Le Journal de Montreal - Weekend
C’EST À MONTRÉAL QUE RUTHERFORD CRIE Eurêka !
Considéré comme le père de la physique nucléaire, Ernest Rutherford a reçu la plus haute distinction scientifique en 1908, mais peu de gens savent que c’est à Montréal qu’il a mené une recherche capitale sur les radiations.
C’est à l’âge de 27 ans que ce génie néozélandais se voit attribuer un poste à l’Université McGill de Montréal, et un laboratoire doté d’équipements de pointe.
« Grâce à une série d’expériences simples, mais ingénieuses et à une perspicacité étonnante, Rutherford a proposé une explication de la radioactivité qui a fondamentalement changé notre compréhension de l’atome », écrit John Hardy dans le plus récent numéro de Canada’s History.
GRÂCE AU TABAC !
Pourquoi le diplômé de Cambridge qui faisait déjà parler de lui dans la planète science débarque-t-il à Montréal ? Après tout, il aurait pu choisir des universités prestigieuses aux ÉtatsUnis ou en Europe…
C’est à cause d’un mécène nommé William Macdonald qui avait fait fortune dans le tabac, d’abord à mâcher puis à fumer, et qui avait la connaissance à coeur.
Macdonald devait son immense fortune au tabagisme, mais il détestait l’odeur de la cigarette et trouvait que le fait de fumer rendait stupide. Comme philanthrope, il a voulu laisser derrière lui une trace plus positive. Après avoir financé des immeubles, il a fait recruter les meilleurs cerveaux du monde pour mettre McGill sur la sellette.
PAR ICI L’URANIUM
Quand Rutherford débarque du SS Yorkshire au port de Montréal en 1897, on l’accueille avec les égards protocolaires, mais on trouve qu’il ne correspond guère à l’image qu’on se fait du savant. De grande taille, dotée d’une voix forte et d’un rire éclatant, il semble plutôt sorti d’une famille d’agriculteurs. Ce qu’il est, en réalité : quatrième de 12 enfants ayant grandi sur une île océanienne où son père travaillait comme fermier.
Installé dans sa chaire de physique après avoir reçu sa fiancée de Nouvelle-Zélande, il ne perd pas de temps à étudier différentes propriétés de l’atome. Dans un de ses premiers articles scientifiques comme professionnel, il décrit des rayons inconnus de la science, bêta et alpha, des termes qu’on utilise encore aujourd’hui.
Ce sont ses travaux menés au tournant du siècle avec son collègue, Frederick Soddy, qui permettront de véritables percées poussant le chercheur au Nobel quelques années plus tard.
Mais sa réputation est déjà mondiale et il accepte un poste à Manchester en 1907 et retournera à Cambridge en 1919. Lorsqu’il quitte Montréal, on est heureux pour lui, mais en deuil d’un cerveau irremplaçable. Sa faculté reconnaît officiellement que son travail a contribué à la réputation de McGill « dans toutes les régions du monde ».