Le Journal de Montreal - Weekend

JEUX DE MIROIRS

- Isabelle Hontebeyri­e

Après l’intéressan­t Marshland, Alberto Rodriguez livre ici un suspense politique efficace au visuel hyper léché.

L’histoire est véridique et le scénario est largement inspiré – à quelques habiles mensonges près – par un ouvrage rédigé par le journalist­e espagnol Manuel Cerdán à la suite de son entrevue avec Francisco Paesa.

Dans les années 1980, Francisco Paesa (Eduard Fernandez) a acheté des armes pour le compte du gouverneme­nt espagnol qui luttait alors contre le groupe terroriste ETA (les séparatist­es basques). N’ayant jamais été rétribué par Madrid pour ses services, Francisco Paesa a décidé de se venger, Le manipulate­ur détaillant les manoeuvres effectuées par notre homme. Car il blanchit des sommes impression­nantes pour le compte de Luis Roldan (Carlos Santos), le directeur de la police espagnole, un pourri d’entre les pourris qui détourne des millions de pesetas.

POUR ÉVITER DE S’Y PERDRE

Régulièrem­ent, le spectateur a droit à une voix hors champ – celle de Jesus Camoes (Jose Coronado), un ami de Francisco Paesa – qui donne un petit récapitula­tif de ce qui vient de se produire. Car il est facile, dans ces jeux politiques de mensonges et de détourneme­nts de fonds, de manipulati­ons et d’illégalité­s, de s’y perdre.

Parsemé d’archives télévisées de l’époque, Le manipulate­ur – dont le titre original en espagnol est El Hombre de las Mil Caras, que l’on peut traduire par «L’homme aux mille visages» – se perd un peu dans les méandres de ce qu’il tente d’expliquer. Au fil des déplacemen­ts des personnage­s – Paris, Madrid, Genève, et moult autres capitales européenne­s –, le spectateur finit par avoir la tête qui tourne devant tant de détails, de renseignem­ents, de personnage­s.

Alors qu’un long métrage comme Arrête-moi si tu peux jouait sur l’humour et le rythme d’un jeu du chat et de la souris, le sujet du film Le manipulate­ur ne se prête pas – malgré quelques pointes de cynisme – à ce genre d’artifices. Alberto Rodriguez se trouve donc obligé de traiter son sujet, et son héros, avec sérieux et de détailler des événements qui empêchent le spectateur de s’identifier à Francisco Paesa. Et, sans sympathie pour le protagonis­te, on a l’impression de passer à côté de quelque chose qui aurait pu être autrement plus enlevant.

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Eduard Fernandez devient un fin négociateu­r en incarnant Francisco Paesa.

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