Le Journal de Montreal - Weekend
LA PAROLE AUX JEUNES
Cinq questions à Hélène Girard, productrice de La soirée MAMMOUTH
La soirée MAMMOUTH est un projet de coeur où convergent plein de gens de talent. C’est une équipe tissée serrée que Hélène Girard, qui y travaille depuis la première édition, ne tarit pas d’éloges. Comme directrice du créneau hors fiction chez Pamplemousse (la boîte de France Beaudoin), elle a participé à l’élaboration d’On va se le dire ,de Retour vers la culture ,de Je viens vers toi avec Marc Labrèche ainsi que de On ramassera demain avec Pier-Luc Funk qui débarquera bientôt sur nos ondes. C’est dire qu’elle n’a pas peur des projets un peu fous ! Grâce à MAMMOUTH, elle s’émerveille devant l’intelligence et la générosité des ados comme de ses collègues qui font des miracles pour offrir une des soirées les plus festives et sensées de notre télé. Peux-tu me parler de l’évolution de MAMMOUTH qui surpasse aujourd’hui le gala ? C’est maintenant une plateforme nourrie à l’année.
C’est un mouvement qui est parti tout petit, même le nom a été difficile à implanter au début. On a travaillé fort pour bâtir sa notoriété. Dès la première année, on allait dans les écoles.
Aujourd’hui, les portes sont grandes ouvertes. Tout le monde voit l’importance de ce rendez-vous où les jeunes peuvent s’exprimer librement. C’est un lien de confiance qu’on a bâti avec eux, une vraie communauté où ils se sentent respectés, écoutés. Ils savent que leur parole sera portée de façon juste et honnête. MAMMOUTH, ce sont aussi des artistes qui ont à coeur les jeunes, qui veulent les rejoindre et rejoindre leurs parents. On se rend compte que ça crée des discussions super importantes. On est plus conscient de l’impact que MAMMOUTH a autour de la table, dans les conversations. C’est un mouvement qui prend de l’ampleur.
La soirée MAMMOUTH est à michemin entre un gala et un Bye Bye. Comment en déterminez-vous le contenu ?
Les recherchistes font un travail incroyable. On rencontre plus de mille jeunes à travers le Québec, que ce soit à Gatineau, au Saguenay, à Sherbrooke, en Abitibi. Un questionnaire leur est remis. Des discussions viennent avec ça. Des jeunes se prononcent aussi sur internet si on n’a pas l’occasion d’aller dans leur classe. Ils sont appelés à suggérer des gestes qui les ont inspirés durant l’année. Il en ressort 15 nommés. Avec les deux productrices au contenu, des scripteurs, Jean-François Fontaine (réalisateur), le show se crée en même temps parce que toutes ces rencontres nous inspirent beaucoup pour le contenu de la soirée. Il y a des phrases que des jeunes et des écoles vont reconnaître, car nous les avons utilisées textuellement.
Quelles sont les préoccupations que les jeunes vous ont adressées ? Sens-tu qu’il y a des tendances depuis quelques années ?
L’environnement est un très gros enjeu. Mais il y a une évolution. Avant on sentait une volonté d’entreprendre des changements et on sent en ce moment un sentiment d’impuissance. Il y a un virage dans leur prise de parole. Ils nous disent : « On ne peut pas porter tout le poids. » La santé mentale est un problème récurrent. Cette année, ils nous ont parlé d’inflation. C’était la première fois. Ils se demandent s’ils vont être capables de partir de chez leurs parents. Ils ont une sensibilité pour les peuples autochtones, veulent en apprendre davantage. Il y a aussi les questions LGBTQ+ et le racisme. Ils ont très peur à un recul sur certains enjeux. Ils sont conscients qu’il faut encore en parler, se battre. MAMMOUTH, c’est drôle, mais c’est aussi extrêmement touchant.
C’est une gang d’animateurs qui s’impliquent. Sens-tu qu’ils partagent les mêmes préoccupations ?
Ce qui est capoté c’est que chaque année, de plus en plus d’artistes veulent participer à MAMMOUTH. J’ai un amour inconditionnel pour Sarah-Jeanne [Labrosse] et Pier-Luc [Funk] qui ont donné le ton. La passation s’est faite en douceur. Les animateurs sont extraordinaires. Ils sont portés par la parole des jeunes, mais ont aussi la leur, et MAMMOUTH leur permet de prendre position. Ça a été le cas avec Alicia Moffet et l’avortement. Les animateurs sont impliqués, viennent en brainstorm. Ils ont le même désir d’authenticité.
On dit que les jeunes ne s’intéressent pas à la culture québécoise. Comment arrivez-vous à les rallier ?
Ils s’y intéressent plus qu’on pense. Ils nous nomment Charlotte Cardin, Roxane Bruneau, Les bracelets rouges. Le Roy, la Rose et le Lou (Ariane Roy, Thierry Larose et Lou-Adriane Cassidy) aussi qui sont du gala. C’est du mix and match avec des références qu’ils connaissent comme Mario Bros, Sex Education, Billie Eilish et Barbie .Onne peut pas les empêcher de consommer ailleurs. Il faut travailler avec eux.
La soirée MAMMOUTH Vendredi 20 h à Télé-Québec