Le Journal de Montreal - Weekend
LE DÉSIR NE MEURT PAS… IL SE CULTIVE
Le désir sexuel n’est pas un long fleuve tranquille… et la deuxième vague de COVID-19 à l’automne a donné du fil à retordre à bien des couples ! Avec son nouveau livre Désirez-vous désirer ? L’indiscipline du désir ,la sexologue Sylvie Lavallée nous accompagne dans cette prise de conscience. Entrevue pour stimuler la libido qu’on croyait avoir perdue !
Madame Lavallée, de nouvelles études démontrent que la pandémie a entraîné une baisse de libido au sein de bien des couples. Quelles sont vos observations à travers votre pratique ?
Le désir est malmené, ces tempsci. Et avec la troisième vague qui s’est amorcée, c’est un stress absolu pour tout le monde. La COVID-19, c’est encore nouveau pour nous. Ça prend beaucoup de motivation pour surmonter tout cela. Pour les couples qui étaient déjà à l’agonie, c’est encore plus difficile. Dans ma pratique, je me concentre beaucoup sur les questions de trahison et d’infidélité, sur les pannes de désir et les quêtes personnelles. Certains se demandent : est-ce que je vais laisser mon couple ? C’est la pierre angulaire de ma réflexion. Les gens qui me consultent me disent à peu près tous la même chose : j’aurais dû faire telle ou telle chose avant. Je leur demande donc : « Qu’est-ce qui vous amène à consulter maintenant ? » Peut-être que le fruit est mûr et prêt à être cueilli, car il y a un moment pour consulter dans la vie. Beaucoup ont laissé aller leur désir, en pensant que ça allait revenir. Le désir, on le tient souvent pour acquis.
Comment les couples doivent-ils s’y prendre pour éviter de négliger leur vie sexuelle ?
Il faut réfléchir à « ce que j’ai envie de ressentir ». Il y a un exercice de conscience à faire. J’ai l’impression que les gens savent déjà quoi faire, mais qu’il y a de la procrastination. J’ai envie de donner une feuille à mes patients, où le mot Solutions est écrit en haut, pour qu’ils écrivent ce qu’il faut faire. Il y a déjà un pas de fait lorsqu’on va consulter, car on est capable de nommer la situation. Des gens redoutent de consulter, car ils vont être confrontés à leur réalité. Pourtant, ils sont dans la tempête et ils ont besoin de quelqu’un pour les guider.
Parlons d’infidélité. Quelle est votre perception concernant ce phénomène ?
Avec L’indiscipline du désir ,je voulais ratisser un peu plus large. Mais c’est une section de mon livre qui est fondamentale. La pensée délinquante, c’est parfois plus fort que tout. Contrairement à la raison, la pulsion est libre, elle veut s’amuser. Des fois, on se met un cadre très strict, mais, en nous, il y a un aspect qui veut vivre. Quand certains touchent à l’infidélité, ça les réveille. La monogamie a la vie dure. C’est dur de préserver le désir à long terme, de garder un regard frais sur l’autre. Ça ne se fait pas tout seul. C’est une mission qu’il faut se donner. Il n’y a pas d’école sur le couple. C’est compliqué, le sentiment amoureux est fragile. Le désir est à géométrie variable, car on change, on bouge, on progresse. Le désir change aussi. On recherche d’autres genres de sensations.