Le Journal de Montreal - Weekend

MANIPULATI­ON, MEURTRES ET ÉROTISME

La cinéaste Emerald Fennell, bien connue pour son film oscarisé Une jeune femme pleine de promesses, revient en force avec ce Saltburn, un drame psychologi­que produit par Margot Robbie, brillammen­t porté par Barry Keoghan, Jacob Elordi et Rosamund Pike.

- ISABELLE HONTEBEYRI­E

En 2006, Oliver Quick

(Barry Keoghan) arrive à l’Université d’Oxford, en Angleterre.

Il a du mal à s’intégrer, les autres élèves le méprisant en raison de son statut social inférieur. Mais Oliver tombe sous le charme de Felix Catton (Jacob Elordi, le Elvis du Priscilla de Sofia Coppola, et révélé dans la série Euphoria), jeune homme populaire et issu d’une famille riche sur lequel il fantasme.

Oliver et Felix deviennent rapidement amis, même si le cousin de ce dernier, Farleigh (Archie Madekwe), ne l’apprécie guère et Felix invite Oliver à passer l’été avec lui et sa famille dans leur manoir de Saltburn. Là, il fait la connaissan­ce de Lady Elsbeth (Rosamund Pike), la mère de son ami Sir James (Richard E. Grant), de Venetia (Alison Oliver), de sa soeur, ainsi que de Pamela (Carey Mulligan), une amie d’Elsbeth que la famille a prise sous son aile.

L’histoire est tordue à souhait, Emerald Fennell révélant assez rapidement au spectateur qu’Oliver n’est pas aussi sympathiqu­e qu’il y paraît ; l’on taira d’ailleurs tout détail susceptibl­e de divulgâche­r le visionneme­nt. Si l’on peut trouver le scénario parfois un peu alambiqué – comme celui d’Une jeune femme pleine de promesses –, c’est que l’auteure en profite pour explorer, avec un humour délicieuse­ment féroce, des thèmes qui lui sont chers.

NUANCE ET FINESSE

La découverte, par Oliver, de la vie de richissime­s Anglais donne lieu à des dialogues où la méchanceté rivalise avec la bêtise, le personnage de Rosamund Pike (notamment dans la manière dont elle se comporte avec « cette pauvre Pamela ») en étant l’exemple le plus flagrant. Barry Keoghan et Jacob Elordi sont impeccable­s dans leurs rôles respectifs, leur relation, forcément déséquilib­rée, étant explorée avec nuance et finesse par la réalisatri­ce.

On ne peut pas non plus passer sous silence les décors savamment déstabilis­ateurs, le luxe se confondant sans cesse avec la luxure, le riche avec le pauvre, le beau avec le laid ; la trame sonore, mélange de pop contempora­ine et de classique, ajoute au trouble généralisé du spectateur. Le female gaze (un regard érotique féminin, pendant du male gaze) d’Emerald Fennell est une révélation, la cinéaste filmant avec virtuosité tous ces corps masculins nus jusqu’à la jubilation finale, la scène de clôture étant un petit bijou pour lequel Barry Keoghan a dû se livrer à pas moins de 11 prises. Oui, on en redemande avec enthousias­me !

Saltburn, présenteme­nt à l’affiche.

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