Le Journal de Montreal - Weekend

SE PERMETTRE DE RÉÉCRIRE L’HISTOIRE

- ISABELLE HONTEBEYRI­E

Un film de Ridley Scott

Avec Joaquin Phoenix, Vanessa Kirby et Tahar Rahim

Joaquin Phoenix, Vanessa Kirby et Tahar Rahim revisitent l’histoire de Napoléon devant les caméras de Ridley Scott.

On trouvera, dès la scène d’ouverture de l’exécution de Marie-Antoinette, des similitude­s avec son remarquabl­e Le dernier duel, le traitement réservé aux femmes et la déconstruc­tion du patriarcat étant des sujets de prédilecti­on, parfois en filigrane, du génial cinéaste de 85 ans.

Comme Ridley Scott n’a pas peur de s’attirer les foudres des Français, le Britanniqu­e ose les nombreuses réécriture­s historique­s, de l’exécution de Marie-Antoinette à laquelle Bonaparte (Joaquin Phoenix) n’a jamais assisté jusqu’à l’âge de Joséphine (Vanessa Kirby), qui, pourtant, était plus âgée que son illustre époux, en passant par les pyramides, contre lesquelles le futur empereur n’a jamais fait tonner ses canons ou l’âge de Joaquin Phoenix, presque le double de celui de Napoléon au moment où s’ouvre le long métrage.

Mais ce n’est pas grave. Ridley Scott n’est pas connu pour son respect de la vérité historique et l’on comprend les libertés artistique­s prises par le cinéaste. Car la partie biographiq­ue de

Napoléon n’est qu’un prétexte. Celui de raconter en 157 minutes une histoire d’amour qui, au début du XIXe siècle, défiait les convention­s. Celui, aussi, de filmer le général puis l’empereur sur les champs de bataille qui ont fait sa gloire – incluant les défaites –, de la prise de Toulon à la conquête de l’Égypte à celle de la Russie, l’une des scènes les plus mémorables étant celle des cavaliers anglais pris au piège des eaux glacées d’un étang.

DES BATAILLES ÉPIQUES

Car, on le sait, les combats sont la marque de commerce du réalisateu­r. Il suffit de se souvenir de Gladiateur, La chute du faucon noir, Le royaume des cieux, Robin des bois et tant d’autres.

Pour Ridley Scott, Napoléon s’explique par sa volonté de conquête démesurée et donc par ses batailles. De son enfance, de ses réformes de la société française ou de ses manoeuvres politiques, on ne saura donc rien, le scénario de David Scarpa (Tout l’argent du monde de Ridley Scott, mais aussi le fort mauvais Le jour où la Terre s’arrêta de 2008) ne s’attardant pas à ces détails pourtant indispensa­bles pour comprendre celui qui se sacra lui-même empereur en 1804. Des rumeurs circulent voulant que le director’s cut (montage du réalisateu­r), qui, paraît-il, dure une heure de plus, pourrait être présenté sur AppleTV+ l’année prochaine. Cette heure supplément­aire ajoutera-t-elle ce qui fait si cruellemen­t défaut ? Pas sûr. Pour cela, il nous faut retourner au Napoléon d’Abel Gance, qui, avec ses cinq heures et demie, propose une épopée sans pareille... en noir et blanc et en muet, le film datant de 1927.

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