Le Journal de Montreal - Weekend

L’HOMME DERRIÈRE DÉDÉ

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Dédé. Un simple surnom que tout le monde connaît. L’auteur-compositeu­r-interprète multi-instrument­iste du groupe Les Colocs André Fortin a profondéme­nt marqué la scène artistique québécoise avant de mettre fin à ses jours le 8 mai 2000.

Christian Quesnel lance ces jours-ci une bande dessinée lui étant consacrée, dans laquelle il lève le voile sur l’humain derrière l’artiste idolâtré.

« Rapidement au début du processus, Hélène Fortin m’a dit qu’avec le temps, l’homme avait tendance à disparaîtr­e derrière l’icône. Sans le savoir, elle venait de fixer ma ligne directrice pour tout le projet », confie Christian Quesnel.

« Bien que le sujet soit intéressan­t et riche, c’est un terrain miné qu’il est très difficile de traverser sans créer d’émoi. Tout le monde a son idée bien précise de Dédé en tête donc la marge d’erreur est très mince. Rapidement, une solution s’est présentée à moi pour tenter de limiter, d’éviter de tomber dans les pièges tout en n’éludant rien de sa vie : faire émerger sa parole, ses mots, à partir des archives disponible­s. À partir de là, il est bien difficile de contredire la parole même d’André Fortin. » Ce n’est pas la première fois que Quesnel trempe ses pinceaux dans les partitions d’illustres musiciens. Pensons à Ludwig, le chapitre « Forteresse » dans le collectif L’Histoire de 5 grands groupes métal du Québec et Félix Leclerc.

DOCUMENTAT­ION ÉTOFFÉE

« Suite à la sortie de Félix Leclerc :

l’alouette en liberté en 2018, Lise Raymond m’a contacté et m’a proposé de faire une mini-bande dessinée sur Dédé Fortin que je connaissai­s un peu comme tout le monde. Lise voulait créer un événement autour de Dédé dans le Quartier des spectacles, mais ça n’a pas fonctionné à l’époque. C’est lorsque nous avons travaillé sur Vous avez détruit la

beauté du monde, une bande dessinée sur le suicide publiée en 2020, que Lise m’a relancée. C’est à ce moment que c’est devenu MON projet de création. » D’ailleurs, celle qui est devenue depuis sa relationni­ste de presse, ainsi que des proches et membres de sa famille, lui ont fait parvenir des lettres éparses, des notes de travail, des agendas et même des dessins que l’on peut voir en filigrane tout au long de l’album.

« Tous ces documents témoignent de la personnali­té d’André Fortin. Au fur et à mesure que je parcourais ces documents, Dédé s’effaçait pour laisser toute la place à André, moins connu du grand public. C’est l’homme qui a émergé de l’icône et là, j’ai vraiment commencé à cerner le personnage, ses combats intérieurs, ses contradict­ions et ses passions. » Quant à l’approche visuelle, Dédé se traverse comme un clip des Colocs. Juxtaposit­ion d’éléments, doubles pages, bruits plaqués et témoignage­s de proches en médaillons sont autant d’éléments qui rythment le récit. Bien que sombre, cette bande dessinée se veut une célébratio­n de l’homme tout en s’enracinant dans notre époque. Les combats passés de Dédé trouvent notamment écho dans une lettre destinée à Louise Harel en fin d’album. Les hommages dessinés de membre des Impatients, organisme en santé mentale visant la guérison par le biais de l’expression artistique, trouvent tout naturellem­ent leur place aux côtés de ceux réalisés par quelques bédéistes confirmés. Finalement, Quesnel présente l’homme en arrière-scène, loin des acclamatio­ns du public, aux prises avec ses démons et ses aspiration­s.

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DÉDÉ Christian Quesnel Éditions Libre Expression

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