Le Journal de Montreal - Weekend

DOMINIQUE ANÉ L’ATMOSPHÈRE AVANT TOUT

Présenteme­nt en tournée, l’auteur-compositeu­r-interprète français Dominique A – Dominique Ané, de son vrai nom – a déposé son micro pour nous parler de son livre et de ceux des autres.

- KARINE VILDER Collaborat­ion spéciale

D’emblée, on est curieux de savoir ce qui vous a amené à écrire l’autobiogra­phie Ma vie en morceaux ?

Ça a été en partie une commande, et à l’origine, il était question de faire un beau livre pour mettre en selle les textes, avec de petites notices expliquant chaque chanson. Mais chez Flammarion, on m’a plutôt demandé de m’exprimer sur une vingtaine de chansons et de fil en aiguille, je me suis pris au jeu. J’ai ainsi eu du plaisir à revisiter mon parcours de vie avec ces chansons, que j’ai voulu utiliser comme des marqueurs.

De tous ces morceaux de vie, lequel a été pour vous le plus difficile à raconter ?

Aucun n’a été difficile à raconter. Le plus compliqué a surtout été de ne pas trop en dire ! J’ai vraiment dévoilé les dessous de mes chansons et de ce fait, j’ai eu tendance à déballer des choses qui n’engageaien­t pas que moi, mais aussi d’autres personnes. J’ai ainsi dû reprendre intégralem­ent le chapitre Immortels, parce que le texte expliquant ce point névralgiqu­e de mon parcours était trop entaché d’amertume et détonnait avec le reste.

Vous vous rappelez avec quel livre vous avez vraiment commencé à aimer la littératur­e ?

C’est avec Le grand Meaulnes d’Alain-Fournier, le premier livre qui m’ait transporté. J’avais 11-12 ans, et c’est la seule lecture imposée qui ait produit cet effet-là chez moi. Il est resté un livre fondamenta­l pour moi en termes d’atmosphère sur un lit de réalisme. Je l’ai relu il y a quelques mois et le plaisir a été décuplé, car j’y ai relevé des choses que je n’avais pas vues quand j’étais jeune. Il y a une forme d’empathie de l’auteur pour ses personnage­s, et je me sens assez proche de ça.

Y a-t-il un genre que vous avez toujours apprécié plus que les autres ?

Je dirais la littératur­e semi-fictionnel­le. J’aime bien les témoignage­s un peu romancés, j’aime beaucoup quand les gens racontent leur histoire. J’aime aussi une littératur­e un peu atmosphéri­que, une littératur­e un peu intime qui met en scène peu de personnage­s.

Au fil des ans, quels romans ont été pour vous particuliè­rement marquants ?

√ Celui qui n’est pas là de Dominique Fabre, un recueil de nouvelles mettant en scène diverses situations familiales. Le titre m’a attiré, car il sonne un peu comme une chanson. Je l’ai découvert par hasard un jour de pluie.

√ Gioconda de Nikos Kokantzis. Écrit dans les années 1970, il relate l’histoire d’amour de deux adolescent­s dans la Grèce de la Deuxième Guerre mondiale. Le personnage principal est une jeune juive qui va être déportée. C’est un petit livre bouleversa­nt d’une justesse absolue que j’ai recommandé à plein d’amis et tous m’ont dit merci.

√ Vie nouvelle de François Vergne. Alors là, pour le coup, on a un roman très atmosphéri­ste. C’est un huis clos entre un père et sa fille. Tout est très diffus, et on découvre qu’il est question de la mort prématurée de la mère de famille. Un livre émouvant, un modèle de justesse dans l’économie de moyens. Une vraie grâce. Je tends vers ce genre de livres, loin du baroque, du flamboyant. On est dans quelque chose d’assez monochrome où toutes les petites nuances ressortent au centuple.

Et quel est celui que vous vous promettez de lire sous peu ?

On m’a offert Leurs enfants après eux de Nicolas Mathieu, qui est une espèce de chronique se passant dans une vallée avec un fort taux de chômage. On m’en a dit beaucoup de bien*.

Vous pouvez nous parler de votre plus récente découverte ?

Une auteure franco-coréenne, Elisa Shua Dusapin. J’ai beaucoup aimé son deuxième livre, Les billes du Pachinko .Jele préfère même au premier, Hiver à Sokcho, que j’avais aussi beaucoup aimé. Elle a le don de la fin. La fin est un moment splendide et un frisson m’a saisi en lisant son dernier paragraphe. C’est un livre qui est très beau. Ce n’est pas de l’ordre du choc littéraire, mais c’est plein de charme.

Est-ce qu’il y a un livre que vous rêvez un jour de mettre en chanson ?

Souvent, j’ai mis en chanson des livres qui m’ont vraiment marqué, car j’étais dans l’émotion de la lecture. Je ne sais donc pas quel sera le prochain livre qui va me faire cet effet-là.

* Lorsqu’on a interviewé Dominique Ané, Leurs enfants après eux n’avait pas encore remporté le prix Goncourt.

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