Le Journal de Montreal - Weekend
Mes enfants, mes amours
Prisonniers, paru cette semaine en DVD, glace le sang. Littéralement. Racontée de main de maître par Denis Villeneuve ( Incendies), cette histoire d’un père aux abois (Hugh Jackman) qui kidnappe le ravisseur supposé de sa fille (Paul Dano), convoque le souvenir d’autres films ayant abordé le terrible sujet de l’enlèvement d’enfants. En voici quatre auxquels le mesurer… désavantageusement, forcément.
L’ÉCHANGE
À la dernière minute, Clint Eastwood ( Million Dollar Baby) avait pris le relais de son confrère Ron Howard, qui devait réaliser ce mélodrame d’époque campé à Los Angeles en 1928. Dans une de ses meilleures compositions à ce jour, Angeli- na Jolie joue le rôle d’une mère célibataire, standardiste à la compagnie de téléphone, forcée de tenir tête aux forces policières corrompues de la ville qui refusent de reconnaître que l’enfant qu’ils lui ont restitué n’est pas son fils, disparu cinq mois plus tôt. S’il n’est pas pleinement satisfaisant sur le plan du récit et de la forme, le film est une merveille: équilibre habile entre esthétisme et sobriété, mise en scène très soignée, magnifique photographie fertile en beaux clairs-obscurs, etc.
LA MAISON SOUS LES ARBRES
Cette curiosité de 1971, un peu passée à l’oubli, met en scène Faye Dunaway dans la peau d’une Américaine psychologiquement fragile vivant à Paris avec son mari (Frank Langella) et qui, soupçonnée par la police d’avoir noyé ses deux enfants, retrouve des indices indiquant un enlèvement. Le scénario n’est pas toujours plausible, mais la maîtrise technique de René Clément ( Jeux interdits), le rythme soutenu, le bon climat de mystère, la photographie soignée et l’interprétation très juste font oublier ce bémol.
LES DISPARUES
Cate Blanchett, qu’on attend cette année dans le peloton de tête aux Oscars grâce à sa composition sublime dans Blue Jasmine de Woody Allen, campe dans ce western signé Ron Howard une mère lancée à la recherche de sa fille kidnappée par des Apaches, et qui pour y parvenir obtient l’aide de son père (Tommy Lee Jones), avec qui elle vient de renouer après des années. Bien que respectant les conventions du genre, Howard ne ménage aucun effort pour célébrer le courage et l’ingéniosité de son héroïne, brillamment interprétée par Cate Blanchett, la transformant en une sorte d’icône féministe plongée dans un environnement naturel hostile et un contexte social teinté de machisme.
RANÇON
Ron Howard, encore lui. Le sujet du kidnapping d’enfants semble obséder celui qui, dans la vie, est le père de quatre enfants (dont l’actrice Bryce Dallas Howard). Le PDG prospère d’une compagnie d’aviation (Mel Gibson) voit sa vie transformée en cauchemar le jour où son fils est kidnappé. Au centre de ce thriller policier se trouve une étude de caractère sur un personnage de financier corrompu déchiré entre son instinct de parent protecteur et celui de négociateur intraitable. Curieusement, le scénario réussit à détourner progressivement les tares du protagoniste (son égocentrisme, son machisme, son orgueil) pour en faire les caractéristiques de sa force.