Le Journal de Montreal - Weekend
Le plus beau des théâtres montréalais date de la période du vaudeville
« Il faut sauver l’Impérial ! C’est le plus beau des théâtres montréalais datant de la période du vaudeville et de la naissance du cinéma », déclare au Journal Dinu Bumbaru, directeur des politiques d’Héritage Montréal qui défend depuis 40 ans le patrimoine de la métropole.
Invité à se prononcer sur les menaces de fermeture qui pèsent sur le théâtre rue De Bleury, il en appelle à une mobilisation entre les paliers de gouvernement qui ont la responsabilité de la préservation des immeubles patrimoniaux.
« C’est à Montréal de prendre les choses en main, mais Québec et Ottawa ne doivent pas se dérober à leurs responsabilités », ajoute-t-il en demandant à la mairesse Valérie Plante de s’en occuper personnellement, elle qui cumule les fonctions de mairesse de la ville et de l’arrondissement Ville-Marie.
Le 11 décembre, le président du conseil Benoit Clermont a déclaré à la journaliste de l’Agence QMI, Frédérique de Simone, que le cinéma pourrait fermer ses portes en janvier 2024 sans un « financement adéquat du fédéral ».
Riche témoin des « Grands palaces », ces salles de 800 à 1000 places construites dans les grandes villes du Canada et des États-Unis au tournant du 19e et du 20e siècle jusqu’à la crise des années 1930, l’Impérial faisait partie des « théâtres atmosphériques » où le plafond imitait le ciel étoilé.
Le mobilier de velours et le rideau peint par Emmanuel Biffa ajoutaient un air de luxe à l’ensemble.
INSPIRÉ DE LA RENAISSANCE
« Aller au théâtre, c’était se préparer à vivre une expérience », résume M. Bumbaru, qui rappelle que les projections s’accompagnaient à l’époque de musiciens et de bonimenteurs sur scène. Jusqu’au premier film parlant, Jazz Signer, en 1927, le cinéma n’est qu’une partie du programme. On danse, on chante et on interprète des pièces de théâtre durant ces soirées festives qui horripilent l’Église.
Construit en 1913 par la firme Tognarelli et Voigt de Philadelphie, l’Impérial est classé par le ministère de la Culture et des Communications du Québec depuis 2012.
D’inspiration Renaissance, le bâtiment « présente un intérêt patrimonial pour sa valeur architecturale » de la grande époque des débuts du cinéma.
Montréal a compté d’autres « super palaces » de ce type comme l’Outremont, le Rialto et le Snowdon, mais c’est celui qui a été le mieux conservé, notamment à l’intérieur. Son arche du proscenium, ses arcs latéraux, son escalier en chêne et en fer forgé « ainsi que l’ornementation en relief composée d’arabesques, de guirlandes et de figures mythologiques », mentionne le ministère, ont conservé l’esprit de l’époque.
COÛTS D’ENTRETIEN
Situé au coeur du quartier des spectacles, ce joyau architectural a servi à d’importants moments de la vie culturelle montréalaise.
« Je comprends que les coûts d’entretien pour rénover la toiture et les fenêtres puissent être élevés, mais pourquoi les promoteurs des immeubles voisins transformés en condos ne contribueraient-ils pas au financement de bâtiments patrimoniaux ? » demande M. Bumbaru. Ce type de financement est de plus en plus courant à New York, entre autres, fait-il valoir.