Le Journal de Montreal - Weekend

La petite légende de la poterie de Portneuf

- ÉVELYNE FERRON Historienn­e Collaborat­ion spéciale

Bols à gruau, plats de service, assiettes et tasses se trouvent sur les sites des antiquaire­s, des musées et des collection­neurs sous un nom étonnant : poterie de Portneuf. Or, il n’y a jamais eu de fabrique de poterie ou de faïence à Portneuf ou dans les villages environnan­ts à cette époque. Alors pourquoi porte-t-elle ce nom ?

À l’époque de la Nouvelle-France, puis sous le régime anglais, une grande partie des pièces de vaisselle du quotidien étaient importées d’Europe. Des fabriques de céramique ont commencé des production­s locales à partir des années 1750 environ, bien que les peuples autochtone­s en fabriquaie­nt à la main depuis plus de deux millénaire­s. Ces pièces étaient confection­nées à partir d’argile ou de terre cuite et étaient conçues pour être davantage des objets utilitaire­s (cruches, théières, assiettes, bols, tasses, etc.) que d’apparats.

Dès les premières années du régime anglais, les pièces de vaisselle des potiers anglais arrivent sur les tables des mieux nantis de la Vallée du Saint-Laurent. Mais pour le reste de la population, ce sont les poteries d’argile ordinaires qui garnissent les tables.

Ces poteries sont davantage importées d’Écosse et plus particuliè­rement de Glasgow, notamment au cours du 19e siècle.

POTERIE ÉCOSSAISE ET POTERIE PORTNEUVOI­SE

Des fabriques écossaises comme les poteries Annfield de John Thomson à Glasgow produisent des ensembles destinés au Canada et à l’Australie à cette époque. C’est ce type de vaisselle que nous connaisson­s sous le nom quelque peu mystérieux de « poterie de Portneuf ».

Or, malgré des fouilles archéologi­ques et des recherches d’archives, il n’existe aucune preuve d’une quelconque fabrique de poterie, ou même d’un potier, dans le village de Portneuf et ses environs. Il faut aller à Cap-Santé pour trouver un potier en activité dans les années 18501870, mais il n’aurait jamais pu produire autant de pièces pour qu’on en trouve autant sur le marché des antiquités et dans les musées aujourd’hui !

IL ÉTAIT UNE FOIS… UN NAVIRE ?

Au milieu du 19e siècle, la région de Portneuf semble avoir été un lieu de vente de ces ensembles de vaisselle du quotidien, étant une zone de passage centrale entre Montréal et Québec. Comme la grande majorité de ces pièces ne portent aucune signature de fabricant, elles ont ainsi gagné leur surnom de « poterie de Portneuf ».

Mais pourquoi la région semblet-elle en avoir vendu autant ? Une légende, non vérifiable pour l’instant, voudrait qu’un navire écossais transporta­nt de ces marchandis­es destinées au Canada ait fait naufrage dans le secteur de Cap-Santé. Les riverains auraient ainsi pu sauver de nombreuses caisses. Plusieurs familles en auraient gardé pour elles, d’autres personnes auraient commencé à en vendre dans la région ou aux gens de passage. dans la région !

 ?? ?? Épaisses, non translucid­es, ces pièces de faïence sont durables et gardent la nourriture chaude. Cela ne les empêche pas d’être joliment décorées de motifs de fleurs, d’animaux de ferme ou de simples lignes colorées, ce qui agrémente les repas de tous les jours.
Épaisses, non translucid­es, ces pièces de faïence sont durables et gardent la nourriture chaude. Cela ne les empêche pas d’être joliment décorées de motifs de fleurs, d’animaux de ferme ou de simples lignes colorées, ce qui agrémente les repas de tous les jours.
 ?? ?? Céramique iroquoienn­e du Saint-Laurent
Céramique iroquoienn­e du Saint-Laurent
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