VAINCRE LE CYNISME POLITIQUE

Cinq questions à Isabelle Langlois, autrice de La candidate

Isabelle Langlois nous charme depuis plusieurs années grâce à des personnages féminins en quête d’affranchissement qui luttent souvent contre les préjugés. Elle écrit des dialogues d’où se dégagent réalisme et humour avec un soupçon d’exagération et de ras-le-bol sympathique. On lui doit les séries Rumeurs, Mauvais Karma et Lâcher prise, qui ont toutes connu des succès autant critiques que populaires. Elle investit cette fois-çi les coulisses de la politique avec une candidate poteau, Alix Mongeau, qui fait son apprentissage à la dure et sous le regard du public prêt à la voir chuter. La candidate est une vraie bombe pour vaincre le cynisme politique actuel.

On a beaucoup fait le parallèle entre Alix Mongeau et Ruth Ellen Brosseau. A-t-elle vraiment été une source d’inspiration ?

La prémisse est ce qui lui est arrivé lorsque le NPD l’a proposée comme candidate poteau et qu’elle a été prise pour exercer un métier dont elle ne voulait pas. Mais je n’ai pas étudié sa vie ni ce qu’elle a fait comme apprentissages. Dramatiquement, je trouvais que c’était savoureux. Alix est un personnage extrême qui ne passe pas inaperçu. Elle détonne au Parlement. En réalité, elle était incompétente, mais elle a beaucoup de qualités qu’elle met au service de sa fille, de sa famille et qu’elle va mettre au service de la population. Elle va combattre les préjugés, mais aussi les siens. Dans ce rôle, Catherine (Chabot) perce l’écran. Elle est pétillante, vraie et allie parfaitement drame et comédie.

On connaît peu les rouages de la politique. Quelles recherches ont été nécessaires pour écrire la série ?

J’ai fait ma propre éducation politique en faisant la recherche. J’ai lu toutes les biographies de politiciens québécois. J’ai trouvé des recherches passionnantes de Gérald Godin à Catherine Dorion. J’ai fait appel à une recherchiste qui est elle-même femme de politicien et qui avait accès à des informations que je n’aurais pas eues autrement. J’ai parlé à des journalistes, des consultants. C’était important pour moi de bien comprendre par exemple la discipline de parti, les frustrations, le travail en circonscription, la difficulté de la conciliation travail-famille. Je suis allée à Québec pour assister à la période de questions à l’Assemblée nationale. J’ai été inspirée par la série documentaire Nos élus (Télé-Québec) et par le film de Manuel Foglia qui a suivi Daniel Turp (Chers électeurs-ONF). J’ai aussi fait beaucoup de recherches sur les dépotoirs. J’ai développé une obsession pour les vidanges (c’est un enjeu de la série) !

Contrairement à tes autres séries, ce sont des épisodes d’une heure, ce qui est rare pour de la comédie dramatique. Pourquoi avoir opté pour ce format ?

Initialement, je voulais prendre un break de la comédie et de la couleur un peu sitcom. Je me suis dit : ça va être un drame. Au pire, je visais une comédie dramatique. Il y avait des enjeux. Je voulais jouer dans la vérité. Je ne vise jamais le punch. J’ai écrit un premier épisode et la première réaction de mon chum a été de me dire que c’était drôle. Au deuxième épisode, il m’a dit : c’est drôle en tabarouette !

On retrouve souvent des femmes qui s’affranchissent dans tes oeuvres. En quoi t’intéressent-elles ?

J’aime la notion de l’accomplissement. Je vois ça comme inhérent à l’évolution féminine. La candidate est un récit d’apprentissage. Valérie (Sophie Cadieux) dans Lâcher prise se relevait d’un burnout, Esther (Lynda Johnson) dans Rumeurs avait le syndrome de l’imposteur. En création, on dit toujours parlez de ce que vous connaissez. J’aime voir évoluer les femmes. Je les aime assez pour leur mettre aussi quelques bâtons dans les roues !

Est-ce que La candidate est aussi une façon de passer des messages ?

Je n’ai pas un point de vue cynique dans mon approche. Mais il y a un désir de dénoncer les politicailleries. Ça tombe sous le sens de se battre contre un dépotoir à ciel ouvert ! Mais si je le fais, c’est par la bande tout en offrant l’histoire la plus touchante, la plus drôle, en étant pertinente avec le sujet. Ce qui m’assoit au clavier, c’est toujours de faire la meilleure histoire possible.

La candidate, mardi 21 h sur ICI Télé

Catherine Chabot (en beige au centre) interprète le rôle d’Alix Mongeau dans la série La candidate. Elle est entourée, ci-contre, de Lily-Rose Loyer et Noé Lira (à droite).