Un grand écrivain se cache dans une maison locale
Plusieurs célébrités ont passé du temps à Terre-Neuve pour faire une pause dans leur vie bien remplie. Quelques témoignages racontent que des célébrités telles que Russell Crowe, Rowan Atkinson et Denzel Washington ont acheté des propriétés sur l'île. Parmi eux figure aussi l'écrivain québécois Réjean Ducharme. Cette histoire commence il y a près de soixante ans, elle passa inaperçue jusqu'à maintenant.
Né à Saint-Félix-de-Valois dans Lanaudière, au Québec, l'écrivain Réjean Ducharme fut plein de mystère. Curieusement, il est connu pour sa décision de vivre dans l'anonymat afin d'éviter toute communication avec les médias une fois devenu célébrité.
Lors de la sortie de son premier roman L'Avalée des avalés en 1966, ses parents ont été interviewés par Radio-Canada. C'est suite à cet événement qu'il demande à ses proches de ne plus parler avec les médias. Ainsi commence sa vie cachée.
C'est pour cette raison que l'écrivain québécois s'est ensuite retrouvé à Terre-Neuve.
Toutefois, si les médias faisaient de leur mieux pour capturer un éclair dans une bouteille, ce n'est qu'en 2022 que ses aventures sur le Rocher sont dévoilées dans une collection de ses oeuvres intitulée Quarto de la maison d'édition française Gallimard.
Du charme à Pennywell Road
Vous serez sûrement surpris d'apprendre qu'il loua une chambre sur 16, Pennywell Road en été de 1966, pas loin du centre-ville. Cette maison de trois étages aurait vu l'écrivain achever son roman en milliers de vers et en près de deux cents chapitres, La fille de Christophe Colomb, publié trois ans plus tard en 1969.
En y regardant de plus près, cette maison fut l'endroit parfait pour l'auteur à vivre en toute tranquillité. Pendant ses heures perdues, en dehors du temps passé devant sa machine à écrire, peut-être en admirant la vue sur le port de St. John's depuis le dernier étage de la maison, l'écrivain aurait même pu se retrouver à socialiser autour d'une pinte dans un bar local.
Si l'écrivain est sorti boire un verre en 1966, il est possible qu'il soit tombé sur Babe's, connu maintenant sous le nom de Peter Easton Pub depuis il y a cinquante ans. Ou bien, peut-être qu'il soit allé chez Mrs Liddy's, le plus ancien bar en activité continue à Terre-Neuve-et-Labrador, ouverte depuis 1853.
On peut donc apprécier l'ironie cosmique qui fait que certains veulent commémorer cet auteur dans une maison où il a échappé à la vie de célébrité.
Selon Jean-Marc Lemelin, professeur du français au département des langues modernes de l'Université Memorial qui a partagé la découverte avec Le Gaboteur, la présence de Réjean Ducharme à Terre-Neuve mérite d'être racontée. «Pour un écrivain québécois qui a remporté tous les prix et qui aurait pu avoir des funérailles nationales, je crois que cela mériterait une plaque commémorative sur cette maison», a-t-il affirmé.
La porte tournante d'une maison riche en histoire
Bev Brown, résidente actuelle de 16, Pennywell Road, affirme la nature de la maison, qui va et vient bien avant son arrivée.
Aujourd'hui, la maison appartient à une co-op, ou une coopérative, c'est-à-dire un bien immobilier multifamilial dont chaque personne ayant acheté une portion de l'entreprise détient une portion de l'immeuble. Les résidents possèdent donc une part de la propriété, mais pas son intégralité.
«La co-op a acheté la maison en 1981 ou 1982, quand j'y suis arrivée», explique-t-elle. «Bien que l'entreprise soit petite, il faut en faire partie pour y vivre.»
Depuis que Le Gaboteur lui a révélé le passage de l'auteur dans sa maison, Bev Brown se lance dans des recherches pour en savoir plus sur lui. Une fois les recherches effectuées, les propriétaires pourront soumettre une candidature pour une plaque commémorative à l'organisation Heritage NL.
La Ville de St. John's reste une tapisserie colorée d'histoires tissées ensemble. Quelle que soit la durée du séjour d'une personne dans la capitale, il y a des traces de son histoire à découvrir*
À la recherche de Réjean Ducharme
L'équipage du Gaboteur a fait des appels bilingues sur Facebook avec une photo de Ducharme à l'époque, en demandant aux résidents de la capitale s'ils le reconnaissaient. Trouver quelqu'un qui se souviendrait des années 1960 est peut-être déjà un peu difficile, surtout parce qu'il utilisait des pseudonymes, comme Rock LaPlante.
Mais ne serait-il pas amusant d'en savoir plus sur le passage de Réjean Ducharme dans la province? Certains internautes qui suivent les réseaux sociaux du Gaboteur sont d'accord.
«Il y aurait peut-être moyen de mettre une plaque historique sur la maison pour les francophiles et touristes», peut-on lire dans un des commentaires sur Facebook. «Il est à noter que le temps de séjour de Ducharme à St. John's s'est déroulé à un moment charnière dans la vie de l'auteur. C'est pendant qu'il était à St. John's que la décision a été prise par la maison Gallimard de le publier.»
Si vous avez une piste, n'hésitez pas à nous contacter! (LF)