Le Journal de Montreal - Weekend

DES HISTOIRES DE FILLES

Elles s’appelaient Dominique, Marie-Jo, Judith. Puis Patricia, Véronique et Sophie. De vraies copines. Et il y avait aussi quelques gars qui ne laissaient pas leur place, Roch, Coco, Mike, Laurier ou encore le fameux Gerry. Et même si leur quotidien pouva

- Emmanuelle Plante Collaborat­ion spéciale

«Dès le début, on voulait faire une comédie avec des filles célibatair­es. Il n’y en avait pas à l’époque. On voulait mettre en scène des femmes libres, sans attache, qui gagnent leur vie et surtout qui sont de très grandes amies», se souvient Louis Saïa, auteur, créateur et réalisateu­r de la populaire émission Histoires de filles.

«On voyait souvent des personnage­s de femmes en confrontat­ion plutôt qu’en amitié. Sans être des femmes de pouvoir, elles étaient des femmes fortes qui s’épaulaient. Alors, je dirais que cette amitié a été un des points forts qui a fait le succès de l’émission. Ça et aussi le fait de voir des femmes en comédie. Peu de femmes faisaient de l’humour à l’époque.»

Ainsi, Nathalie Mallette, Marie-Chantal Perron, Catherine Lachance et Guylaine Tremblay (saisons 1 à 3), puis Marie-Lise Pilote (à partir de la saison 4) et Pascale Montpetit ont été le cocon de cette folle aventure. «Les filles n’avaient pas nécessaire­ment un profil humoristiq­ue. On a passé des auditions. Je connaissai­s le travail de Guylaine Tremblay, je venais de voir Nathalie Mallette dans une comédie classique au théâtre, raconte Louis Saïa. On a été chanceux. On a trouvé un groupe de filles formidable­s. Aucune n’a cherché à sortir du lot, un danger dans ce genre de projet lorsque les ego prennent le dessus. On a créé une vraie famille d’acteurs. C’est probableme­nt aussi une des clés du succès.»

AMITIÉS IMPORTANTE­S

«Je garde de très bonnes amitiés d’Histoires de filles et pour moi, ça aura été une école de jeu en humour incroyable, note Catherine Lachance, qui interpréta­it Judith. Faire rire est un art, il faut avoir la bonne rythmique. Et nous enregistri­ons devant public, ce qui était formidable. Ça nous gardait éveillés, toujours alertes. Nous avions la chance d’avoir deux blocs de quatre heures pour placer chaque scène, puis les répétition­s avec les caméras avant que le public entre. Nos semaines étaient très organisées. Quand le public entrait, on roulait les scènes dans l’ordre pour que les ré- actions soient réelles et spontanées.»

« Histoires de filles, c’est toute ma trentaine, s’exclame Nathalie Mallette, à qui on a confié le rôle de Dominique, mais qui avoue avoir auditionné d’abord pour Marie-Jo. J’ai un attachemen­t très grand à cette série. C’était une période très dense de nos vies. On a eu nos enfants notamment. Quand j’étais enceinte de Jeanne, il fallait cacher ma bedaine. J’avais toujours un bol de salade, un coussin, quelque chose dans les mains pour me camoufler. Je me sentais si belle, mais il n’était pas question que Dominique tombe enceinte alors j’avais beaucoup de scènes derrière le comptoir ou en grosse robe de chambre.»

«Je garde des souvenirs incroyable­s au plan humain, poursuit-elle. C’était vraiment une famille. Nous continuons d’ailleurs à nous voir. Au niveau du travail, ç’a été formidable pour apprendre la mécanique de l’humour. Et Histoires de filles nous a offert le grand privilège de nous retrouver ensemble chaque semaine pendant dix ans. C’est très rare dans le métier.»

COMME AU THÉÂTRE

Chaque semaine, les comédiens répétaient donc, comme au théâtre, avec un metteur en scène, tâche octroyée aux acteurs Micheline Bernard, puis Stéphane Crête.

«Louis Saïa faisait déjà ça quand il a démarré Radio Enfer, se rappelle Micheline Bernard, qui était de la distributi­on. J’adore la comédie. Quand il m’a offert de venir faire la mise en scène d’Histoires de filles, j’étais un peu intimidée, mais il m’a dit: “Je vais te coacher” et après la première saison, il m’a laissé aller. En tant que réalisateu­r, Louis devait déjà faire la mise en place pour les trois caméras. De mon côté, je pouvais aller plus dans le détail, faire de la direction d’acteurs, être présente pour eux. C’était un grand privilège et la gang était tellement l’fun!»

C’était les belles années de la comédie de situation (sitcom). «Je ne sais pas pourquoi le genre a pratiqueme­nt complèteme­nt disparu. Aux États-Unis, ça tend à revenir, remarque Louis Saïa. The Big Bang Theory, par exemple, n’est pas trop loin des techniques que nous utilisions. Mais il faut une banque d’auteurs pour écrire de la comédie. Il faut pouvoir tester les textes, les retravaill­er. Sur Histoires de filles, nous étions une dizaine d’auteurs et il y en avait toujours un sur le plateau pour apporter des modificati­ons. C’est toujours bon signe quand les technicien­s rient en répétition. Mais si pour une raison quelconque le public ne riait pas, l’auteur devait ajuster des choses rapidement.»

Faire de la comédie, c’est aussi courir le risque de peiner à garder son sérieux. «On a beaucoup ri sur ce plateau-là, confirme Catherine Lachance. Les scènes de groupe, on était plus délinquant. Quand on savait que la caméra n’était pas sur nous, il nous arrivait régulièrem­ent de tenter de faire décrocher les autres par le non-verbal. Je me souviens d’une scène de chalet avec Nathalie Mallette. Nous devions manger des toasts au beurre de pinottes et bananes. Nous étions telle

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