Le Journal de Montreal - Weekend

L’été de rêve de Jackie Robinson à Montréal

Avant de devenir une idole nationale aux États-Unis pour ses coups de circuit, Jackie Robinson (1919-1972) a joué pour les Royaux de Montréal, qu’il a portés jusqu’au championna­t de 1946.

- MATHIEU-ROBERT SAUVÉ Journalist­e Le Journal de Montréal

Premier joueur noir à jouer dans les ligues majeures de baseball en 1947, Jackie Robinson a passé un été de rêve à Montréal l’année précédente. Au point d’être suivi par une foule en liesse au moment où, en fin de saison, il court pour ne pas rater son avion.

« C’était la première fois, peut-être, qu’un Noir était poursuivi dans les rues d’une grande ville par des centaines de personnes désireuses non pas de le rouer de coups, mais de lui donner de l’amour. Les gens voulaient le toucher, le féliciter, lui serrer la main », explique l’historien Marcel Dugas, qui lui a consacré un livre en 2019 chez Hurtubise, Jackie Robinson, un été à Montréal.

Jouant au stade De Lorimier, aujourd’hui disparu, les Royaux étaient l’équipe-école des Dodgers de Brooklyn. Dans la Ligue internatio­nale, Robinson clôt la saison avec 113 points marqués, loin devant son plus proche rival.

ATHLÈTE MULTIPLE

Originaire de la Géorgie, Jackie Robinson excellait dans plusieurs sports – comme en témoigne la statuaire qui le représente notamment avec un ballon de football au stade Rose Bowl de Los Angeles –, mais c’est au baseball qu’il acquerra sa notoriété dès son premier coup de circuit à son premier match chez les pros.

Son épisode montréalai­s est passé à l’histoire pour avoir ouvert la porte à son intégratio­n chez nos voisins du sud, où il est perçu comme un pionnier. Dugas donne encore des entrevues à des biographes américains à ce sujet.

Au Journal, l’historien souligne qu’il est difficile aujourd’hui de comprendre l’impact de Robinson aux ÉtatsUnis, non seulement à l’échelle sportive, mais aussi sur les plans social et politique.

« Les Noirs n’avaient non seulement pas le droit de jouer au baseball profession­nel, mais les spectateur­s noirs étaient confinés à des sections identifiée­s dans la plupart des stades. »

RUE DE GASPÉ

Il serait inconcevab­le à présent de voir une équipe sans Noirs dans la Ligue américaine ou la Ligue nationale de baseball.

Pourtant, dès le camp d’entraîneme­nt de la saison 1946, en Floride, alors qu’il tentait de se faire une place parmi les Royaux, il a été durement éprouvé par le racisme ambiant, rappelle Dugas. « Et durant sa première saison, lorsqu’il se présentait au bâton, il était insulté, injurié. Avant le début de la saison, on l’avait averti que même les arbitres allaient être contre lui. Cela l’a conduit au bord de l’épuisement », reprend M. Dugas, qui tient un balado sur l’histoire du Québec.

À Montréal, Robinson a eu un succès immédiat en dépit de la couleur de sa peau. « Sur les bancs [des Royaux], personne n’aurait osé insulter Jackie. C’était un Noir, mais ça n’avait aucune importance aux yeux des supporteur­s. J’ai entendu des obscénités lancées à son encontre aux États-Unis. Mais à Montréal, il a toujours été respecté comme tout autre joueur de baseball », a mentionné son coéquipier, le lanceur Jean-Pierre Roy, selon l’Encyclopéd­ie canadienne.

Quand il emménage au 8232, De Gaspé, dans l’arrondisse­ment de Villeray, les enfants du quartier aident sa femme, Rachel, à transporte­r ses provisions. Elle mentionner­a que l’expérience montréalai­se aura été pour le couple « presque paradisiaq­ue ».

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Jackie Robinson dans l’uniforme des Royaux de Montréal en 1946. RETOUR EN ARRIÈRE
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Avant sa carrière d’athlète, Jackie Robinson s’enrôle dans l’armée américaine et joint les troupes pendant la Deuxième Guerre mondiale.
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PHOTO FOURNIE PAR RONNY JAQUES / BIBLIOTHÈQ­UE ET ARCHIVES CANADA Jackie Robinson (avec le bâton) à Montréal en 1946.
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La première partie de Robinson au stade DeLorimier, à Montréal. Il frappe un circuit bon pour trois points.
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PHOTO DOMAINE PUBLIC Uniforme des Royaux de Montréal porté par Jackie Robinson à l’été 1946.
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