Le Journal de Montreal - Weekend

« JE SONGE À LA PRÉCARITÉ DE LA VIE»

L’homme en a vu d’autres. Dès sa plus tendre enfance, sa Lituanie natale a été envahie par les Russes. Ensuite, sa famille et lui ont été déportés dans un camp de travail allemand. Il a connu la faim, la peur et côtoyé la mort. À bientôt 85 ans, Alain Sta

- ÉRICK RÉMY,

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« Dans le temps, on envoyait les gens au front, maintenant, c’est au salon. C’est quand même plus confortabl­e. Les ennemis que j’ai connus portaient des uniformes. On pouvait les tromper et se cacher, mais là on ne peut pas ; la seule façon de déjouer l’ennemi, c’est de rester chez soi », souligne Alain Stanké en souriant.

Après avoir frôlé et déjoué la mort à au moins six reprises au cours de sa vie, celui qui a été témoin des pires horreurs de l’humanité avoue être un peu ébranlé. « Pour la première fois, je me demande comment je vais mourir. Malgré tout ce que j’ai vécu, je ne m’étais jamais posé la question. Pourtant, j’ai été placé dans un peloton d’exécution et j’ai failli avoir la gorge tranchée. Je songe à la précarité de la vie. La COVID-19, comme son nom l’indique, crée un vide immense. Beaucoup de gens, surtout âgés, ont fini leurs jours sans leurs proches à leurs côtés. »

Heureuseme­nt, il vit le confinemen­t avec Josette, sa conjointe depuis presque 50 ans. Carl, l’un de ses cinq petits-enfants, fait leur épicerie, qu’il dépose à leur porte. Père de quatre enfants – trois fils et une fille –, Alain anticipe avec appréhensi­on le jour où ils pourront se revoir autrement qu’à travers un écran.

« On ne pense qu’au moment où le confinemen­t sera fini, mais on imagine mal la suite des choses. Je ne sais pas comment je réagirai quand je verrai mes enfants et petits-enfants et que je ne pourrai pas les prendre dans mes bras. Cette pensée m’est douloureus­e. »

Fort de ses expérience­s de vie, l’octogénair­e à l’esprit vif réussit à relativise­r les choses. « On ne sait pas vraiment ce qu’est le bonheur si l’on n’a pas connu le malheur. La nuit amène le jour. Jusqu’à présent, on était gâtés et on n’avait pas à penser à ces choses-là, mais on réalise que la Terre nous a été donnée pour être partagée et non saccagée. »

Témoin de la résilience des êtres humains, il est persuadé que toute épreuve, aussi dure soit-elle, finit par avoir des effets positifs à long terme. « On ne sort pas d’une telle expérience sans en être transformé. Cette privation de tout ce que l’on aimait faire est une grande leçon d’humilité. Accepter la lenteur des choses est une thérapie éprouvée. Je crois vraiment qu’on va en sortir meilleurs. À 84 ans, j’aime la vie et j’espère, même si ça ne sera pas le cas, qu’elle sera éternelle. À mon âge, on veut que le temps qui nous reste soit heureux. Je suis animé par un optimisme à tout crin. Le temps est compté, mais il l’est pour tout le monde ! (rires )»

UN HOMME DE LETTRES PASSIONNAN­T

Parmi la trentaine de livres qu’il a signés au cours de son illustre carrière, l’auteur né en Lituanie, en 1934, nous a raconté son histoire de résilience après une enfance marquée par la guerre et les camps de concentrat­ion, dans Des barbelés dans ma mémoire. Il s’apprêtait à lancer un roman, Les belles histoires d’une sale guerre, quand la COVID-19 a bouleversé le monde.

Tout ça lui a inspiré le sujet de son prochain livre : Les belles histoires d’une pandémie .«Ilya plein de gestes de bonté, de solidarité et de dévouement. La créativité et l’ingéniosit­é des gens confinés sont foisonnant­es et s’expriment par des gestes merveilleu­x ou des petites vidéos drôles ou inspirante­s. C’est beau à voir. »

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PHOTO D’ARCHIVES COURTOISIE VICKY BRUNORO-LAPORTE

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