Le Journal de Montreal - Weekend
TOUT HOMME EST UNE NUIT
Après avoir remporté le prix Goncourt 2014 avec Pas pleurer, la romancière française Lydie Salvayre signe un roman saisissant qui a presque réussi… à nous faire pleurer.
Ayant appris qu’il souffrait d’un cancer, Anas n’hésitera pas à quitter conjointe et élèves – il est prof de français à Amboise ! – pour réaliser l’un de ses plus vieux rêves : passer quelques mois sous le chaud soleil de Provence.
Recherchant essentiellement la quiétude, il s’installera donc dans un petit village paisible situé non loin de la ville de Barogne, où il doit se rendre chaque semaine pour recevoir les soins susceptibles de l’aider à recouvrer la santé.
Mais très vite, il sera surtout rongé par un tout autre mal : la bêtise humaine. Car dès qu’il mettra les pieds au Café des Sports, le seul endroit du coin pouvant réunir plus de 10 habitants, les hommes qui viennent quotidiennement y écluser pastis, demis et verres de blanc ne le verront pas d’un bon oeil.
Alors qu’ils n’ont même pas daigné lui adresser la parole, Dédé, Émile, Gérard, Étienne et Marcelin, le propriétaire raciste et particulièrement malveillant du café, se demanderont en effet ce qui a bien pu pousser ce célibataire trentenaire au teint un peu trop foncé à s’établir parmi eux.
Et sa simple présence leur permettant enfin d’épicer leurs conversations, ils ne tarderont pas à parler abondamment contre lui. Une situation qui dégénérera à la vitesse grand V, Anas ne pouvant à la fois combattre le cancer et répondre aux attaques d’un groupe de villageois obtus soudé par l’alcool.
Un roman à la fois cinglant et merveilleusement bien écrit qui, en permettant tour à tour à Anas et à la bande du Café des Sports d’exprimer librement leur point de vue, nous donne la chance de mieux comprendre pourquoi, aujourd’hui, il y a encore autant de haine.