Le Journal de Montreal - Weekend

À NOUS LES FANTÔMES DES MONTS VALIN

C’est en poussant un soupir de soulagemen­t qu’on parvient au refuge l’Ulysse du parc national des Monts Valin au terme d’une montée presque sans interrupti­on de 5,5 km.

- MATHIEU-ROBERT SAUVÉ

Là, un refuge rustique nous attend pour la nuit. Pas d’eau, pas d’électricit­é, pas de gaz, mais du bois en masse pour chauffer le poêle. Heureuseme­nt que notre groupe de skieurs n’avait pas prévu le camping d’hiver, car le mercure du thermomètr­e descend à vue d’oeil. Il affichera -27 degrés le lendemain matin.

Qu’importe. Pour des Montréalai­s en mal d’hiver, le parc national des Monts-Valin est une oasis de cet or blanc si rare en 2022-2023. Situé à 40 minutes d’auto au nord de Saguenay, le massif montagneux âgé de plus d’un milliard d’années présente des caps dénudés semblables à ceux de la toundra.

Et il y a de la neige en masse ! Pas moins de 361 cm de neige sont tombés cette année dans le secteur.

JOUER DANS LA NEIGE

« Il y a beaucoup moins d’accumulati­ons qu’à l’habitude, mais il y a moyen de jouer dehors », lance Cynthia Gagnon à un groupe de marcheurs que nous croisons près du sommet, le pic Dubuc.

L’employée de la Société des établissem­ents de plein air du Québec (Sépaq) donne ses consignes de sécurité aux gens qui ont été transporté­s jusqu’ici par autoneige à chenillett­es à partir des bâtiments de l’accueil. Une trentaine de personnes sont venues s’initier à la raquette hors-piste dans un décor féérique.

Nous sommes au milieu de la Vallée des fantômes, où les arbres de petite taille présentent la particular­ité de s’enduire de neige de tous les côtés, au point de disparaîtr­e complèteme­nt, laissant tout juste la forme du végétal. Ce sont eux les « fantômes ».

AUTRE PAYS

Alors qu’on patauge dans la gadoue à Montréal et que le Palais de Bonhomme fond à vue d’oeil, on doit creuser deux mètres dans le blanc pour avoir accès à l’eau. « On est comme dans un autre pays », lance Léonard, qui découvrait avec ravissemen­t ce boisé sauvage.

« On a eu l’impression de plonger enfin dans l’hiver pour la première fois cette année », raconte son frère Edmond, qui a pris trois jours de congé pour conquérir le plus haut sommet accessible du Saguenay–lac-Saint-Jean (984 m).

Nous y sommes parvenus après une randonnée de 12 kilomètres au deuxième jour.

Vincent Nantel, qui en était à sa première expédition de ski de randonnée, est encore ému par la beauté des paysages. « C’était la plus belle montagne que j’aie vue de ma vie au Québec », lance-t-il.

L’ingénieur forestier Antoine Roy, également du voyage, redécouvra­it ce massif avec plaisir après 15 ans. Pour cet expert, le parcours présente plusieurs défis techniques assez relevés. Il vaut mieux selon lui l’entreprend­re en raquettes à moins d’avoir une solide expérience en ski hors route.

« En tout cas, on a trouvé notre sentier de neige », lance-t-il en référence au ver d’oreille des Classels que nous avons chanté durant le séjour.

LES MONTS VALIN EN BREF

Formés d’anorthosit­e, une roche issue des profondeur­s de l’écorce terrestre, les monts Valin sont la racine d’une montagne autrefois gigantesqu­e. Infiltré par le magma à 30 kilomètres de profondeur il y a 1,15 milliard d’années, le massif montagneux est ce qui reste des montagnes qui atteignaie­nt alors l’altitude de l’Himalaya et qui ont été érodées par le temps.

Le parc national des Monts-Valin a été créé en 1996 par le Gouverneme­nt du Québec, et la Sépaq en assure l’accessibil­ité.

UNE EXPÉDITION AUX FANTÔMES, C’EST QUOI ?

Première journée : de l’accueil au refuge l’Ulysse : 5,5 km en montée. Deuxième journée : de l’Ulysse au Fantôme : 8 km en terrain difficile. Troisième journée du Fantôme à l’accueil : 12 km, dont la moitié assez difficile.

ÉQUIPEMENT

Le parcours se fait bien en raquettes, mais se pratique aussi en ski hors-piste avec peaux. Il y a moyen de faire livrer ses bagages en motoneige aux différents refuges.

RÉSERVATIO­N OBLIGATOIR­E

Réservatio­ns obligatoir­es sur le site de la Sépaq ou par téléphone : 1 800 665-6527 https://www.sepaq.com/reservatio­n/

Il y a un service de location d’équipement sur place.

COÛT

32,75 $ (semaine) ; 34,35 $ (fin de semaine) par nuit par personne en refuge (taxes non comprises). Il faut aussi payer un droit d’accès ou posséder une carte de la Sépaq.

OÙ?

Au village de Saint-Fulgence, à 10 km de Chicoutimi, prendre la rue du Saguenay, puis emprunter le rang Saint-Louis sur 17 km.

 ?? ?? La conquête du sommet des monts Valin, le cap Dubuc. De gauche à droite, Mathieu-Robert Sauvé,
Antoine Roy, Edmond Sauvé, Léonard Sauvé et Vincent Nantel.
La conquête du sommet des monts Valin, le cap Dubuc. De gauche à droite, Mathieu-Robert Sauvé, Antoine Roy, Edmond Sauvé, Léonard Sauvé et Vincent Nantel.
 ?? ?? Les monts Valin reçoivent une bonne quantité de neige chaque année. Plus de 3 mètres en 2023-2024, et c’était moins qu’à l’habitude.
Les monts Valin reçoivent une bonne quantité de neige chaque année. Plus de 3 mètres en 2023-2024, et c’était moins qu’à l’habitude.
 ?? ?? Vincent Nantel au pic du Grand Corbeau, dans le parc national des Monts-Valin.
Vincent Nantel au pic du Grand Corbeau, dans le parc national des Monts-Valin.
 ?? ?? Le pic Dubuc est au sommet du massif montagneux.
Le pic Dubuc est au sommet du massif montagneux.
 ?? ?? Dr Edmond Sauvé (à l’avant-plan) et son frère Léonard aux monts Valin.
Dr Edmond Sauvé (à l’avant-plan) et son frère Léonard aux monts Valin.

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