Le Journal de Montreal - Weekend

L’arbre génétique des Québécois

- Journalist­e MATHIEU-ROBERT SAUVÉ

C’est le long des rives du SaintLaure­nt et des grands cours d’eau que les Québécois d’origine européenne se sont établis, confirme une étude en génétique des population­s. Mais l’évolution démographi­que a aussi été marquée par d’autres éléments topographi­ques.

« La région de Baie-Saint-Paul, dans Charlevoix, qui a été frappée par une météorite il y a 300 millions d’années, a permis l’agricultur­e là où on ne trouve que des forêts et des montagnes. C’est de là que sont partis de nombreux colons vers le Saguenay–Lac-Saint-Jean », explique le mathématic­ien Simon

Gravel, de l’Université McGill, coauteur d’un article dans Science en juillet dernier sur l’évolution génétique de la population québécoise.

Fruit du travail d’une équipe de 11 chercheurs internatio­naux sous la direction du postdoctor­ant Luke Anderson-Trocmé, l’article montre clairement les sous-groupes qui s’installent à partir du XVIIe siècle dans les diverses régions du Québec.

AUTOROUTES DE LA COLONISATI­ON

C’est en suivant le Saguenay que les descendant­s des colons de Charlevoix se sont rendus jusqu’à Roberval et Mistassini. Et en Beauce, c’est la rivière Chaudière qui a joué ce rôle d’autoroute de la colonisati­on. Dans le Bas-SaintLaure­nt, la rivière Ouelle a aussi permis l’expansion de la population.

Exception à cette règle : l’Abitibi, qui a été colonisée un peu plus tardivemen­t par des gens venus de différente­s régions du Québec et pas nécessaire­ment en remontant le cours de l’Outaouais.

Le mathématic­ien qui dirige un laboratoir­e de recherche en génétique des population­s a été particuliè­rement heureux de constater que son modèle s’appliquait parfaiteme­nt à la réalité québécoise.

« Nous cherchions à documenter le fait que la topographi­e joue un rôle dans la dispersion génétique. C’est exactement ce que nous avons trouvé », dit-il.

LABORATOIR­E DÉMOGRAPHI­QUE

En raison de son passé culturel et religieux, le Québec constitue une terre de prédilecti­on pour la recherche en démographi­e et génétique.

« Dès les débuts de la colonisati­on, les prêtres notaient tout, mariages, naissances, décès. Ces registres ont été conservés jusqu’à ce que l’État prenne en charge ces informatio­ns. »

Pour leur recherche, les auteurs ont analysé quatre millions d’actes de l’état civil du Québec et des données génotypiqu­es de 20 451 Québécois d’ascendance française. Au total, ce sont près de 1,5 million d’individus qui constituen­t la base du modèle mathématiq­ue.

À l’exception de l’Islande et de l’Utah, cet État américain à forte densité mormone pour qui les informatio­ns post-mortem sont essentiell­es au culte, le Québec serait le meilleur endroit au monde pour étudier l’évolution génétique des population­s.

Mais l’arbre génétique que les chercheurs ont mis au point n’est que la première étape d’une plus vaste recherche visant à retracer les origines de certaines maladies héréditair­es.

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PHOTO DOMAINE PUBLIC Des travailleu­rs québécois entre 1900 et 1918.
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PHOTO DOMAINE PUBLIC Le pont de glace sur le fleuve Saint-Laurent entre Québec et Lévis, en 1892.
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Aquarelle Paysage d’automne par James Duncan (1806-1881).
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