Le Journal de Montreal - Weekend
Saviez-vous que la Nouvelle-France n’a pas été épargnée par la chasse aux sorcières ?
Il y a 331 ans, soit en mars 1692, les célèbres procès de Salem ont commencé. Cette chasse aux sorcières, qui a duré jusqu’en mai 1693, a mené à l’arrestation d’une centaine de personnes et à la mort de quatorze femmes et de six hommes. Ailleurs en Europe, et même en Nouvelle-France, les autorités religieuses et civiles étaient quant à elles de plus en plus critiques face aux superstitions et aux accusations de maléfices.
Salem est un village du Massachusetts habité au XVIIe siècle par une population essentiellement puritaine. Au sein de ces communautés, les pasteurs attribuent souvent les problèmes sociaux à l’influence du Diable. Il s’agit là d’une croyance qui était déjà bien ancrée en Europe à cette époque et qui est à l’origine de la mort de milliers de personnes dans le cadre de procès pour hérésie ou pour sorcellerie.
Cette peur des maléfices a été très utile pour les églises catholiques et protestantes. Elle a servi d’instrument afin de contrôler les populations des campagnes qui étaient davantage éloignées de la supervision et de l’administration des villes.
Toute personne qui sortait en effet des normes sociales préétablies, ou qui avait des connaissances en herboristerie et pratiquait des actes médicaux hors du cadre religieux et civil, pouvait rapidement devenir suspecte d’actes de sorcellerie. Surtout si des phénomènes non explicables survenaient dans des petites communautés, comme une épidémie mortelle.
LES PROCÈS DE SALEM EN CONTEXTE
La situation de Salem était tout indiquée pour qu’une obsession collective dégénère en une série de procès aux résultats funestes. En 1692, le village est en expansion et il y a des rivalités économiques entre certaines familles. Comme les divertissements sont interdits dans la communauté, l’ennui est aussi un facteur à considérer. Car cette histoire de sorcellerie s’amorce avec la fille du pasteur Samuel Parris, Betty, de même que sa nièce. Elles commencent à être atteintes de troubles étranges : elles figent soudainement sur place, sont prises de convulsions ou lancent spontanément des objets dans une pièce. Les soupçons de maléfices commencent à circuler, moussés par un livre très populaire à l’époque, qui décrit les symptômes attribuables à des actes de sorcellerie.
D’autres cas de malaises étranges sont rapportés et des gens commencent à accuser ennemis et voisins d’actes maléfiques… souvent par vengeance ou par jalousie.
Un premier procès s’ouvre ainsi le
1er mars 1692 et mène à l’accusation de trois femmes qui vivaient en marge de leur communauté. Rapidement, les accusations s’ajoutent, basées sur de simples témoignages de gens qui affirment avoir vu des apparitions ou des comportements décrits comme ceux de sorcières. Il faudra attendre le mois de mai 1693 et plusieurs décès pour que le gouverneur de l’État mette fin à ces interrogatoires, menés sans preuve concrète de culpabilité.
DES ACCUSATIONS DE SORCELLERIE EN NOUVELLE-FRANCE ?
La Nouvelle-France n’a pas échappé à cette peur de la sorcellerie et des maléfices, mais aux XVIIe et XVIIIe siècles, affirmer avoir vu un spectre ou un acte magique ne pouvait être considéré comme une preuve. Ce qui n’a pas empêché la tenue de procès pour maléfices ou profanations.
Ce fut le cas d’une aubergiste de Montréal nommée Anne Lamarque, accusée de sorcellerie en 1682. Des témoins l’accusent alors de posséder un livre de sortilèges… elle affirme qu’il s’agit plutôt d’un livre d’herboristerie. Grâce à ses bonnes relations, elle a évité le bannissement, qui était le sort réservé aux gens condamnés pour sorcellerie en Nouvelle-France.
Des hommes font aussi face à des accusations de sortilèges. À cet égard, le cas d’un soldat astucieux qui aimait les tours de cartes et de magie, François-Charles Harvard de Beaufort, a provoqué une frousse chez ses spectateurs en les utilisant pour qu’un voleur admette son crime. Ces tours ont mené à son procès pour sorcellerie et escroquerie à l’été 1742, à sa condamnation au fouet et à 3 ans sur les galères du roi… condamnation après laquelle nous avons perdu sa trace dans les archives !