Le Journal de Montreal - Weekend

La communauté a répondu

Un important volume de commandes en ligne et une communauté de lecteurs tissés serrés permettent à la librairie L’Euguélionn­e de passer à travers la crise actuelle.

- YVES LECLERC Le Journal de Québec yves.leclerc @quebecorme­dia.com

La libraire Sandrine Bourget-Lapointe croit que la popularité des ventes sur internet est quelque chose qui va rester.

« Nous nous sommes bien tirés d’affaire dans les circonstan­ces. Et c’est grâce à la communauté qu’on a réussi à bâtir. On a fait plus de ventes qu’avant, mais avec des ressources plus limitées », a-t-elle fait remarquer.

Situé sur la rue Beaudry, dans le Village, à Montréal, la librairie L’Euguélionn­e est une coopérativ­e gérée par un collectif de six personnes. La librairie spécialisé­e, qui a vu le jour en décembre 2016, est une des rares librairies féministes qui existe toujours au Canada et même à l’internatio­nal.

Elle se spécialise aussi dans les ouvrages LGBT, antiracist­es et anticoloni­aux.« L’Euguélionn­e est aussi un lieu de rencontres avec des événements littéraire­s et militants. La littératur­e sert à poursuivre la lutte, mais adaptée au goût du jour », a-t-elle indiqué, lors d’un entretien téléphoniq­ue.

Les commandes, depuis la fermeture du commerce, arrivent par le site de la librairie, par leslibrair­es. ca, par courriel, par Facebook, Twitter et Instagram. Les ventes en ligne, qui étaient marginales au quotidien, ont explosé.

« Ça rentre de partout. C’est un autre rythme de travail, mais c’est très intense. C’est dix heures par jour et sept jours sur sept », a fait savoir Sandrine Bourget-Lapointe.

Des huit employés habituelle­ment en poste, trois sont au coeur de l’action en ce moment.

Une employée, adepte de cyclotouri­sme, a proposé de faire les livraisons sur l’île de Montréal.

« Notre clientèle aime beaucoup les initiative­s qui ont pour objectif de réduire les impacts écologique­s. Ça fait partie de leur mode de vie et c’est un peu bad-ass. Le service de livraison est devenu populaire », a indiqué la libraire.

MODE RATTRAPAGE

Sandrine Bourget-Lapointe a constaté, à travers les ventes réalisées, que les gens ont eu envie de faire du rattrapage avec les classiques et les incontourn­ables du féminisme. Le 2e sexe de Simone de Beauvoir, King Kong Theory de Virginie Despentes, Ne suis-je pas une femme ? de

Bell Hooks, Je suis une maudite sauvagesse d’An Antane Kapesh ont été de très bons vendeurs. Tout comme les grosses briques, les sagas et les romans La trajectoir­e des confettis de Marie-Ève Thuot et L’Amie prodigieus­e d’Elena Ferrante.

« Il y a eu aussi une tendance du côté des livres sur la sexualité, le plaisir et la littératur­e érotique. On en a vraiment vendu beaucoup. Les gens ont besoin de réconfort et de se désennuyer », a-t-elle lancé en riant.

La libraire continue de lire, même si les journées sont très chargées. Surtout de la fiction.

« La lecture, c’est comme de la nourriture pour nous. J’ai terminé For Today I

am a Boy de Kim Fu et je pense attaquer, ensuite, le roman souveraini­ste Héroine, un classique de l’écrivaine québécoise Gail Scott. On devait la recevoir à la suite de la réédition de ce livre écrit en 1987 », a-t-elle précisé.

Avec une ouverture des commerces prévue pour lundi, Sandrine Bourget-Lapointe indique que des discussion­s ont lieu presque à tous les jours concernant les mesures qui devront être mises en place et sur le nombre de personnes qui pourront se retrouver en même temps dans la librairie.

« On a hâte de reprendre le conseilcli­ent. Il faut toutefois envisager que les gens se sont habitués aux commandes en ligne et que ça va continuer. On garde ça en tête », a-t-elle laissé tomber.

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Sandrine Bourget-Lapointe
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