Le Journal de Montreal - Weekend
MARION COTILLARD BRILLE DE TOUS SES FEUX
Marion Cotillard n’est jamais aussi bonne que lorsqu’elle incarne des personnages tragiques. Il suffit de se rappeler De rouille et d’os (2012) et les plus récents Macbeth (2015) et Juste la fin du monde (2016) pour s’en convaincre. Dans Mal de pierres, elle est tout simplement parfaite.
Ce n’est d’ailleurs pas un hasard si elle a déclaré, en entrevue, que ce rôle avait été le plus incandescent de sa carrière. Car Gabrielle (Marion Cotillard), fille de provinciaux bourgeois dans les années 1950 est follement amoureuse du professeur du coin, mais ce dernier ne veut rien entendre. Sa sexualité et sa sensualité embarrassant ses parents, sa mère lui propose un marché: soit elle épouse José (Alex Brendemühl), maçon saisonnier qui a fui le régime franquiste, soit elle la fait enfermer à l’asile.
Elle devient donc, de force, la femme de José tout en lui garantissant qu’ils ne coucheront jamais ensemble, une déclaration sur laquelle elle revient, un soir, le temps de constater qu’elle a bien raison de se refuser à lui. Gabrielle n’est pas que dépressive malgré les soins dont l’entoure constamment José, mari dévoué et aimant, elle souffre également de terribles crampes d’estomac qui sont le «mal de pierres» du titre.
UNE GABRIELLE AUX MULTIPLES DIMENSIONS
Pour tenter de la soigner, José l’envoie en cure dans le meilleur établissement de Suisse, en dépit du fait que Gabrielle ne veut absolument pas aller mieux. Entre deux traitements, elle fait la connaissance d’André (Louis Garrel) dont elle tombe éperdument amoureuse. La suite ne peut et ne doit pas se raconter, sous peine de gâcher le bouleversant cheminement de Gabrielle jusqu’au dénouement.
Tour à tour rebelle, effrontée, soumise, lointaine, brûlante, Marion Cotillard permet à cette Gabrielle écrite par Nicole Garcia et Jacques Fieschi d’après le roman éponyme de Milena Agus de livrer dans ses moindres nuances toute sa dimension tragique. Formidable histoire d’amour et de malheur, Mal de pierres habite durablement le spectateur par la force des sentiments véhiculés et les tourments qui habitent l’héroïne. La mise en scène sobre, précise, poétique et efficace de Nicole Garcia laisse place à toutes les teintes des personnages.
Et si Mal de pierres est une tragédie, il s’agit là d’une belle tragédie, de l’une de celles qui font exploser la force de l’amour.