Le Journal de Montreal - Weekend
PORTRAIT D’UN MONTANA REBELLE
Écrivaine et grand reporter, la Française Sylvie Brieu raconte les beautés et les enjeux du Montana, un État américain peu densément peuplé où la nature est grandiose, dans son nouveau livre, L’âme de l’Amérique. Elle décrit ses rencontres avec les Premières Nations, avec les cowboys, les écrivains et les « rangers » des parcs nationaux dans ce récit de voyage au coeur des grandes étendues sauvages de l’Ouest américain. Un must pour comprendre l’état des lieux au 21e siècle.
L’Ouest américain est grand. C’est aussi une vraie fabrique à mythes, un endroit où le passé et le présent s’unissent, et où les enjeux économiques et la conservation du milieu naturel sont au coeur des préoccupations de la population.
Sylvie Brieu s’est rendue au Montana d’abord pour se ressourcer, à la suggestion de son ami, le photographe légendaire du National Geographic, William Albert Allard. Puis elle y est retournée à plusieurs reprises pour s’immerger dans l’histoire, la culture de cet État, rencontrer ses gens, et comprendre ce qui s’y passe en ce moment.
Elle a rencontré des intellectuels, des artistes, des journalistes, des écrivains, des cowboys, des gens des Premières Nations, des rangers spécialisés dans la faune sauvage, des militants pro et antiloups, des protecteurs des ours grizzlis et des bisons, des champions de rodéo et des personnalités hors-norme. Une formidable odyssée qui lui a demandé six ans de travail.
Sylvie Brieu, une autrice à la plume magnifique, présente une vision sensée et sensible de l’Ouest américain et de ses gens. « J’ai toujours eu un attrait très fort pour le continent américain dans son ensemble, que ce soit l’Amérique du Nord, l’Amérique centrale et l’Amérique du Sud. Je me suis toujours sentie bien, en équilibre entre l’Europe et l’Amérique », dit-elle en entrevue téléphonique de Paris, où elle habite.
« J’ai fait des études de journalisme à Berkeley et je me suis passionnée pour les peuples premiers. Ça fait des années que je travaille, comme journaliste et comme auteur, dans le but de promouvoir la diversité culturelle. »
COUP DE COEUR
À la suggestion de son collègue, qui connaît très bien l’Ouest américain, elle s’est rendue au pied des Rocheuses, dans le Montana, pour faire l’expérience de l’Ouest authentique. Ce fut un coup de coeur instantané.
« J’ai découvert la richesse de ce territoire. Ce qui m’a bouleversée en arrivant, c’est l’amour inconditionnel des gens, quelle que soit leur origine culturelle, leur origine sociale, leur appartenance politique, pour un environnement qui est vraiment exceptionnel. Et la manière dont cet amour structure un sens très profond de la communauté et de la solidarité. Ça m’a bouleversée au point où j’y suis retournée chaque année et au point où j’y vis maintenant presque une partie de l’année. J’ai besoin d’aller me ressourcer dans ces espaces et d’être en lien avec ces gens qui m’accueillent, qu’ils soient descendants de grandes figures de la résistance amérindienne ou descendants de colons. »
DES ALLIANCES SE FORMENT
Elle a constaté que des alliances se formaient, dans certains endroits du Montana, entre les Cheyennes du Nord, les rangers des parcs nationaux, les environnementalistes et les gens des communautés.
« Aujourd’hui, l’ennemi, c’est le prédateur industriel, celui qui veut dévaster cette terre qui est devenue un socle de l’identité commune. Les gens s’allient pour préserver ces paysages et cette nature idylliques. »
La terre est un facteur de cohésion sociale, a-t-elle observé.
« C’est tellement exceptionnel et porteur d’espoir qu’il faut partager ce message positif, parce que ça fait du bien et ça redonne quand même de l’espoir en l’humanité quand on voit qu’il y a des gens qui se préoccupent les uns des autres. Dans le Montana, on sent ce lien ombilical que les gens ont à la terre. On ressent les émotions qui font que l’écologie est importante. »