Le Journal de Montreal - Weekend
UN GONCOURT QU’ON A ADORÉ
Avec ce magnifique troisième roman, qui a récemment remporté le prix Goncourt, l’écrivain français Nicolas Mathieu signe l’un des grands incontournables de l’année.
À Heillange, un bourg de l’est de la France dont l’usine, maintenant fermée, oblige bien des pères à enchaîner les boulots sans lendemain entre deux Picon-bière, rien ne va plus : alors que l’été 1992 bat son plein, il y a une pénurie de shit et sans pét’, les jeunes du coin s’emmerdent royalement. Pour tromper l’ennui, Anthony, 14 ans, traînera ainsi avec son cousin au bord du lac et en réussissant à se rendre du côté de la « plage des culs-nus », il fera la connaissance de Steph, une petite bourge déjà blasée par la vie pour laquelle il sera rapidement prêt à faire n’importe quoi… comme emprunter en douce la moto de son colérique paternel afin d’assister à une fête ayant lieu le soir même à une vingtaine de kilomètres de là.
VERS UN MONDE MEILLEUR ?
Découpé en quatre parties, cet excellent roman nous plongera ensuite dans la torpeur des étés 1994, 1996 et 1998. Trois étés où on verra progressivement les ados d’Heillange se transformer en adultes soucieux de ne surtout pas suivre les traces de leurs parents qui, à leurs yeux, mènent des existences tellement ternes qu’elles ne valent carrément pas la peine d’être vécues. Trois étés où on verra donc Anthony, Steph, son amie Clem et Hacine, un Marocain issu des bas quartiers, perdre peu à peu leurs belles illusions de jeunesse pour se glisser dans la dure réalité du monde d’aujourd’hui.
En soi, l’histoire est si bien menée qu’on y a été accro dès le premier chapitre. Mais ce qu’on a surtout apprécié, c’est son style. À la fois direct et imagé, il a réussi à nous enchanter dès les premières phrases.