Des arbres encombrants
« Les arbres plantés sur le terrain de la copropriété, écrit M. Frédéric H., nous empêchent de jouir d’une vue que nous avions lors de notre achat. »
« En effet, ces arbres plantés là il y a environ dix ans ont évidemment grandi et nous obstruent présentement la vue sur la rivière », explique notre propriétaire.
« Or, le prix du condo à l’achat a été fixé en partie en fonction de ce “privilège” pour lequel nous pensions jouir pendant la durée de notre vie de propriétaires dudit condo. »
« On sait très bien que le règlement municipal interdit de couper un arbre en santé, mais existe-t-il un moyen de faire valoir notre point de vue ou notre droit de jouir de la vue qui nous a incités à acheter à cet endroit? » demande Frédéric H.
SERVITUDE DE VUE ET DE NON-CONSTRUCTION
Il n’est pas aisé de répondre avec exactitude à la question de M. Frédéric H. vu que le « privilège » auquel il fait allusion ne semble pas avoir été protégé dans un écrit par une clause de servitude de vue ou de nonconstruction sur un terrain voisin.
Dans une cause datant d’une dizaine d’années, par exemple, il était question d’un couple qui avait acheté d’un promoteur immobilier un terrain situé non loin du bord d’un lac. À cette époque, il y avait trois lots invendus entre leur terrain et le lac lui-même.
Le couple, M. et Mme Louis B., projetait de se construire une résidence avec vue sur le lac. C’est pourquoi ils avaient fait inclure dans le contrat d’achat une clause établissant la servitude de vue et de non-construction.
VENTE D’UN LOT VOISIN DIX ANS PLUS TARD
Dans ses grandes lignes, elle était ainsi conçue : « L’acquéreur désire conserver une vue parfaite du lac, à partir de son bâtiment à être érigé sur parties des lots x et y. »
« En conséquence, le vendeur constitue par les présentes, sur son immeuble, sur partie de ses terrains une servitude réelle et perpétuelle au profit de l’immeuble de l’acquéreur, prohibant tout genre de bâtiment, construction, ouvrage, plantation ou autre objet pouvant obstruer ou diminuer la vue de l’acquéreur sur le lac. »
Environ dix ans plus tard, un autre couple a acquis du même promoteur immobilier l’un des terrains vacants situés près du lac. Leur acte de vente contenait la clause suivante : « L’acquéreur, ses héritiers et ayants droit s’obligent à respecter la servitude de vue du lac et de non-construction et d’obstruction de vue établie en faveur de la propriété de M. et Mme Louis B. »
Naturellement, les nouveaux propriétaires s’adressèrent à la municipalité pour obtenir un permis de construction et les plans qu’ils produisirent finirent par être approuvés.
INQUIÉTUDE DES PROPRIÉTAIRES
Cela jeta M. et Mme B. dans l’inquiétude, au point que le couple déposa une requête en injonction contre ses nouveaux voisins avant même le début des travaux pour qu’il leur soit ordonné par le tribunal de cesser toute construction et de démolir ce qui aurait été érigé sur leur terrain.
Pour leur part, les défendeurs plaidaient que leur projet de construction ne contrevenait aucunement à la servitude grevant leur terrain. Ils précisaient que la construction projetée n’obstruerait aucunement la vue sur le lac dont jouissait le demandeur à partir de sa résidence.
ABSENCE D’OBSTRUCTION
À la lumière de la preuve particulière faite dans cette affaire, le tribunal ayant même pris la peine de se déplacer sur les lieux, la défense des défendeurs a été accueillie et la requête des demandeurs a été rejetée.
Le tribunal a déclaré que le plan d’implantation de l’immeuble projeté par les défendeurs ne contrevenait pas aux servitudes prévues aux contrats conclus entre le demandeur et le promoteur immobilier.
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