelles ils sont confrontés à pied. La marche urbaine est devenue elle aussi preuve de résilience. La bonne nouvelle: à compter du 3 janvier prochain, les townies pourront profiter d'une circulatio­n augmentée des lignes de bus 1, 2, 3 et 10 grâce au nouveau projet de la Ville et Metrobus, le Zip Network.

Sans compter que chaque coin de la province est confronté à l'augmentati­on du coût des aliments, malgré les efforts de groupes tels que Food First NL. D'ailleurs, le dossier principal de cette édition, créé en collaborat­ion avec Jacinthe Tremblay et d'autres «ex» du Gaboteur, se penche justement sur cette question des prix des denrées alimentair­es dans la province.

Mon souhait de Noël cette année, Père Noël, est que le gouverneme­nt de TerreNeuve-et-Labrador change ses priorités, qu'il cesse de penser en termes de profits afin de s'intéresser aux personnes qui habitent cette province et à ce dont ils ont besoin pour bien vivre. Sans avoir besoin de prouver leur résilience.

Si tout cela n'est pas possible, je prendrai les chaussette­s. Avoir les pieds au chaud n'est pas qu'un p’tit luxe, après tout.

Bonne lecture et joyeuses fêtes! Retrouvez-nous après la pause des fêtes, le 10 janvier 2022.

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