Le Journal de Montreal - Weekend
LE CERCLE VICIEUX DE LA VIOLENCE
Dans sa pièce de théâtre La meute, présentée en 2018 sur les planches de La Licorne, Catherine-Anne Toupin abordait de façon crue et percutante le thème de la violence omniprésente dans notre société. Six ans plus tard, alors que l’adaptation cinématographique de sa pièce s’apprête à prendre l’affiche, l’actrice et dramaturge se désole de constater que ce sujet est encore plus actuel que jamais.
« Au début, quand j’ai commencé à écrire le scénario du film [adapté de la pièce], je me disais qu’il serait passé date quand il serait prêt à sortir. Ben finalement, pas pantoute ! », lance Catherine-Anne Toupin en entrevue au Journal.
« Malheureusement, avec la pandémie, cette perte de contrôle sur le discours, cette agressivité ambiante et ce manque de respect pour l’autre sont encore plus présents qu’avant. C’est comme un engrenage dont on n’est plus capable de sortir. On a perdu la notion de la sensibilité de l’autre et ce que ça représente d’avoir une vraie personne devant nous. Notre humanité s’effrite de plus en plus. Le film parle de cela… »
Prenant la forme d’un suspense psychologique, le film – rebaptisé
Lucy Grizzli Sophie pour son passage au grand écran – raconte l’histoire de
Sophie (Catherine-Anne Toupin), une femme traumatisée et traquée pour une raison qu’on ignore. Cherchant à fuir la réalité, elle conduira toute une nuit pour atterrir dans un « bed and breakfast » situé à des centaines de kilomètres de chez elle, où elle sera accueillie par Martin (Guillaume Cyr) et sa tante Louise (Lise Roy).
Pour éviter les divulgâcheurs, on vous épargne les (nombreux) rebondissements qui suivront…
L’INFLUENCE DU CINÉMA
Dès le lendemain de la première de sa pièce à succès La meute, en 2018, Catherine-Anne Toupin a commencé à recevoir des appels de producteurs et cinéastes intéressés à adapter son oeuvre au grand écran.
« Ça m’a pris par surprise, confie-telle. Je ne m’attendais pas du tout à cela. Je sais que mon écriture théâtrale est très cinématographique parce que le cinéma est ma première influence. Quand j’avais 8 ans, je n’allais pas au théâtre. J’allais plutôt voir des films de Spielberg et je regardais des films de Hitchcock avec ma grand-mère. Ça m’a surpris qu’il y ait autant d’intérêt pour ma pièce. Mais au bout du compte, c’est un suspense et une histoire de vengeance. Au cinéma, c’est toujours payant ! »
Catherine-Anne Toupin dit avoir rencontré plus d’une dizaine de cinéastes avant d’arrêter son choix sur la réalisatrice Anne Émond (Nelly, Jeune Juliette) pour l’aider à porter cette histoire à l’écran.
« Il s’est passé quelque chose de spécial avec Anne, explique-t-elle. On a eu une connexion, une rencontre. Mon instinct m’a dit tout de suite que c’était elle. J’ai écrit la première version du scénario seule, mais elle m’a accompagnée par la suite en me donnant des images, des trucs qui l’inspiraient et des idées sur la façon de tourner. Je me suis servie de cela pour que le film soit, en fin de compte, mon histoire, mais aussi son film. »
VENGEANCE
Difficile de parler des sujets abordés dans Lucy Grizzli Sophie sans révéler trop d’informations sur son intrigue. Disons simplement que le film explore les thèmes de la vengeance et du cercle vicieux de la violence d’un point de vue féminin. Catherine-Anne Toupin y pose cette question fondamentale : doit-on répondre à la violence par la violence ?
« Mais ce n’est pas un film moralisateur, précise l’actrice et scénariste de 48 ans. Je ne dis pas aux gens quoi penser. J’ai juste envie qu’ils en parlent. Pour moi, c’est ça la solution pour revenir [à des comportements] plus respectueux et plus humains. Je pense que l’art sert à ça. Ça ne changera pas le monde, mais ça peut ouvrir un dialogue. »
√ Le film Lucy Grizzli Sophie sera présenté en ouverture des Rendezvous Québec Cinéma le 21 février et prendra l’affiche partout au Québec deux jours plus tard.