Le Journal de Montreal - Weekend
« ON S’APPROPRIE NOTRE PROPRE EXPÉRIENCE DE FEMME »
– Alexa-Jeanne Dubé
Alexa-Jeanne Dubé offre au cinéma l’adaptation poétique et onirique d’un spectacle sur ce que vivent les adolescentes aujourd’hui. Entre film et expérience sensorielle, Sucré seize aborde des thématiques aussi contemporaines que l’anxiété, les réseaux sociaux, le viol, l’inceste, les troubles alimentaires ou le premier amour. La réalisatrice nous explique…
« À la base, Luce Pelletier, metteuse en scène du spectacle, m’a demandé de faire une captation. Les comédiennes ont fait une tournée dans les maisons de la culture à l’automne 2022 et Luce voulait élargir le public en faisant une captation. J’ai décidé de proposer ce qu’on voit aujourd’hui à l’écran et elle m’a donné carte blanche » a ainsi détaillé Alexa-Jeanne Dubé en entrevue à l’Agence QMI.
Ce sont donc huit adolescentes qui racontent leurs expériences, les comédiennes de la pièce de théâtre présentant leurs textes devant la caméra de la réalisatrice, en pleine nature.
Les jeunes femmes se sont prêtées au jeu alors qu’elles n’avaient pas encore présenté la pièce de théâtre.
« Elles n’avaient pas encore pris des plis de théâtre et étaient super bien préparées. Ça a été très intéressant de travailler avec elles à travers ce processus-là », a souligné Alexa-Jeanne Dubé, qui a tourné alors qu’elle était enceinte de sept mois.
UN UNIVERS VISUEL
« Pour elles aussi, c’était intéressant, puisqu’au théâtre on est plus dans l’imagination. […] Je suis très influencée par les arts visuels. Avant d’être à la retraite, mon père était professeur en muséologie à l’Université Laval, j’ai donc passé la majeure partie de mon enfance dans des vernissages, dans des musées, dans des galeries et je pense que ça a forgé mon oeil », a-t-elle confié.
Présenté comme une symphonie, Sucré seize a été modifié par la réalisatrice. « J’ai changé l’ordre des textes, j’ai voulu reprendre la structure d’une symphonie. Et comme le texte est très littéraire, je trouvais que la musique aidait à faire ressortir l’émotion. Je trouvais intéressant de proposer un univers visuel et sonore différent à chaque tableau, ce qui est aussi une façon d’alimenter la curiosité du spectateur. »
UN PROPOS FÉMININ…
Sucré seize est sorti hier, le 8 mars, date de la Journée internationale des droits des femmes. « Il y a quelque chose de l’hommage chez toutes ces jeunes femmes, a commenté Alexa-Jeanne Dubé. Il n’y a pas d’homme dans la pièce, que des femmes, et je trouvais important de mettre de l’avant cette prise de parole. »
« J’ai l’impression que de parler de la réalité d’adolescentes – et de femmes – est un geste féministe. On prend parole, on s’approprie notre propre expérience de femme. Dans ce sens, il y a quelque chose de politique, même si je n’avais pas une posture revendicatrice », a-t-elle dit.
« Par rapport au regard, par rapport à la direction photo, cela apporte un regard différent, qu’on le veuille ou non, et qu’on a peu eu dans l’Histoire. […] On est tellement habitués au regard masculin que, quand on voit le contraire, c’est tout un autre monde qui s’ouvre à nous. Qu’on le veuille ou non, ce regard est politique.
« Je suis de nature optimiste et j’aime à penser que, oui les contextes sont différents, mais qu’il y a quelque chose de profondément universel qu’on traverse à l’adolescence. Malgré les difficultés, quand je repense à mon adolescence, je me souviens de quelque chose de lumineux », a-t-elle conclu.
Sucré seize est à l’affiche dans les cinémas de la province.