Le Journal de Montreal - Weekend

« JE SUIS FIÈRE DE M’ÊTRE TENUE DEBOUT »

À l’instar de plusieurs personnali­tés féminines, le harcèlemen­t en ligne dont est victime la chroniqueu­se du Journal Sophie Durocher prend souvent un caractère violent et sexuel.

- SARAH-ÉMILIE NAULT Le Journal de Montréal sarah-emilie.nault @quebecorme­dia.com

Les commentair­es qu’elle reçoit sont grossiers et souvent belliqueux. Des exemples ? « J’espère que vous allez vous faire violer et lacérer » et « Rien à foutre de ton avis, espèce de grosse pute » montrent bien le ton.

« Le harcèlemen­t a toujours existé, explique Sophie Durocher. Seulement maintenant, on choisit de m’envoyer – en public ou privé – des propos haineux souvent à caractère sexuel. C’est ce qui est principale­ment envoyé aux femmes. »

La réalisatri­ce Léa Clermont-Dion, la scénariste Kim Lévesque-Lizotte et l’auteure Martine Delvaux, des femmes reconnues pour leurs opinions féministes, ont aussi révélé qu’elles encaissent régulièrem­ent des messages indécents en ligne.

Certains messages reçus par Sophie Durocher donnent froid dans le dos : « J’espère que vous allez avoir le cancer », « Comment votre fils fait-il pour avoir une mère comme vous ? », « Criss de conne de collabo ferme ta grande gueule estie d’épaisse, tu es une criss de folle »…

Elle raconte avoir vécu un déferlemen­t de haine « comme elle en avait rarement vu » dans les dernières années.

PLAINTES À LA POLICE

L’animatrice a porté plainte au SPVM à deux reprises pour harcèlemen­t en ligne. La plus récente, en août dernier, lorsqu’un homme a gazouillé « La Durocher mérite d’être giflée si fort qu’elle tombe dans le coma pour une couple d’années. »

Le dépôt des documents d’enquête au DPCP (le Directeur des poursuites criminelle­s et pénales) a donné lieu à des accusation­s formelles de menaces et de harcèlemen­t criminel. Ce père de famille « antivaccin » devra se présenter en cour en juin pour enregistre­r son plaidoyer.

« Je me disais : est-ce qu’il sait où j’habite, où je travaille ? Cet homme encouragea­it sa communauté à me causer du tort. J’ai passé des semaines à avoir peur de me promener à Montréal », confie-t-elle.

Mme Durocher a également porté plainte contre l’ex-humoriste et vlogueur Gab Roy en 2014. Celui-ci avait publié un montage photo indécent qui l’impliquait. Elle avait dû fermer son compte Facebook pendant sept jours devant la virulence des commentair­es grossiers et dégradants de certains internaute­s.

Gab Roy a été condamné à

240 heures de travaux communauta­ires et une probation de trois ans pendant lesquels il a été coupé d’internet. On lui a également interdit de s’approcher de sa victime, en plus d’avoir dû écrire une lettre d’excuse à Mme Durocher. « Ce dossier a fait jurisprude­nce, dit-elle. C’était l’une des premières fois que quelqu’un était condamné pour des propos sur Facebook. Je suis fière de m’être tenue debout. Le message que je voulais lancer à mon fils de 15 ans est que quand quelqu’un t’attaque, il faut te défendre, mais en étant plus intelligen­t que lui. »

Gab Roy a aussi été poursuivi au civil par la comédienne Mariloup Wolfe en 2014 pour atteinte à sa vie privée, son image, sa dignité personnell­e et sa réputation. L’ex-humoriste avait publié un texte décrivant « son fantasme pervers d’avoir une relation sexuelle dégradante, violente et abusive » avec la comédienne. Le montant du règlement à l’amiable a été versé à des groupes oeuvrant contre la violence faite aux femmes.

 ?? ?? SOPHIE DUROCHER, CHRONIQUEU­SE
SOPHIE DUROCHER, CHRONIQUEU­SE
 ?? ??

Newspapers in French

Newspapers from Canada