Le Journal de Montreal - Weekend

LA POÉSIE DE LA LUTTE

Avec son nouveau spectacle de cirque, SLAM !, le metteur en scène Robert Lepage a voulu donner à la lutte une certaine forme de poésie.

- FRÉDÉRIQUE DE SIMONE

« C’est un peu le cirque qui sert à ça », a-t-il dit en entrevue avec l’Agence QMI, au cours du week-end, parlant de son nouveau projet. Il caressait d’ailleurs depuis longtemps l’idée d’unir sa compagnie, Ex Machina – qui n’avait jamais produit auparavant de spectacle de cirque comme tel –, à la troupe québécoise FLIP Fabrique.

« J’ai toujours trouvé qu’il y avait beaucoup d’affinités entre le cirque et la lutte pour toutes sortes de raisons : sur le plan physique, le côté acrobatiqu­e de la lutte qui parfois s’approche des arts circassien­s, les personnage­s, les contextes. Il se passe beaucoup de choses à la lutte, un peu comme le cirque, sauf qu’il n’y a pas la poésie », a-t-il dit.

« J’ai toujours voulu faire se côtoyer ces deux mondes-là, voir ce que l’un pouvait apporter à l’autre », a-t-il ensuite ajouté.

Peu avant la pandémie, le directeur artistique avait invité son ami, Marko Estrada, qui a coordonné tous les combats pour le spectacle, pour un premier atelier avec les artistes circassien­s « pour essayer des choses ».

« On a vu que les artistes étaient capables de tomber et même de faire des choses que les lutteurs ne sont pas nécessaire­ment capables de faire. On s’est dit qu’il y avait là une belle piste », a confié le metteur en scène, qui a avoué avoir eu besoin d’une petite adaptation pour retrouver ses repères avec les circassien­s, qui ont des méthodes de travail bien différente­s de celles des comédiens.

LE SPECTATEUR

Présenté à la TOHU jusqu’au 7 avril, le spectacle SLAM ! revisitera tous les clichés habituels du monde de la lutte ainsi que ses personnage­s : les arbitres, les bons, les mauvais, les prétentieu­x, les patriotes, bref toutes sortes d’archétypes, qui s’affrontent dans l’arène, « mais en dehors de ça, il y a carrément des numéros de cirque », a prévenu Robert Lepage.

« Les gens vont reconnaîtr­e la facture d’Ex Machina. Et on sait qu’à la lutte, le personnage principal c’est le spectateur, donc on a travaillé ça beaucoup, et je dirais que la grande différence ou la grande nouveauté qu’on a explorée, c’est la manière d’incarner l’idée du spectateur, comment provoquer des réactions et jouer ce jeu-là. C’est une affaire qu’on n’avait jamais faite », a-t-il poursuivi.

LES ARTS VIVANTS

« Souvent au théâtre, il y a le quatrième mur. On veut que les gens n’intervienn­ent pas trop, mais au contraire, le théâtre, ç’a déjà été ça, ç’a déjà été sur une place publique, où les gens passaient des commentair­es et réagissaie­nt. Mais c’est devenu bien poli et presque deux pôles définis : la scène et la salle. Moi, je me suis toujours dit qu’il fallait essayer de trouver une façon d’abolir ce quatrième mur », a fait valoir Robert Lepage.

L’homme de 66 ans, dont l’horaire pour la prochaine année sera assez rempli, croit que la pandémie a eu pour effet de réveiller la conscience du public sur les arts vivants.

« C’est plus le fun de vivre ça en groupe et de faire une communion, que de juste amener ça à la télévision. Je pense qu’il y a un regain de l’art vivant, mais l’art vivant, il faut l’encourager, faut l’aider », a-t-il dit.

« On n’a pas toujours les bonnes politiques pour l’aider. On tient ça pour acquis souvent, alors que ç’a vraiment besoin de soutien. L’argent va beaucoup dans l’audiovisue­l, le cinéma, la télévision. Je pense que de plus en plus, on peut se définir par nos arts vivants, du moins beaucoup plus qu’avant. Avant, on apprenait, on cherchait un peu notre style, mais je pense que maintenant, on commence à avoir une maturité, on commence à avoir un patrimoine », a-t-il soutenu.

SLAM ! sera présenté à la TOHU jusqu’au 7 avril.

 ?? ??
 ?? ?? SLAM ! DE ROBERT LEPAGE
SLAM ! DE ROBERT LEPAGE

Newspapers in French

Newspapers from Canada