« LE VOISIN A BEAUCOUP TROP RÉDUIT LA HAUTEUR DE SA HAIE »
« Cela fait 20 ans, écrit M. Gilles M., que j’entretiens la clôture de cèdre qui est sur le terrain de nos voisins, d’une hauteur de plus de 20 pieds et de 100 pieds de longueur ».
« La largeur des branches est de 16 pieds au bas et envahit mon terrain de plus ou moins 6 pieds grâce aux coupes que je fais deux fois par année, sans qu’eux s’en occupent de leur côté », explique notre propriétaire.
« Au mois de juin de l’an dernier, voilà que nos charmants voisins décident de la faire couper en hauteur à plus ou moins 8 pieds, ce qui nous procure une vue différente… »
« Sur les instigations de je ne sais quel conseiller, ils ont fait couper les branches de leur côté au ras des troncs. Selon eux, cela fera repousser les branches, et moins larges. Depuis l’an passé, aucune repousse. Que penser de cela? »
LE DROIT D’UTILISER SON TERRAIN SELON SES DÉSIRS
À la suite de ce résumé des faits, il y a lieu de rappeler qu’un propriétaire est en droit de faire ce qu’il désire sur son terrain, à la condition de respecter les droits d’autrui.
Le Code civil édicte en effet que « la propriété est le droit d’user, de jouir et de disposer librement et complètement d’un bien, sous réserve des limites et des conditions d’exercice fixées par la loi. Elle est susceptible de modalités et de démembrements ».
Il y a lieu de noter que, dans le cas soumis par M. Gilles M., on se trouve en présence d’une haie qui n’est pas mitoyenne et qui appartient exclusivement aux voisins.
TROUBLES DE VOISINAGE
Habituellement, les litiges en matière d’abus de droit ou de troubles de voisinage soumis aux tribunaux sont engendrés par les actes de l’un des propriétaires de terrains contigus, actes qui causeraient des inconvénients anormaux à l’autre propriétaire.
« Aucun droit, peut-on lire dans le Code civil, ne peut être exercé en vue de nuire à autrui ou d’une manière excessive et déraisonnable, allant ainsi à l’encontre des exigences de la bonne foi. »
Cependant, dans ce cas-ci, il serait difficile de prétendre que les voisins auraient agi en vue de nuire à M. M. Il pourrait peut-être vraisemblablement être aussi difficile de démontrer qu’ils auraient exercé leur droit d’entretien de leur haie « d’une manière excessive et déraisonnable ».
QUESTION DE TOLÉRANCE
Il convient de se référer aux dispositions du Code civil selon lesquelles « les voisins doivent accepter les inconvénients normaux du voisinage qui n’excèdent pas les limites de la tolérance qu’ils se doivent, suivant la nature ou la situation de leurs fonds, ou suivant les usages locaux ».
Pourrait-on démontrer que la coupe rabaissant la hauteur de la haie à
8 pieds cause une nuisance pour M. M.? Cela semble loin d’être certain.
COUPE EXCESSIVE D’UNE HAIE
Dans une cause relativement récente, par exemple, le demandeur réclamait 2650 $ de son voisin pour la coupe excessive, faite sans son consentement, d’une partie de la haie de cèdres séparant leurs propriétés respectives.
Dans cette affaire, le tribunal a considéré que le voisin avait commis une faute, mais que le demandeur n’avait pas démontré l’existence d’un préjudice.
Il apparaissait qu’effectivement une partie de la haie avait été taillée, « mais aucune preuve ne permet de conclure que la haie ne pourra retrouver sa hauteur ou son opacité dans le futur », peut-on lire dans le jugement.
La réclamation a donc été rejetée, aucun lien de causalité n’ayant été démontré entre le dommage allégué et la faute commise.
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